Ce texte est tiré du Nouveau Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction de Jean Grosjean, textes traduits, présentés et annotés par Jean Grosjean et Michel Léturmy avec la collaboration de Paul Gros.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.
Lettre de Jacques
Chapitre 4
1 – D’où viennent les guerres, les batailles parmi vous ? n’est-ce pas précisément de vos voluptés qui font campagne dans vos membres ?
2 – Vous convoitez et vous n’avez pas, alors vous tuez. Vous jalousez et vous ne pouvez obtenir, alors vous bataillez, vous guerroyez. Mais vous n’avez pas parce que vous ne demandez pas.
3 – Mais vous demandez et vous ne recevez pas parce que vous demandez mal et afin de dépenser pour vos voluptés.
4 – Adultères, ne savez-vous pas qu’aimer le monde c’est haïr Dieu ? Qui veut être ami du monde se fait ennemi de Dieu.
5 – Pensez-vous que l’écriture parle en vain ? L’Esprit qui habite en nous désire-t-il avec envie ?
6 – Non, la grâce qu’il donne est meilleure, c’est pourquoi il dit : Dieu s’oppose aux outrecuidants, mais il donne sa grâce aux humbles.
7 – Soumettez-vous donc à Dieu. Opposez-vous au diable et il vous fuira.
Mon analyse :
Jean dénonce le désir des hommes envers les biens de ce monde, au détriment de la soumission à Dieu. Il rappelle que Dieu peut tout accorder si la demande lui est faite avec humilité et dans un but de rapprochement et non dans un but de jouissance. Les relents de la Torah, des prophètes et des Psaumes, sont présents dans cette demande de soumission et face à ce Dieu présenté comme potentiellement brutal. Le début du verset 4 (Adultères) est parfois traduit au féminin car l’adjectif grec n’existe que dans ce genre. Il est clair qu’ici c’est essentiellement à des hommes que Jean s’adresse.
8 – Approchez-vous de Dieu et il s’approchera de vous. Nettoyez vos mains, pécheurs ; purifiez vos cœurs, gens irrésolus.
9 – Soyez malheureux, soyez en deuil et pleurez. Que votre rire se tourne en deuil et votre joie en atterrement.
10 – Humiliez-vous devant le Seigneur et il vous relèvera.
11 – Frères, ne vous calomniez pas entre vous. Qui calomnie son frère ou juge son frère, calomnie la loi et juge la loi. Et si tu juges la loi, tu ne pratiques pas la loi, tu es juge.
12 – Or il n y a qu’un législateur et juge, celui qui peut sauver ou perdre. Mais toi, qui es-tu pour juger ton proche ?
Mon analyse :
Là encore le côté Juif orthodoxe apparaît. Jacques se réfère à la loi mosaïque qui peut sauver ou perdre et au Dieu législateur et juge. Jésus ne parle que de la loi d’Amour et du Dieu miséricordieux sauveur de toutes ses brebis.
13 – À vous maintenant qui dites : Aujourd’hui ou demain nous irons à telle ville, nous y passerons l’année à commercer et à gagner ;
14 – vous qui ne savez pas quelle sera, demain, votre vie, car vous n’êtes qu’une vapeur qui apparaît un moment puis disparaît ;
15 – au lieu de dire : Si le Seigneur le veut, nous vivrons et ferons ceci ou cela.
16 – Mais maintenant vous vous vantez de vos forfanteries. Toute vantardise pareille est mauvaise.
17 – Et c’est pécher que de ne pas faire le bien qu’on sait
faire.
Mon analyse :
On retrouve ici des points que les cathares mettaient en avant. L’humilité conduit à la modestie qui interdit donc de parler avec l’assurance de celui qui croit détenir son destin. C’est pourquoi il convient de ne pas être affirmatif concernant l’avenir et de s’exprimer avec prudence sur ce que l’on pourrait considérer comme certain. Ils employaient souvent les périphrases : « Si Dieu le veut », « À ce que je crois savoir », etc.
Ils étaient également attentifs à la nécessité de ne pas faire le mal mais aussi à ne pas laisser passer une occasion de faire le bien quand cela était possible. C’est notamment pour cela qu’ils ont pris des risques inouïs qui leur ont coûté très cher, pour demeurer à proximité des croyants, afin de toujours pouvoir répondre à une demande de prêche ou de sacrement.