L’année du croyant

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L’année du croyant

Le catharisme a ceci d’intéressant qu’il maintient un lien spirituel permanent avec l’ecclesia (Église) tout au long de l’année de façon à aider les croyants à ne pas se laisser happer par le monde qui participe à l’endormissement de l’esprit saint prisonnier de sa tunique d’oubli.
En effet, la vie mondaine nous noie en permanence sous des tonnes d’obligations et de stimuli sensoriels qui nous poussent à laisser de côté la part spirituelle, renforçant ainsi nous « endormissement ». Pour aider les croyants à surmonter cet obstacle sournois, l’année cathare est rythmée de périodes et de rendez-vous au cours desquels les croyants peuvent se « recharger » spirituellement. Ces périodes et ces rendez-vous sont des pauses dans la vie mondaines au cours desquelles le croyant va poursuivre son apprentissage par le biais des prêches que lui offrent les Bons-Chrétiens et en participant, à la hauteur de ses capacités, à l’ascèse des carêmes et des jours (jeûnes hebdomadaires).

Les prêches

La pratique ecclésiale cathare met la connaissance en amont afin que le croyant puisse adosser sa foi à quelque chose de cohérent et disposant d’une argumentation sensée.
Cette connaissance s’acquiert, surtout au début, par l’aide directe de Bons-Chrétiens qui utilisent l’outil du prêche pour apporter des notions adaptées à chacun. Malheureusement, aujourd’hui, en l’absence formelle de Bon-Chrétien, les croyants manquent de références stables pour appuyer leur formation. La tendance facile est d’investir telle ou telle personne qui pourrait paraître bien plus avancée, tant par ses connaissances livresques ou par ses compétences exégétiques ou philosophiques, d’un statut qui ne lui revient pas. Par contre, il est toujours utile de ne fermer aucune porte et d’écouter les points de vue et les analyses de tous afin d’y chercher les informations utiles, quitte à laisser de côté ce qui pose problème ou qui interroge.

Dans la période du catharisme médiéval, les prêches étaient réguliers et suivaient le calendrier liturgique catholique, pour des raisons de simplicité sans aucun doute. Cependant, il était également habituel de proposer des prêches selon les besoins spécifiques comme l’accueil d’un nouveau croyant, la visite en maison cathare de personnes extérieures ou la simple demande d’un groupe de croyants désireux de recevoir la visite de Bons-Chrétiens.

L’ouverture d’une maison cathare permanente, habitée par un ou des novices, sera logiquement l’occasion de renouer avec cette organisation. Même s’il faudra rester prudent sur la qualité de l’apport du ou des novices, qui par définition, ne sont pas des Bons-Chrétiens, cela sera l’occasion de remettre sur l’ouvrage ce système visant à couper la vie mondaine de périodes spirituelles. Le problème qui va se poser est celui de l’éloignement physique. Je pense qu’il serait bon de mettre en place un système permettant aux croyants, trop éloignés pour venir ou qui ne pourront se libérer aux dates et heures programmées, de prendre connaissance de ce qui se dira lors de ces rendez-vous. Cela reste à réfléchir.

Les Jours et les carêmes

L’Église cathare n’était pas scindée en deux groupes distants, celui des Bons-Chrétiens et des novices et celui des croyants et des sympathisants, comme le pensent à tort bien des découvreurs du Catharisme et comme le dénoncent ses opposants. En fait, si les premiers semblaient vivre dans leur monde dont les seconds semblaient exclus, les choses étaient bien différentes.

Les textes qui nous sont parvenus nous donnent une idée de l’organisation ecclésiale mais, compte tenu du contexte dans lequel ces textes ont été recueillis (Croisade, Inquisition, répression, etc.) et de la fragilité de beaucoup de témoignages (simples témoins, polémistes, croyants des derniers temps, etc.), il faut savoir les lire à la lumière des connaissances que nous avons du système de fonctionnement de l’Église cathare. Si les Bons-Chrétiens attachaient tant d’importance à maintenir un lien permanent dans leur vie entre période régulière (vie moniale) et période séculière (vie mondaine), ce ne pouvait être pour rejeter les croyants hors de leur sphère. Au contraire, ces derniers étaient partie prenante de toutes les activités spirituelles des Bons-Chrétiens. Simplement, ces derniers, conscient de la fragilité de l’avancement des croyants, faisaient le choix de les associer de façon adaptée, donc partielle, à leurs activités spirituelles pour ne pas perturber leur cheminement.

Si les Bons-Chrétiens respectaient des périodes de jeûnes hebdomadaires strictes et précises (lundi, mercredi et vendredi), ils n’imposaient rien aux croyants, d’autant que ces derniers menaient une vie mondaine souvent difficile, voire harassante, qui ne se prêtait pas forcément au jeûne. Ces Jours étaient néanmoins parfaitement connus des croyants qui pouvaient tout à fait en profiter pour adapter leur comportement personnel afin de se mettre, en quelque sorte, en communion avec les communautés évangéliques cathares dont ils savaient qu’elles étaient pour leur part en endura ces jours-là.
De même, les trois carêmes étaient bien délimités et connus de tous, ce qui permettait aux croyants de les mettre à profit dans leur vie quotidienne pour donner plus d’importance à leur développement spirituel.

De nos jours, rien ne nous empêche de faire de même. La Rencontre annuelle qui se tenait jusqu’à présent à Roquefixade, se termine la veille du carême de la Consolation. Elle se prête particulièrement pour les croyant à une mise en condition pour poursuivre la démarche spirituelle jusqu’aux abords de la période estivale qui va redonner à la part mondaine une prédominance importante en raison des cycles professionnels et des engagements familiaux.

Pour les personnes qui se sentent plutôt attirées par l’approche dite dyarchienne ou absolue, c’est-à-dire très proche des choix doctrinaux des Bons-Chrétiens occitans, et notamment languedociens, la maison cathare de Carcassonne sera là aussi un point de référence pour organiser des périodes de méditation et de prêches — même s’il ne saurait être question de leur accorder la même valeur que pour ceux des Bons-Chrétiens — qui permettront aux croyants de participer à leur manière à ces grandes périodes spirituelles que sont les carêmes.

Bien entendu, chacun, selon ses choix personnels, ses aspirations à progresser dans son cheminement et sa volonté d’approfondir ou pas ses connaissances sur le Catharisme, pourra faire de ces périodes des moments privilégiés et rythmés de sa vie spirituelle personnelle.

Éric Delmas – 19/07/2015

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