Ce texte est tiré du Nouveau Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction de Jean Grosjean, textes traduits, présentés et annotés par Jean Grosjean et Michel Léturmy avec la collaboration de Paul Gros.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.
ÉVANGILE SELON MATTHIEU
Chapitre treize
1 – Ce jour-là Jésus sortit de la maison et s’assit au bord de la mer.
2 – Et de grosses foules se rassemblèrent auprès de lui, de sorte qu’il entra s’asseoir dans un bateau, et toute la foule se tenait sur la plage.
3 – Et il leur parla de beaucoup de choses, en paraboles ; il disait : Voilà que le semeur est sorti semer.
4 – De ses semences, les unes sont tombées le long du chemin, et les oiseaux sont venus et les ont dévorées,
5 – D’autres sont tombées parmi la rocaille, où elles n’avaient pas beaucoup de terre, elles ont levé aussitôt, faute d’avoir épais de terre,
6 – mais au lever du soleil elles ont été brûlées et, n’ayant pas de racines, elles ont séché.
7 – D’autres sont tombées parmi les épines ; et les épines ont monté et les ont étouffées.
8 – D’autres sont tombées dans la bonne terre et ont donné du fruit, celle-ci cent, celle-là soixante, celle-là, trente.
9 – Entende qui a des oreilles !
10 – Les disciples s’approchèrent et lui dirent : Pourquoi leur parles-tu en paraboles ?
11 – II répondit : Parce qu’à vous il a été donné de connaître les mystères du règne des cieux, tandis qu’à eux ce n’est pas donné.
12 – Car on donnera à celui qui a et il aura en plus, mais celui qui n’a pas, on lui enlèvera même ce qu’il a.
13 – Voilà pourquoi je leur parle en paraboles, parce qu’ils regardent sans regarder et entendent sans entendre ni comprendre.
14 – En eux est remplie cette prophétie d’Isaïe qui dit : Vous entendrez ce que vous entendrez, mais vous ne comprendrez pas, vous regarderez ce que vous regarderez, mais vous ne verrez pas.
15 – Car le cœur de ce peuple s’est encrassé, ils se sont fait durs d’oreille et se sont bouché les yeux de peur de voir de leurs yeux, d’entendre de leurs oreilles, de comprendre avec leur cœur et de se retourner et que je les guérisse.
16 – Mais magnifiques vos yeux, ils regardent, et vos oreilles, elles entendent !
Mon analyse :
La parabole explique bien les choses mais elle se limite à la présentation exotérique. Pour la comprendre chacun a besoin d’une correspondance, comme celle que Jésus va proposer aux disciples à partir du verset 18. Mais Jésus sait qu’il ne vont pas comprendre, même avec cette explication. C’est pourquoi il les prévient que s’ils ne comprennent pas, ils sont comme le peuple qui s’est fermé à la connaissance et à la foi. Depuis qu’ils le suivent, ils sont censés avoir progressé, donc ils doivent comprendre.
17 – Oui je vous le dis, beaucoup de prophètes et de justes ont désiré voir ce que vous regardez et ne l’ont pas vu, entendre ce que vous entendez et ne l’ont pas entendu.
18 – Vous, donc, entendez la parabole du semeur.
19 – Chaque fois que quelqu’un entend la parole du Règne sans la comprendre, le mauvais vient et s’empare de ce qui a été semé dans son cœur, c’est-à-dire le long du chemin.
20 – Ce qui a été semé parmi la rocaille, c’est celui qui entend la parole et la reçoit aussitôt avec joie,
21 – mais il n’a pas de racine en lui, il est inconstant, arrive une affliction ou une persécution à cause de cette parole, aussitôt il est scandalisé.
22 – Ce qui a été semé parmi les épines, c’est celui qui entend la parole, mais le tracas de l’âge et le leurre de la richesse étouffent la parole, et elle devient stérile.
23 – Ce qui a été semé sur la bonne terre, c’est celui qui entend a parole et la comprend ; aussi porte-t-il du fruit : l’un produit cent, l’autre soixante, un autre trente.
24 – II leur proposa une autre parabole : Le règne des cieux est pareil à un homme qui a semé de la bonne semence dans son champ.
25 – Mais pendant que les gens dormaient son ennemi est venu, a semé de l’ivraie au milieu du blé et s’en est allé.
26 – Quand l’herbe a germé et fait du fruit, l’ivraie aussi s’est montrée.
27 – Les esclaves du maître de maison s’approchent et lui disent : Seigneur, n’as-tu pas semé de la bonne semence dans ton champ ? comment y a-t-il donc de l’ivraie ?
28 – II leur dit : Un ennemi a fait cela. Alors les esclaves lui disent : Veux-tu que nous allions la récolter ?
29 – II dit : Non, de peur qu’en récoltant l’ivraie vous ne déraciniez le blé avec elle.
30 – Laissez-les croître ensemble jusqu’à la moisson ; au temps de la moisson je dirai aux moissonneurs : récoltez l’ivraie d’abord et liez-la en bottes pour la brûler ; quant au blé ramassez-le dans ma grange.
31 – II leur proposa une autre parabole : Le règne des cieux est pareil à une graine de sanve qu’un homme a prise et semée dans son champ.
32 – C’est la plus petite de toutes les semences, mais quand elle croît, c’est le plus grand des légumes, elle devient un arbre et les oiseaux du ciel viennent nicher dans ses branches.
33 – II leur dit une autre parabole : Le règne des cieux pareil à de la levure qu’une femme a prise et cachée dans trois mesures de farine jusqu’à ce que tout ait levé.
34 – Tout cela, Jésus le dit aux foules en paraboles, et il ne leur disait rien sans parabole.
35 – C’était pour remplir cette parole du prophète qui dit : J’ouvrirai ma bouche avec des paraboles, je clamerai ce qui a été caché depuis la fondation du monde.
Mon analyse :
Comme toujours chez Matthieu, que ce soit pour les miracles ou les paraboles, il apparaît nécessaire de multiplier pour mieux faire passer le message. Là il propose quatre paraboles : celle de la graine tombée, celle de l’ivraie, celle de la graine de sanve et celle de la levure. La première indique que la réception de la parole fait la qualité de son action, la deuxième que le Mal est prêt à empêcher la croissance de la foi mais qu’il ne faut pas se laisser faire, la troisième annonce la puissance de la foi et la dernière que la foi grandit en l’homme et l’aide à se développer spirituellement. Normalement, les disciples doivent avoir ainsi une compréhension totale du message.
36 – Ensuite il laissa les foules et vint à la maison. Et ses disciples s’approchèrent de lui en disant : Explique-nous la parabole de l’ivraie dans le champ.
37 – II leur répondit : Celui qui sème la bonne semence c’est le fils de l’homme,
38 – le champ c’est le monde, la bonne semence ce sont les fils du Règne, l’ivraie ce sont les fils du mauvais,
39 – l’ennemi qui l’a semée, c’est le diable, la moisson c’est la fin des âges, et les moissonneurs sont les anges.
40 – Tout comme l’ivraie est récoltée et brûlée au feu, ainsi en sera-t-il à la fin des âges :
41 – le fils de l’homme enverra ses anges dans son règne et ils y récolteront tous les scandales et les faiseurs d’iniquité,
42 – et ils les jetteront au feu de la fournaise, là il y aura le sanglot et le grincement de dents.
43 – Alors les justes resplendiront comme le soleil, dans le règne de leur père. Entende qui a des oreilles !
Mon analyse :
Malheureusement, les disciples ne comprennent même pas ce qui est exotérique, alors Jésus doit leur faire un commentaire de chaque parabole.
44 – Le règne des cieux est pareil à un trésor caché dans un champ. L’homme qui l’a trouvé le recache et, dans sa joie, il s’en va, vend ce qu’il a et achète le champ.
45 – Le règne des cieux est encore pareil à un négociant qui cherche de belles perles.
46 – Ayant trouvé une perle de grand prix il s’en va vendre tout ce qu’il a et l’achète.
Mon analyse :
Ces deux comparaisons rappelle que, si l’on a la foi, ce que l’on a découvert vaut plus que tout ce que l’on a. Il faut donc se départir de tout pour mieux disposer de la foi et la faire croître en nous.
47 – Le règne des cieux et encore pareil à une seine jetée dans la mer et qui ramasse de tout.
48 – Quand elle est remplie, on la ramène sur la plage, on s’assoit, on récolte le bon dans des récipients et on rejette le pourri.
49 – Ainsi en sera-t-il à la fin des âges : les anges sortiront, ils sépareront les mauvais du milieu des justes
50 – et ils les jetteront au feu de la fournaise ; là il y aura le sanglot et le grincement de dents.
51 – Avez-vous compris tout cela ? Ils lui dirent Oui.
52 – Et il leur dit : Voilà pourquoi tout scribe qui est disciple du règne des cieux est pareil au maître de maison qui tire de son trésor du neuf et du vieux.
Mon analyse :
Matthieu a une approche apocalyptique. Pour lui tout le monde ne sera pas sauvé. C’est la compréhension judéo-chrétienne. Et il fait dire à Jésus que pour celui qui est compétent, il faut utiliser ce qui vient du passé, comme la Torah, et ce qui vient du présent, la parole de Jésus.
53 – Quand il eut fini de dire ces paraboles, Jésus partit de là.
54 – II vint dans sa patrie et les enseigna dans leur synagogue, de sorte qu’ils étaient frappés et disaient : D’où tient-il cette sagesse et ces miracles ?
55 – N’est-ce pas là le fils du charpentier ? Est-ce que sa mère ne s’appelle pas Marie, et ses frères, Jacques, Joseph, Simon, Jude ?
56 – Toutes ses sœurs ne sont-elles pas chez nous ? D’où tient-il donc tout cela ?
57 – Et ils se scandalisaient de lui. Mais Jésus leur dit : Un prophète n’es! méprisé que dans sa patrie et dans sa maison.
58 – Et il ne fit pas là beaucoup de miracles, à cause de leur méfiance.
Mon analyse :
Ce qui nous est dit c’est que les gens ne peuvent pas faire fi des opinions préconçues. Quand ils vous connaissent ils ne croient pas en ce que vous dîtes si cela montre un changement en vous. La dernière phrase est également typique du judéo-christianisme. Jésus punit indirectement ceux de sa patrie de leur peu de foi. Mais, si l’on prend ce la de manière métaphorique, on peut en fait, qu’il n’a pas eu beaucoup d’adeptes dans son pays. Et là cela devient acceptable. Notons également le rappel détaillé de la composition de la famille.