Décalogue

Les chemins vers Dieu

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Les chemins vers Dieu

La lecture du Pentateuque, équivalent de la Torah juive, nous indique les règles à suivre pour être un bon juif aux yeux de Iahvé. De même, le chapitre 5 de l’Évangile selon Matthieu propose un sermon, dit sur la montagne, qui trace le comportement que doit avoir celui qui souhaite cheminer vers son salut.
La mise en exergue de ces deux textes devrait nous aider à confirmer ce qui vient du monde et ce qui vient du spirituel.

Le décalogue

Voici le texte issu du chapitre 20 de l’Exode :
« Élohim dit toutes ces paroles en ces termes :
« Je suis Iahvé, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison des esclaves :

  • Tu n’auras pas d’autres dieux en face de moi.
  • Tu ne te feras pas d’idole, ni aucune image de ce qui est dans les cieux en haut, ou de ce qui est sur la terre en bas, ou de ce qui est dans les eaux sous la terre.
  • Tu ne te prosterneras pas devant eux et tu ne les serviras pas. Car moi, Iahvé, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, punissant la faute des pères sur les fils, sur la troisième et sur la quatrième génération, pour ceux qui me haïssent, et faisant grâce jusqu’à la millième pour ceux qui m’aiment et observent mes commandements.
  • Tu ne prononceras pas en vain le nom de Iahvé, ton Dieu, car Iahvé n’innocente pas celui qui prononce son nom en vain.
  • Souviens-toi du jour du Sabbat pour le sanctifier : six jours tu travailleras et tu feras toute ta besogne, mais le septième jour est le Sabbat pour Iahvé, ton Dieu ; tu ne feras aucune besogne, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bétail, ni ton hôte qui est dans tes portes, car en six jours Iahvé a fait les cieux et la terre et la mer, et tout ce qui est en eux, mais il s’est reposé au septième jour. C’est pourquoi Iahvé a béni le jour du Sabbat et l’a sanctifié.
  • Honore ton père et ta mère, afin que se prolongent tes jours sur le sol que te donne Iahvé, ton Dieu.
  • Tu ne tueras pas.
  • Tu ne commettras pas d’adultère.
  • Tu ne voleras pas.
  • Tu ne déposeras pas de faux témoignage contre ton prochain.
  • Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain.
Tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne, ni tout ce qui est à ton prochain.»

Essayons de la résumer un peu, afin d’y retrouver les dix commandements :

  1. Tu n’auras pas d’autre dieux que moi ;
  2. Tu ne feras pas d’idole ou d’image de quoi que ce soit et tu ne les adoreras pas ;
  3. Tu ne prononceras pas le nom de Iahvé en vain ;
  4. Tu respecteras le Sabbat ;
  5. Tu travailleras six jours ;
  6. Tu te reposeras le septième ;
  7. Honore ton père et ta mère ;
  8. Tu ne tueras pas ;
  9. Tu ne déposeras pas de faux témoignage contre ton prochain ;
  10. Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain ni rien de ce qui est à lui.

Iahvé impose sa loi d’airain au juif et lui rappelle qu’il est jaloux et peut devenir méchant envers ceux qui ne respectent pas sa loi. Il interdit les conflits avec les prochains, c’est-à-dire ceux qui partagent la même foi, mais nous savons que lui-même ne se fixe pas de limite envers les juifs et qu’il les autorise, voire les incite à la violence envers les autres humains. Nous sommes clairement dans un contexte de loi positive. Le but est d’établir une justice dont le seul étalon est Iahvé lui-même.

On ne peut rejeter ce texte dans sa totalité, notamment pour les quatre derniers éléments.

Ce texte ne cherche pas à mettre en avant la spiritualité ; c’est un contrat qui impose des règles à suivre pour ne pas être sanctionné. En échange les juifs considéraient pouvoir tout attendre de Iahvé.

Cela rend cette loi facile à suivre, même si elle peut sembler difficile à respecter.

Le sermon sur la montagne

« Magnifiques les pauvres par esprit car le règne des cieux est à eux.
Magnifiques les endeuillés car on les consolera.
Magnifiques les doux car ils hériteront de la terre.
Magnifiques les affamés et assoiffés de justice car on les rassasiera.
Magnifiques les miséricordieux car on leur fera miséricorde.
Magnifiques les cœurs purs car ils verront Dieu.
Magnifiques les pacifiques car on les appellera fils de Dieu.
Magnifiques les poursuivis pour cause de justice car le règne des cieux est à eux.
Magnifiques, vous autres quand on vous injuriera et poursuivra, qu’on dira de vous, à tort, toute sorte de mal à cause de moi. »

Dans ce texte les choses sont très différentes. Il n’est plus question de contrat, mais d’état d’être. Encore faut-il bien le comprendre pour en saisir la profondeur, ce qui n’est pas toujours le cas des exégètes qui s’y sont essayés.

Notre approche spirituelle devrait nous aider à y parvenir.

Reprenons chaque élément :
Les pauvres par esprit (et non pas les pauvres d’esprit) sont ceux qui pratiquent l’humilité.
Les endeuillés sont les repentants qui seront alors accessibles à la consolation.
Les doux sont les non-violents qui n’auront personne pour les combattre.
Les affamés et assoiffés de justice sont ceux qui voudront toujours mieux pour tous.
Les miséricordieux sont ceux qui n’auront rien à reprocher à quiconque.
Les cœurs purs sont ceux qui auront su laisser leur esprit se libérer de sa gangue mondaine.
Les pacifiques sont ceux qui auront su éteindre en eux les passions commandées par la sensualité
Les poursuivis pour cause de justice sont ceux qui auront à subir, mais jamais à accuser.
Les injuriés et accusés à tort sont ceux qui suivront la voie de Christ quelles qu’en soient les conséquences.

Ce qui frappe de prime abord à la lecture de ces derniers versets est leur proximité avec la Règle de justice et de vérité qui suivaient et suivent les cathares consolés. Tout y parle de nous et jamais des autres, contrairement à la loi mosaïque. C’est en nous que nous devons régler les problèmes pour être en accord avec notre foi. C’est l’équivalent de la philosophie grecque qui n’était possible que si l’on vivait au quotidien en accord avec ses préceptes.

« Vous êtes le sel de la terre. Si le sel s’affadit, avec quoi le saler ? Il n’est plus bon à rien qu’à être jeté dehors et piétiné par les hommes. »
Là encore l’exhortation porte sur ce que nous devons être du moment où nous avons conscience de notre état spirituel.

« Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut se cacher.
On n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais sur le lampadaire, et elle brille pour tous dans la maison.
Qu’ainsi votre lumière brille devant les hommes pour qu’ils voient vos belles œuvres et glorifient votre père qui est dans les cieux. »
Ce qui nous est rappelé ici est qu’il ne faut pas agir en secret, par volonté élitiste ou par peur, mais au contraire, savoir affirmer ce que l’on est sous peine de ne l’être plus. Pour autant ce n’est pas un appel à la vanité.

« Ne croyez pas que je suis venu défaire la Loi ou les Prophètes ; je ne suis pas venu défaire, mais remplir.
Car je vous le dis, si votre justice n’a rien de plus que celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le règne des cieux. »
Ces deux versets peuvent interroger, mais une lecture précise permet de lever l’apparente ambiguïté.
Le but n’est pas de rejeter la loi mosaïque qui, du point de vue chrétien est accomplie, c’est-à-dire arrivée à son terme comme toute tâche accomplie.
Le but est de lui substituer la Bienveillance qui s’exprime à un niveau bien plus élevé.
Et pour confirmer les choses il est clairement précisé que suivre la loi mosaïque est insuffisant pour être sauvé. On retrouve cela dans l’épisode de l’homme riche venu demander à Jésus comment être un homme de bien, puis de préciser comment devenir un saint. Cela confirme aussi le verset 8, 44 de l’Évangile selon Jean où Iahvé est traité de diable, car sa loi égare les esprits-saints au lieu de les sauver.

« Et moi je vous dis que quiconque se met en colère contre son frère sera passible du jugement… Sois vite arrangeant avec ton adversaire pendant que vous êtes en chemin ensemble, de peur que ton adversaire te livre au juge et le juge, au garde, et que tu sois jeté en prison. »
Ce précepte de l’arrangement amiable, y compris à perte est prégnant dans le catharisme et on en voit un exemple avec Pierre Authié qui met ses affaires en ordre avant de partir en Italie faire son noviciat avec son frère.

« Moi je vous dis que celui qui regarde une femme pour la convoiter est déjà adultère avec elle dans son cœur.
On a dit : Celui qui renvoie sa femme, qu’il lui donne une répudiation. Et moi je vous dis que quiconque renvoie sa femme, sauf cas de prostitution, la rend adultère, et celui qui se marie avec une répudiée est adultère. »
Là encore nous voyons deux points de la doctrine cathare : limiter les contacts avec l’autre sexe, par prudence et par humilité, car la sensualité par laquelle notre âme mondaine nous tient prisonniers ici-bas est très puissante. L’autre point sous-entendu est celui du respect des engagements de couple. On n’abandonne pas l’autre quand cela nous chante, mais uniquement quand les engagements sont accomplis ou quand l’autre nous en détache en toute liberté.

« Je vous dis de ne pas jurer du tout, ni par le ciel, ni par la terre. Ne jure pas non plus par ta tête ; que votre parole soit : oui oui, non non ; le surplus est du mauvais. »
Nous voyons ici pourquoi la règle cathare interdit toute forme de jugement et de serment. Qu’il s’agisse du jugement de l’autre ou de l’affirmation, c’est-à-dire de la vanité qui nous pousse à croire que nous détenons la vérité. Il conseille donc d’affirmer avec parcimonie, sans rien ajouter qui peut invalider notre témoignage. Au total la loi de ce monde, durera autant que durera le monde car les hommes ne peuvent s’en passer, mais cela ne veut pas dire qu’elle est éternelle. Seule la Bienveillance qui vient du seul Dieu sera éternelle. On ne doit donc rien retirer à la loi du monde, mais il faut lui ajouter beaucoup pour le rendre bienveillante.

« Je vous dis de ne pas vous opposer au mauvais.  Mais quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui aussi l’autre ; et celui qui veut te faire juger pour prendre ta tunique, laisse-lui aussi le manteau. Quiconque te requiert pour un mille, fais-en deux avec lui. Donne à qui te demande et, si on veut t’emprunter, ne te détourne pas. »
Contrairement à la loi mosaïque qui prône une réponse adaptée à la violence reçue (la loi du talion), la Bienveillance prône le Bien en réponse au Mal.

« Vous avez entendu qu’on a dit : Tu aimeras ton proche et détesteras ton ennemi. Et moi je vous dis : Aimez vos ennemis, priez pour ceux qui vous poursuivent. »
Enfin vient le dernier point de l’enseignement. La Bienveillance n’est pas une monnaie ou un objet d’échange ; c’est un don gratuit qui ne se fixe aucune borne. Le Dieu des Juifs n’est donc pas parfait puisqu’il pousse l’homme à préférer son proche à son ennemi. S’il n’est pas parfait il n’est pas Dieu. Ce n’est donc pas lui que nous devons suivre, mais celui que Christ nous donne à connaître et à imiter.

J’espère vous avoir montré combien il est inadapté de lier l’Ancien et le Nouveau Testament, car ce qu’ils contiennent ne parle pas de la même entité spirituelle : Celle de la loi mosaïque qui n’est que le diable se faisant passer pour Dieu et le principe du Bien qui est le seul vrai Dieu qui ne prône que la Bienveillance absolue envers la part de son émanation momentanément tombée sous le pouvoir du Mal.

Publié le 23 février 2025 par Guilhem de Carcassonne

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