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Le croyant ne mange pas à la carte

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Le croyant ne mange pas à la carte !

Présentation

Cela fait longtemps que l’on me pose les mêmes questions sur l’intérêt de la religion, sur la foi, sur la définition du croyant cathare et sur les rapports entre les religions. Cela donne parfois motif à débats enflammés et à ruptures durables.

Mais il est très difficile d’expliquer à des personnes qui n’ont pas eu l’expérience de la foi intime, ce que cela recouvre. Je prends souvent l’image de l’adolescent et de l’adulte pour tenter de l’expliquer : le premier croit savoir ce qu’est la vie d’adulte et le second sait qu’il n’en est rien, mais il n’a pas les moyens de le faire comprendre au premier.
De même, dire à quelqu’un qu’il est sympathisant quand il se pense croyant ou qu’il est croyant alors qu’il se pose des questions et doute, est un exercice difficile et peut s’avérer source de conflit.

À la façon des orateurs médiévaux et même du premier siècle, je vais utiliser le principe de la parabole pour que chacun puisse mieux visualiser ce que souhaite vous faire passer comme message.

Choisir sa table

Imaginons deux personnes désirant manger dans un restaurant un peu particulier. En effet, ce restaurant propose, comme ses confrères, de manger à la carte ou au menu. Première particularité : si vous mangez à la carte, ce sera en mélangeant des mets qui figurent sur des menus différents, et si vous choisissez un menu vous ne pourrez refuser ou modifier aucun des mets qui y figurent. La seconde particularité est que si vous mangez selon les règles d’un menu, vous occuperez une place dans la salle et à la table du menu choisi, alors que si vous choisissez la carte, vous devrez vous asseoir à une table où ne se trouvent que des personnes comme vous. Et ce, même si votre choix de mets ne diffère d’un des menus que sur un seul plat.

L’avantage de la carte, que beaucoup se voient déjà choisir, est que l’on peut manger ce que l’on veut et rejeter ce que l’on ne veut pas. De ce choix peut découler un repas nourrissant et équilibré ou, au contraire, un repas mauvais pour votre santé, c’est-à-dire pour le salut de votre intestin. L’inconvénient est que vous ne pourrez pas vous intégrer à ceux qui auront choisi un menu, même si cela correspond à vos aspirations.

L’avantage du menu est que vous êtes assuré, si vous le suivez scrupuleusement, qu’il vous apportera une alimentation saine et équilibrée tout à fait utile à votre santé. En outre, vous serez à table avec des personnes qui partagent toutes vos aspirations et vos convictions. Vous serez entouré de convives qui, bien qu’installés à d’autres tables, car leur menu diffère plus ou moins du vôtre, pourront partager avec vous sur certains points et débattre éventuellement sur des sujets où vous différez, comme le choix de certains plats, la disposition des couverts, la façon de se tenir à table, etc.

Choisir la carte ou le menu ?

Certes, nous l’avons dit, choisir la carte semble le choix le plus évident : on met dans son assiette uniquement ce qui nous convient ou nous demande le moins d’efforts et ainsi on est assuré que tout le repas se déroulera de façon assez agréable. Mais le but du repas est de manger correctement, pas de se faire plaisir. Il ne faut pas confondre les activités. Et c’est d’ailleurs le problème principal de notre époque où l’on tente de nous faire croire qu’une activité sans plaisir est mauvaise et que le plaisir est la base de nos nécessités. Il vaut mieux manger bien, quitte à consommer certains mets moins faciles à manger ou d’un goût moins agréable que d’autres et être certain de la qualité de notre alimentation, que de n’ingérer que ce qui fait plaisir et de risquer l’indigestion ou une maladie sur le long terme.
Par contre, la carte nous astreint à manger séparé de ceux dont nous pensions être proche, mais qui eux ont choisi un menu. Menu qui nous plaît aussi globalement, mais dont nous voulions rejeter certains plats qui ne nous permettent pas d’affirmer notre droit au plaisir. Cette séparation, maintenant qu’elle apparaît clairement, nous met mal à l’aise, voire nous insupporte et, au lieu de nous interroger sur les motifs de nos choix, nous considérons que la faute en revient aux autres et nous fustigeons ceux qui mangent ainsi à l’écart de nous et nous mettent le doigt sur nos différences.
Il suffirait donc de choisir le menu, mais il impose des contraintes qui peuvent nous poser problème. Déjà, chaque menu nous conduit à choisir une table spécifique et pas une autre. Certes, les menus chrétiens nous placent à des tables proches les unes des autres, car les différences peuvent être très faibles parfois : la table cathare et la table gnostique ont certes une nappe et des couverts différents, mais c’est à peu près tout, même si à la table gnostique on peut éventuellement refuser un convive s’il se prénomme Paul.

Parfois, les différences sont plus marquées. La table catholique et la table protestante se supportent, mais la table musulmane veut que tous reconnaissent que son installation est la meilleure, ce que contestent la table catholique et la table orthodoxe, sans parler de la table juive où l’on sourit en coin en pensant que ces jeunes trublions ne sont que des avatars manqués de ses propres convives.
De même, les plats peuvent fortement différer d’une table à l’autre. Ces plats sont d’ailleurs parfois l’objet de polémiques violentes : l’homosexualité est absente de presque toutes les tables, la planification des naissances, l’avortement, la PMA, le mariage des ministres du Culte, etc. Ce sont d’ailleurs souvent ces points qui ont poussé d’autres convives à choisir la carte.

Les convives

Ceux qui veulent un menu précis et qui mangent à la même table

Pour ceux-là, les choses sont claires ; ils acceptent de manger tous les plats de leur menu et ils sont en harmonie avec les autres convives de la même table. Il peut arriver qu’ils jettent parfois un œil sur les tables adjacentes ou plus éloignées et s’étonnent ou raillent les choix d’organisation de ces autres tables ou les plats de leur menu.
Mais ils savent que le respect de leur menu les conduira à un repas de qualité qui, sauf accident ou changement de cap, leur assurera le salut de leur santé future.
Ils peuvent être un peu tristes de voir au loin, dans l’autre salle, des amis qu’ils croyaient proches d’eux manger à la carte faute d’avoir pu comprendre l’intérêt du menu qu’ils ont choisi.
Pour manger ainsi il faut être au courant de ce qu’implique ce menu et l’avoir suffisamment étudié et comparé pour être certain de ne pas faire d’erreur.

Ceux qui veulent manger à la table d’un menu en le modifiant

Ces amis justement auraient bien voulu manger à leur table, mais certains plats leur semblaient trop indigestes ou trop contraignants et ils ont finalement opté pour la carte, faute de pouvoir modifier le menu. Ils sont donc insatisfaits globalement, même si leurs choix les contentent sur le moment. Ils se doutent que s’en tenir à un menu doit offrir quelque chose d’important qu’ils ne peuvent saisir et dont ils ont peur que cela leur fasse défaut à terme. Alors, soit ils sont moroses, soit ils deviennent vindicatifs. Moroses, ils vont perdre un peu du plaisir qu’ils auraient dû éprouver en consommant ces mets choisis sur mesure et ils vont profiter de toutes les occasions pour se lever de table et passer à proximité de la table réservée au menu qu’ils ont finalement refusé. Vindicatifs, ils vont exprimer haut et fort leur indépendance et critiquer ceux qui les ont rejetés, ce qui est à leurs yeux une forme de mépris et d’extrémisme.
En fait, ces convives sont tiraillés par leurs envies et refusent cependant d’être à l’écart, car l’isolement les inquiète.

Ceux qui ne veulent pas de menu et qui préfèrent la carte

Mais à leur table se trouvent des personnes qui ont délibérément choisi de ne se nourrir qu’à la carte. Tout simplement parce qu’ils considèrent que la qualité nutritionnelle des menus est une fable et que leur organisme peut supporter tout ce que leur plaisir leur commandera de manger. Que ces personnes croient à une règle nutritionnelle judicieuse sans savoir l’identifier dans les menus proposés, parce qu’ils n’ont pas encore la connaissance nécessaire, ou qu’ils ne croient à aucune règle nutritionnelle et considèrent même cette croyance comme avilissante pour le libre arbitre de chacun, chacun est là pour une bonne raison. Ils l’acceptent volontiers et s’ils regardent les tables des menus, c’est davantage pour en rire ou pour plaindre ceux qui s’imposent de telles contraintes que par envie.
Pour autant, ils choisissent dans la carte des plats qui figurent dans certains menus, ce qui amoindrit un peu leur sensation d’indépendance.

La qualité du repas

Exprimer un point de vue sur la qualité du repas est un exercice difficile. En effet, ayant fait le choix d’un menu, j’ai logiquement tendance à être convaincu de l’importance de la qualité du repas et de préférer le mien à celui des autres.

Essayons néanmoins d’être pragmatiques dans notre réflexion.
De deux choses l’une : soit la qualité des repas n’aura aucune incidence sur l’état futur de notre santé et pour le salut de notre bien-être, soit il est essentiel d’avoir des repas équilibrés et de qualité pour espérer sauver notre peau.
Dans le premier cas de figure, où l’on s’installe et quoi que l’on mange, notre santé n’a pas à en souffrir. Du coup, ceux qui mangent à la carte n’ont rien à redouter et les menus non plus en fait. Certes, les cartes vont se moquer de leurs efforts et contraintes finalement inutiles. Mais ce qui compte c’est d’être en bonne santé.
Dans le second cas de figure, ceux qui mangent à la carte vont au-devant de gros ennuis et quand ils finiront par s’en rendre compte et par l’admettre, ils devront suivre un traitement et un régime draconiens pour espérer rejoindre l’état de santé des autres ; s’il est encore temps de la faire. Ceux qui auront choisi un menu, pour autant que le cœur du menu — c’est-à-dire l’équilibre alimentaire — y soit respecté, auront de bien meilleures chances d’être en bonne santé et de se sauver.

Cela correspond à la discussion que je peux avoir avec des personnes qui ne comprennent pas mes choix spirituels et qui voudraient les moquer, mais craignent mes arguments. Pour ma part, je me contente de leur expliquer que mes choix sont strictement pragmatiques. En effet, ayant choisi la voie que m’indique ma foi et le comportement qu’approuve ma morale, je n’ai que deux issues possibles :

  • soit je me trompe et il n’y a rien après la mort, auquel cas je n’aurais rien perdu puisque j’aurais vécu en accord avec mon point de vue ;
  • soit il y a bien un au-delà de la mort, auquel cas je serai satisfait d’avoir suivi ma voie.

Pour mon interlocuteur qui fait le choix de ne pas avoir la foi, il y aussi deux hypothèses :

  • soit il n’y a rien après la mort et il n’aura rien perdu non plus ;
  • soit si son comportement n’a visé qu’à satisfaire ses pulsions et qu’il y a un au-delà, il court le risque d’en supporter les conséquences.

Au final, je me trouve plutôt bien avisé d’agir comme je le fais, surtout que ce qui est vécu comme une contrainte par les autres n’en est pas une pour moi.

Conclusion

Comme dans toute parabole, il convient de proposer une courte analyse afin d’expliquer clairement les choses à celles et ceux qui hésiteraient encore sur l’interprétation à donner à ce texte.
Quand on est croyant, on accepte la doctrine de sa foi sans réserve. Si l’on veut commencer par arranger le menu à sa guise on n’est plus croyant, mais au mieux sympathisant.

Le croyant ne mange pas à la carte !

Certes, beaucoup de personnes, qui ont perdu le sens de ce que croyant veut dire, se pensent croyantes et laissent leur mondanité et leur sensualité dicter des choix qui, de fait, les remettent hors de la foi à laquelle elles prétendent appartenir. On voit notamment cela dans le catholicisme où les croyants critiquent le célibat des prêtres, le rejet de la contraception et de l’avortement, la PMA et que sais-je encore. Il est tout à fait légitime d’être choqué par certains choix de l’Église catholique ; la seule voie honnête est alors de s’en séparer au lieu de vouloir imposer ses choix.

Concernant le catharisme, c’est la même chose. Nous avons maintenant une idée précise de ce qu’est la doctrine cathare. Soit on la fait sienne et l’on est croyant, soit on voudrait en modifier certains points et on n’est, au mieux que sympathisant.

Enfin, cessons de nous focaliser sur des points secondaires. L’habitude du judéo-christianisme est de nous faire croire que tout est doctrine. C’est faux ! La doctrine est l’ensemble des points qui définissent l’attitude du croyant en vue de son salut. La cosmogonie n’est pas doctrine ; c’est tout au mieux une tentative de compréhension ou d’explication fortement limitée par les capacités de notre cerveau mondain à se projeter dans un espace qui lui sera à tout jamais totalement étranger et inaccessible.

Cependant, la cosmogonie ne peut s’opposer à certains éléments doctrinaux fondamentaux, sous peine de nullité de la doctrine et, par nécessité, de la religion elle-même. Selon les religions concernées, peu importe que l’on pense que Dieu est créateur de l’univers ou pas, que Jésus a vécu en homme ou pas, que Marie fut vierge et mère ou pas. Ce qui compte, c’est que l’on suive la doctrine de façon à pouvoir accéder au salut. Et si l’on ne peut se fixer sur une foi, cette doctrine qui est généralement à peu près la même dans toutes les religions, peut s’appliquer globalement hors de la religion et elle devient alors une morale de vie, ce qui permet à un athée de vivre aussi bien qu’un croyant.

Pour le catharisme, la cosmologie ne peut faire de Dieu le créateur d’un monde imparfait ou de Jésus un être humain volontairement déchu de son état spirituel. Mais outre le minimum cosmologique cohérent avec la doctrine, ce que le catharisme nous rappelle, comme le faisait la philosophie grecque, c’est que la doctrine seule est insuffisante ; il faut vivre au quotidien en accord avec sa doctrine si l’on veut avancer sur deux jambes et non boiter bas.

Fort de cette réflexion, je vous invite à vous interroger sereinement et en toute conscience, puis à vous comporter en accord avec le résultat de votre propre réflexion.

Guilhem de Carcassonne.

Définir le Catharisme d’aujourd’hui

2-3-Le catharisme au quotidien
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Définir le catharisme d’aujourd’hui

Qu’est-ce que le catharisme ?

Cette question peut en surprendre plus d’un, émanant d’une personne qui mène des recherches approfondies sur le sujet depuis douze ans et qui vit depuis deux ans et demi comme un novice cathare.
Pourtant elle n’est pas anodine.

En effet, si le catharisme médiéval nous est de mieux en mieux connu, si sa structuration était indubitablement celle d’une Église au sens commun du terme, si ses pratiquants — les Bons-Chrétiens — étaient organisés comme n’importe quelle confrérie religieuse et étaient considérés comme tels par leurs croyants, sans parler de leurs opposants catholiques de l’époque, peut-on extrapoler aujourd’hui cette organisation pour dire que les mêmes appellations et considérations s’appliquent encore à lui ?

Comme je vais essayer de l’étudier devant vous, nous allons voir que le catharisme aujourd’hui se reflète de façon extrêmement variée dans les yeux de ceux qui l’observent avec le filtre de la considération du phénomène religieux qui a cours au 21e siècle.

Quelques définitions

Impossible de raisonner conjointement sans poser d’abord les bases sémantiques qui s’imposent.

Le premier terme à bien définir est celui de religion. Une religion est une approche spirituelle qui réunit les individus qui la reconnaissent et la pratiquent. Ce terme tire son nom du latin religo, qui signifie attacher, lier et religio, qui signifie avoir du scrupule. Il s’agit donc d’une pratique scrupuleuse qui relie, attache, des gens qui la partagent. Il faut donc, pour qu’il y ait religion, que l’on puisse définir un lien entre ceux qui ont une pratique faisant état de la même observance scrupuleuse d’une spiritualité.

La spiritualité est donc à différencier de la religion. Là où la religion exige plusieurs personnes réunies, la spiritualité est individuelle. La spiritualité est une aspiration religieuse qui amène à considérer des éléments intellectuels et pratiques comme justifiés, voire nécessaires, à la manifestation de la foi ressentie.

La foi est, comme l’indique sa source latine fides, la confiance que l’on place en une conception intellectuelle relative à une entité transcendante que l’on place au-dessus de toute chose.
Quand cette foi, qui a donné lieu à une approche spirituelle, aboutit à rassembler des personnes au sein d’une religion, comment peut-on nommer ce rassemblement ?

On constate qu’il existe plusieurs termes pour cela. Est-ce pure conjecture ou bien y a-t-il moyen de déterminer un usage précis à chacun de ces termes ?

La communauté religieuse est un terme employé pour désigner des personnes attachées à la même religion quelle qu’en soit la position et la pratique. C’est un terme vague qui va donner lieu à des précisions.

La communauté spirituelle ou ecclésia est un ensemble regroupant des personnes qui partagent la même foi. Il s’agit essentiellement des croyants, mais le catharisme introduit une nuance dans ce terme. Alors que les autres religions se contentent de demander à un croyant d’affirmer sa foi, dans le catharisme le croyant a reçu l’éveil, c’est-à-dire qu’un événement spirituel s’est produit en lui — une révélation — qui l’a convaincu que cette foi était la seule possible pour lui. Donc, par extension, on admet généralement dans la communauté spirituelle des sympathisants avancés, qui ne partagent aucune autre foi, mais qui n’ont pas encore reçu l’éveil, même si l’on peut facilement imaginer qu’ils le recevront bientôt pour peu que leur engagement intellectuel et spirituel soit sincère.

La communauté évangélique se distingue par le fait que ses membres vivent de la manière évangélique que pratiquaient les cathares du Moyen Âge, c’est-à-dire regroupés en maison cathare.

Si le terme Église tire son nom du latin ecclésia que nous avons vu plus haut, il est doté de deux acceptions un peu différentes. Certes, il s’agit bien d’une communauté spirituelle pratiquant la même conception religieuse, mais il s’agit aussi d’un statut juridique et administratif particulier. Ne la confondons pas avec le bâtiment catholique qui sert de lieu de culte : l’église.

L’Église à notre époque

La France a une particularité unique à la date d’aujourd’hui, d’avoir organisé en son sein la séparation de l’Église et de l’État, créant de ce fait une notion particulière que l’on appelle la laïcité. Cette séparation s’est faite dans la violence et a provoqué un profond clivage au sein de la population qui se manifeste encore de nos jours par des positions extrémistes des deux bords. En effet, selon les périodes, certains religieux tentent d’imposer leurs vues afin d’infléchir la conception de laïcité à leur avantage et à d’autres, ce sont les athées qui font de même.
Les modérés, désireux de voir respectés les choix des uns et des autres sont souvent pris en otages dans ces luttes. J’ai déjà étudié la laïcité dans deux autres textes, aussi je n’y reviendrai pas ici.

Dans le cadre de la loi de séparation de l’Église et de l’État, dite loi de 1905, est proposé un statut spécifique pour les associations dont l’objectif est une pratique religieuse exclusive. Contrairement aux associations déclarées, qui relève de la loi de 1901, l’association cultuelle a, comme son nom l’indique, comme seul objet d’organiser des cultes. Cependant, la loi prévoit que ce qui s’avère nécessaire à l’organisation des cultes soit prévu et couvert par cette loi, c’est-à-dire la prise en charge des officiants (ministres du culte), de leur formation et des locaux les accueillant et de ceux où se déroulent les cultes. Dans ce cadre très restrictif, la loi accorde des avantages non négligeables à ces associations, comme le droit de recevoir des dons notariés et des legs et l’exonération de taxe foncière pour les bâtiments cités ci-dessus. En contrepartie, ces associations sont soumises à des obligations. Prouver qu’elles sont représentatives de la communauté sociale où elles exercent et faire preuve d’une totale transparence financière. La représentativité minimale est imposé par un quota de membres déclarés et nommément désignés en fonction du nombre d’habitants de la zone géographique considérée. La transparence financière exige de faire vérifier et de publier les comptes.

Mais quand on parle d’Église de façon plus générale, c’est la structure de la communauté ecclésiale qui est désignée, avec comme référence celle du culte catholique. Or, cette institution a pris, au cours des siècles, des positions religieuses et politiques qui ont fortement altéré son image chez beaucoup. De ce fait, ce terme tend à provoquer un rejet quasi systématique, mais il faut surmonter cela car il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier. En effet, si vous perdez un proche dans un accident de voiture, vous ne considérerez pas systématiquement la voiture comme un instrument mortifère. Par contre, vous serez plus prudent quant à son usage et à ceux à qui vous vous confiez quand ils vous proposeront de vous emmener.

Que dire du catharisme aujourd’hui ?

Bien des gens se sont intéressés au catharisme au cours des siècles et s’y intéressent encore aujourd’hui sans pour autant avoir la même vision de ce qu’il est.
Ainsi certains n’y voient qu’un corps mort que l’on dissèque à l’envi, mais dont la forme d’apparition médiévale ne saurait laisser imaginer une quelconque résurgence moderne. Et encore je ne parle pas ici de ceux qui essaient de prétendre à sa non-existence !
Il en est qui n’y voient qu’une sorte de philosophie non violente, n’en retenant que les principes spirituels sans tenir compte de la pratique rituelle et sacramentelle.
D’autres considèrent que cette religion n’est plus adaptée aux hommes de notre époque et que l’on doit s’en tenir à une pratique spirituelle intellectuelle et individuelle.
En fait, bien peu nombreux sont ceux qui pensent que le catharisme a toujours sa place dans notre société ; mais il y en a !

Les historiens qui s’abstiennent volontairement et vigoureusement de chercher à comprendre les racines et l’origine du catharisme, ne peuvent d’évidence l’imaginer se remettre en ordre de marche aujourd’hui. Comme le chimpanzé voyant son reflet dans un miroir va considérer qu’il est en face d’un congénère, faute d’avoir la maturité intellectuelle suffisante pour comprendre ce qu’il voit, ils sont partiellement aveuglés par les limites qu’ils s’imposent au nom d’une prétendue objectivité qui n’existe que dans leur conception autocentrée de leur exercice professionnel.

Nombreux sont ceux qui ne retiennent du catharisme que quelques principes à intégrer, éventuellement, dans une morale personnelle ou à utiliser comme étendard d’un monde plus tolérant et respectueux de tous. Je comprends cela, mais je ne peux m’empêcher de leur rappeler que cette vision minimaliste est à des années-lumière du catharisme médiéval. De là à penser que cette approche signe une profonde méconnaissance du catharisme, il n’y a qu’un pas que je franchis aisément.

La troisième catégorie fait florès. De grands noms en ont fait partie, comme Déodat Roche ou Yves Maris par exemple. Est-ce pour autant le signe que cette approche est la bonne ? Je ne le crois pas.

En effet, si les cathares avaient raison — et c’est le point de vue de ceux qui partagent leur foi —, comment imaginer que leur religion serait adaptée à une forme d’incarnation des esprits saints prisonniers et ne serait pas à une autre ? Soit le catharisme s’adresse à notre être profond, soit il n’a pas de raison d’être. Méconnaître la portée universelle que la doctrine cathare apporte à cette part d’éternité souffrante que nous représentons aujourd’hui, comme l’étaient celles et ceux qui l’ont porté au Moyen Âge, serait incohérent. Ou bien le catharisme est valable tant qu’il restera un esprit saint prisonnier ici-bas, ou bien il ne s’est jamais justifié. Personnellement, je mets cette conception d’une approche purement intellectuelle sur le compte d’un manque d’approfondissement global. À force de regarder le catharisme avec une loupe, on peut en venir à perdre de vue ce qu’il est globalement et profondément.

Et c’est pourquoi j’appartiens résolument à la dernière catégorie ; celle qui pense que le catharisme n’est ni archaïque ni désuet à notre époque. En effet, comparé à l’époque médiévale, peut-on dire que notre siècle n’a plus besoin de Bienveillance, d’égalité, de considération et de spiritualité ? Franchement, à part la sophistication mise dans les moyens de faire souffrir et de tuer l’autre, je ne vois aucune différence entre ces deux périodes.
Non seulement le catharisme nous apporte une compréhension claire et logique de notre monde en notre siècle, mais il nous propose également les moyens de l’analyser et ceux nécessaires pour nous positionner individuellement et collectivement par rapport à lui.

Donc, ne voir le catharisme que par des filtres qui en opacifieraient certains aspects, me semble être une erreur. Certes, le catharisme est une spiritualité qui nous éveille individuellement, mais pas que. Certes, il est aussi une pratique morale et sociale, mais pas que. Certes, il est aussi un moyen de rassembler des porteurs d’une foi identique, mais pas que. Il est tout cela et bien plus encore ; il est l’outil nécessaire pour emprunter et suivre le chemin enseigné par Christ et ainsi atteindre l’objectif de tout croyant : faire sa bonne fin !

Éric Delmas, 20 décembre 2018.

Les racines du catharisme

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Les racines du Catharisme

Quelques définitions

Comme il convient dans toute discussion, nous devons commencer par nous mettre d’accord sur quelques référentiels qui nous permettront de nous comprendre mutuellement. Vu que je suis le narrateur, vous allez devoir accepter mes référentiels, faute de pouvoir me proposer les vôtres.

La spiritualité

Ainsi que nous le dit le dictionnaire, la spiritualité désigne ce qui relève de l’esprit par opposition au corps. Je complèterais cette définition basique en ajoutant que la spiritualité est ce qui parle à notre esprit et nous conduit à émettre des opinions relatives à notre compréhension de ce qui n’est pas appréhendable avec nos cinq sens.

La question que je pose est de savoir quand la spiritualité s’est-elle manifestée chez l’homme d’une manière suffisamment significative pour être repérable ?
Il est une réalité intangible dans l’évolution de notre espèce, qui est que ses progrès ont toujours une finalité pratique, permettant d’augmenter la sécurité vitale de cet animal fragile et de lui faciliter la vie, en libérant des moyens et du temps.
Pourtant il existe une exception à cette règle à ma connaissance. En effet, il y a très longtemps, la branche homo, qui vivait désormais son évolution seule, a connu de nombreux succès techniques lui rendant la vie plus facile : taille de silex, feu, etc.
Sa vie s’organisait en petits groupes, que l’on appelle nucléaires car fonctionnant autour d’un point central constitué du mâle dominant. Quand l’un des membres du groupe décédait, il était jeté au fond d’une grotte, parfois dans un trou qui servait souvent de décharge et, plus rarement, était partiellement dévoré.
Si les dates sont encore incertaines, Homo néanderthalensis et Homo sapiens auraient inhumé leurs morts depuis 400 000 à 300 000 ans, mais les premières tombes avérées pour cet usage sont datées de 100 000 ans et appartiennent à ce dernier groupe.

Que nous apprennent ces pratiques ? Cette évolution est-elle positive et profitable ? Si non, pourquoi les hommes ont-ils néanmoins choisi d’en faire la norme ?
Le fait d’ensevelir ses morts, et plus encore de les décorer ou de doter les tombes d’objets divers, signe une compétence intellectuelle nouvelle : l’acceptation de l’idée d’un devenir au-delà de la mort. Certes, d’aucuns objecteront que cette idée est un moyen de lutte contre la peur de la finitude et le désir de dépasser son propre destin. Mais, comparé au règne animal, il semble bien que l’homme soit le seul à avoir acquis cette compétence à vouloir se projeter au-delà de sa propre mort.
Une fois ce pas franchi, il restait à l’homme à peupler cet au-delà. C’est encore la spiritualité qui va lui donner la capacité d’imaginer des possibles invérifiables. Et c’est à partir de là, comme le montre bien René Girard[1], qu’il va utiliser ces compétences pour gérer les problèmes de conflits mimétiques générés par les regroupement de cellules nucléaires en groupes plus importants, indispensables pour assurer une plus grande sécurité et une meilleure efficacité de la chasse.

La religion

Comme l’explique très bien René Girard, les obligations de gestion des conflits mimétiques ont amené les premiers hommes à construire un modèle spirituel précis faisant appel à la notion de transcendance. En effet, face à des mâles dominants en conflit — maintenant qu’ils devaient vivre dans le même territoire —, il n’y avait que deux solutions : laisser le conflit dégénérer pour se retrouver avec un seul mâle dominant — ce qui revenait à recréer la situation dont on avait cherché à sortir —, ou forcer ces mâles dominants à se soumettre à plus fort qu’eux. La transcendance est donc le concept selon lequel, grâce à la spiritualité, un individu servant d’intermédiaire (le chamane), pouvait expliquer qu’il existait une force supérieure susceptible de faire du bien ou du mal en fonction des comportements des hommes, y compris ceux qui étaient au sommet de l’échelle sociale.
Pour conforter ce rapport de force, la transcendance énonçait des règles de vie commune à ne pas transgresser, comportant des interdits — les tabous — et des obligations — les rites — basés sur une loi positive qui sera formalisée. Ce système visant à relier tous les hommes par les mêmes liens spirituels s’appelle la religion.

Religion positive ou spirituelle ?

Jusqu’ici, on pourrait croire que je soutiens l’idée des athées selon laquelle les religions sont des inventions humaines et n’ont par conséquent aucun fondement spirituel. C’est vrai et… c’est faux !
En effet, si comme le décrit Girard, les religions positives — c’est-à-dire disposant d’un système normatif structuré par une loi —, sont clairement des inventions humaines, il convient de s’interroger sur les religions que je qualifierai de spirituelles qui n’ont pas de loi aussi normative.
Autre façon de procéder, on pourrait différencier les religions mondaines des religions spirituelles en faisant remarquer que les premières se donnent pour objet de permettre un fonctionnement harmonieux des sociétés dans lesquelles elles se trouvent, alors que les religions spirituelles ne parle qu’à l’individu au risque de le mettre en mauvaise posture dans la société.
En effet, les religions positives sont utiles à la vie dans ce monde dont elles acceptent souvent les règles de fonctionnement, y compris les plus sévères et les plus injustes, qu’elles tentent de justifier de façon plus ou moins élégante. Ainsi, le riche et le puissant sont justifiés par l’onction du Dieu de référence et le pauvre se voit annoncer que dans l’autre vie il deviendra à son tour riche et puissant, pourvu qu’il accepte son sort actuel sans broncher.

La religion spirituelle s’adresse à l’individu en lui faisant entrevoir son particularisme. En groupe il fonctionne comme un rouage d’une machine bien huilée, mais dès qu’il s’arrête sur son moi profond, il tend à devenir anarchiste et à gripper la machine. Si cette conception spirituelle s’accorde avec d’autres individus, elle devient une religion sans imposer à ses membres les obligations de la religion positive. Mais la spiritualité peut très bien fonctionner individuellement et l’on constate également qu’il peut y avoir des branches spirituelles à des religions dont l’approche positive s’est imposé ; c’est le cas du Christianisme qui dispose de branches positives comme le Catholicisme et l’Orthodoxie, mais également d’une branche spirituelle : le Catharisme.
En fait, la spiritualité, qui fut sans doute la première forme, s’est ensuite fondue dans la religion positive avant de s’en séparer secondairement.

Qu’est-ce que le Christianisme ?

Contrairement à ce que voudraient nous faire croire les tenants de certains branches positives, le Christianisme est le regroupement d’hommes autour de l’idée spirituelle que Dieu a envoyé aux hommes un messager, le Christ, chargé de leur faire comprendre comment ils devaient se comporter dans l’espoir du salut. Je dis bien le Christ et non Jésus. En effet, si c’était jésus la référence, cette religion se serait sans doute appelée le « Jésuisme », ou quelque chose d’approchant.

L’origine du mot Chrétien est incertaine. Les Actes des apôtres la situe à Antioche au premier siècle. Walter Bauer[2] le repère à Édesse dans la première moitié du deuxième. Il note qu’en fait, sont appelés Chrétiens — issu de Khristos, c’est-à-dire l’équivalent de l’hébreu « messie » (oint du Seigneur) —, les premiers à s’installer dans un lieu et à diffuser cette religion. C’est ainsi qu’à Édesse, et probablement à Antioche ce furent des marcionites qui héritèrent de cette appellation moqueuse, imposée par les païens, au milieu du deuxième siècle.

Au départ, la tradition orale chrétienne s’organise autour de ce qui fait l’originalité de cette religion, à savoir la passion et la résurrection de Christ. Le reste sera l’occasion de débats qui seront ensuite fixés par écrit, donnant lieu à une profusion de documents souvent contradictoires. Du tri de ces documents émergera au IIIe siècle, le Nouveau Testament.

Le problème du Christianisme est qu’il n’était pas du tout adapté à une diffusion mondaine. En effet, son leader supposé n’était pas un roi, n’avait aucune richesse et aucun pouvoir. Il serait mort de façon ignominieuse et n’aurait rien fait qui ait laissé des traces visibles dans l’histoire de l’humanité. Pour un usage purement spirituel ce n’est pas un problème, mais pour constituer un groupe religieux indépendant, dans un monde violent où la concurrence est rude, cela nécessitait quelques adaptations.
C’est pour cela que les Chrétiens, qui voulaient exister dans le monde, ont cherché à rattacher le Christianisme au Judaïsme, créant de fait le Judéo-christianisme qui parvint à s’attirer les grâces de l’empereur Constantin 1er, persuadé de pouvoir contrôler cette religion à son avantage, avant de devenir religion officielle sous l’empereur Théodose 1er qui lui donna même le droit de justice religieuse. Ce Christianisme, qui se fit appeler catholique (c’est-à-dire universel), ne se priva pas d’en user dès la fin du IVe siècle.

Pourtant, ce n’est pas le Catholicisme qui fut le plus répandu initialement. Au premier siècle, ce courant de pensée sans nom précis se diffusa grâce à un apôtre extrêmement efficace, Paul de Tarse, unanimement renié par les Catholiques jusqu’au IIIe siècle. L’efficacité de sa prédication et surtout les nombreux documents qu’il diffusa avant 62 — ce qui en fait les premiers écrits chrétiens de l’Histoire —, lui valurent de nombreux succès et une diffusion totale dans le monde connu d’alors (c’est-à-dire autour de la Méditerranée). Un homme nommé Marcion de Sinope, prit son relais bien après sa mort et diffusa si bien sa pensée que de l’avis même des Catholiques du IIe siècle, son Église était répandue dans les mêmes proportions que celle de Paul.

Difficile donc de définir de façon univoque le Christianisme. Si la religion positive, taillée sur mesure pour se rapprocher du pouvoir, s’est finalement imposée, la religion plus spirituelle de Paul et de Marcion a perdurée de façon visible pendant quatre siècles, avant d’entrer en semi-clandestinité ensuite.

Le Christianisme spirituel

Comme je viens de l’expliquer, la foi en Christ s’est répandue dès le tout début, mais elle n’est devenue visiblement diverse qu’à partir de l’épisode de la mort du diacre Étienne. En effet, à partir de ce moment, ceux qui pensaient à juste titre que les propos d’Étienne, comparables à ceux prêtés à Jésus dans l’Évangile selon Jean[3], étaient de nature à mettre leur vie en danger, firent le choix de l’exil. Et cet exil fut parfois plus lointain que ce qu’en disent les Actes. En effet, c’est à Damas de Syrie que Paul ira pourchasser ces dissidents. Dissidents qui l’accueillirent ensuite et le baptisèrent par imposition des mains, signe distinctif du baptême d’eau cher aux Judéo-chrétiens. Cette rupture fut officialisée en 39, après la dispute d’Antioche entre Paul et Pierre, forçant les tenants du Judéo-christianisme à réunir un concile à Jérusalem qui décréta la séparation entre les groupes opposés. Ce premier schisme d’une Église encore embryonnaire allait décider du destin du courant chrétien catholique et du courant chrétien paulinien.
Ce dernier, loin des volontés de pouvoir du premier, mit en avant la démarche spirituelle, ce qui est clairement exprimé dans les écrits de Paul, même s’il faut décortiquer les Épitres du Nouveau Testament, tant les scribes judéo-chrétiens les ont traficotées quand il fut décider de réintégrer Paul dans le giron catholique, faute de pouvoir effacer son influence.
Comme je l’explique en détail dans mon livre[4], ce courant perdura à travers des groupes précis, intégrés de force par le pouvoir catholique dans une appellation fourre-tout : les gnostiques, jusqu’à arriver à Marcion de Sinope, qui au milieu de IIe siècle se fit exclure de l’Église de Rome en raison de ses propositions trop pauliniennes. Il fonda alors une Église chrétienne, conforme à ses idées spirituelles, qui prit le nom de marcioniste en hommage à son œuvre. Plusieurs siècle plus tard, un nouveau courant paulinien, vraisemblablement initié par un marcionite en errance en Asie Mineure, se mit en place à proximité de Samosate et prit le nom de Paulicianisme. Ses dirigeants religieux se firent tous baptiser d’un nom de disciples de Paul de Tarse et une longue lutte les opposa plusieurs siècles durant à l’Église catholique de Constantinople et au pouvoir militaire des empereurs d’orient, jusqu’à leur dernière défaite, survenue au IXe siècle dans l’ancienne Arménie, dans la ville de Téphriké.
Pour partie, exilés à la frontière nord de l’empire, à Philippopolis (actuelle Plovdiv), ils évangélisèrent des populations slaves et bulgares peu réceptives au Catholicisme d’un empereur contre lequel ils luttaient. C’est vraisemblablement ainsi qu’apparu une nouvelle Église pratiquant ce Christianisme spirituel : les Bogomiles. Lors de la première croisade, l’empereur Alexis Comnène offrit des troupes aux armées croisées venues récupérer les territoires que les musulmans lui avaient pris et qu’il espérait récupérer ainsi. Dans ces troupes se trouvaient bon nombre de Pauliciens, enrôlés de force en raison de leurs qualités guerrières, auxquelles plusieurs empereurs s’étaient frottés avec des fortunes diverses. L’armée de Raimond IV de Saint-Gilles, comte de Toulouse rentra précipitamment après sa mort en terre sainte. L’hypothèse d’un retour de Pauliciens dans ses rang est plausible et permettrait d’expliquer la diffusion de cette foi dans le Languedoc à la même période où elle apparut — diffusée par les Bogomiles —, en Rhénanie et dans les Flandres.

Voilà un rapide tour historique que je vous propose afin de mieux connaître le Catharisme qui n’est pas apparu spontanément au Xe siècle en Bulgarie comme le répètent à l’envi les historiens. D’ailleurs, il faut noter dans les sources la mention d’un pèlerinage bogomile effectué au XIe siècle de la Bulgarie vers Téphriké, ce qui représente environ 1 500 km, distance que ne peut justifier que le sentiment d’appartenance forte des Bogomiles à une racine paulicienne.

 


[1] Des choses cachées depuis la fondation du monde – René Girard (recherches avec Jean-Michel Oughourlian et Guy Lefort) – Éditions Grasset & Fasquelle 1978
[2] Orthodoxie et hérésie aux débuts du christianisme – Walter Bauer. Éditions J. B. Mohr, Tübingen (1934), édition français, le Cerf (2009).
[3] Évangile selon Jean (chap. 8, 44) : « Vous avez pour père le diable et vous voulez ce que désire votre père. » Cette diatribe est adressée par Jésus aux Pharisiens demeurés après l’épisode de la femme adultère. Il est clair que c’est un blasphème qui va d’ailleurs pousser ces derniers à tenter de le lapider (v. 59).
[4] Catharisme d’aujourd’hui – Éric Delmas, éditions Catharisme d’aujourd’hui (2015).

Première lettre de Paul aux Corinthiens – 6

4-2-Bible
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Ce texte est tiré du Nouveau Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction de Jean Grosjean, textes traduits, présentés et annotés par Jean Grosjean et Michel Léturmy avec la collaboration de Paul Gros.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.

Lettre aux Corinthiens

Chapitre 6

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Libres hérétiques !

2-4-Le monde vu par le catharisme
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Libres hérétiques !

Introduction

Ce titre a quelque chose du pléonasme. En effet, l’hérétique est celui qui prend la liberté de ne pas suivre la voie bétonnée de la dogmatique imposée par les religions dominantes. Son choix est ailleurs ; dans la recherche d’une voie singulière, tracée à l’aide de connaissances ou d’intuitions qui ne peuvent qu’étonner et parfois même révolter ceux qui se croyaient sur la seule route possible et qui, en découvrant ces choix différents, sentent quelque peu les contraintes qu’ils ignoraient jusque là d’une voie dogmatique souvent déficiente, comme le chien de la fable sent tout à coup son collier face à la liberté du loup1.

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