Ce texte est tiré du Nouveau Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction de Jean Grosjean, textes traduits, présentés et annotés par Jean Grosjean et Michel Léturmy avec la collaboration de Paul Gros.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.
ÉVANGILE SELON MARC
Chapitre sept
1 – Les pharisiens et quelques scribes venus de Jérusalem se rassemblent auprès de lui.
2 – Comme ils voient quelques-uns de ses disciples manger leur pain avec des mains profanes, c’est-à-dire non lavées,
3 – car les pharisiens et tous les Juifs, s’ils ne se sont pas soigneusement lavé les mains, ne mangent pas, ils tiennent à la tradition des anciens,
4 – et quand ils reviennent du marché ils ne mangent pas sans s’être aspergés, et il y a beaucoup d’autres choses auxquelles ils tiennent par tradition, immersion des coupes, des pots, des plats,
5 – les pharisiens et les scribes, donc, lui demandent : Pourquoi tes disciples ne marchent-ils pas selon la tradition des anciens ? car ils mangent leur pain avec des mains profanes !
6 – Il leur dit : Isaïe prophétise bien de vous, comédiens, ainsi qu’il est écrit : Ce peuple m’honore des lèvres mais leur cœur est loin de moi.
7 – Ils me révèrent en vain puisqu’ils enseignent pour enseignements des commandements d’hommes.
8 – Vous laissez le commandement de Dieu pour tenir la tradition des hommes.
9 – Il leur disait : Vous rejetez bien le commandement de Dieu pour garder votre tradition !
10 – Car Moïse dit : Honore ton père et ta mère, et : Que celui qui maudit père ou mère meure de mort ;
11 – et vous, vous dites : Si un homme dit à son père ou à sa mère : Tout ce que j’ai et qui te servirait est corban, c’est-à-dire offrande,
12 – vous ne le laissez plus rien faire pour son père ou sa mère ;
13 – et vous annulez la parole de Dieu par votre tradition que vous vous êtes transmise. Et vous faites beaucoup d’autres choses pareilles.
14 – Et il rappelle la foule. Il leur dit : Écoutez-moi tous et comprenez :
15 – rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui entre en lui ne peut le profaner ; mais c’est ce qui sort de l’homme qui profane l’homme.
16 – Si quelqu’un a des oreilles pour entendre, qu’il entende !
17 – Quand il rentra à la maison, loin de la foule, ses disciples le questionnèrent sur cette parabole.
18 – Il leur dit : Ainsi vous êtes, vous aussi, sans intelligence ? Vous ne comprenez pas que rien d’extérieur qui entre dans l’homme ne peut le profaner ?
19 – parce que cela n’entre pas dans son cœur mais dans son ventre et s’en va aux cabinets. Pour purifier toute nourriture.
20 – Et il disait : Ce qui sort de l’homme, voilà ce qui profane l’homme.
21 – Car c’est de l’intérieur et du cœur des hommes que sortent les mauvaises raisons, les prostitutions, les vols, les meurtres,
22 – les adultères, l’avidité, les lâchetés, la ruse, la débauche, le mauvais œil, le blasphème, l’orgueil, la sottise.
23 – Tous ces maux sortent de l’intérieur et profanent l’homme.
Mon analyse :
Ce que révèle Jésus dans cette altercation avec les autorités juives, c’est que les religions crées par les hommes afin de conduire les hommes se modifient avec le temps et altèrent le message originel. Alors que si l’on suit le message divin, il demeure inaltéré. Les règles ne doivent pas avoir pour raison d’être de créer une catégorie d’hommes qui se considèrerait comme différente, voire supérieure aux autres, mais simplement de mettre en pratique le message divin le plus simple.
24 – De là il se leva et s’en alla au territoire de Tyr. Comme il était entré dans une maison il voulait que personne ne le sache mais il ne put passer inaperçu :
25 – aussitôt, une femme qui avait entendu parler de lui et dont la fille avait un esprit impur, vint tomber à ses pieds.
26 – Or cette femme était une Grecque d’origine syro-phénicienne. Et elle lui demandait de chasser le démon de sa fille.
27 – Mais il lui disait : Laisse d’abord les enfants se rassasier, car ce n’est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens.
28 – Elle lui répondit : Si, seigneur : et les petits chiens, sous la table, mangent des miettes des enfants.
29 – Il lui dit : Pour cette parole, va-t’en : le démon est sorti de ta fille.
30 – Elle alla dans sa maison et trouva l’enfant jetée sur le lit et le démon, sorti.
Mon analyse :
Jésus se trouve face à une femme appartenant à la diaspora juive et non à la population juive autochtone qui se considérait comme plus pure car proche du temple. Il joue de ce sentiment en comparant les Juifs territoriaux aux enfants et les Juifs de la diaspora aux petits chiens. Mais la femme ne se révolte pas ; au contraire elle rappelle simplement que la parole de Dieu est accessible à tous et que la foi ne fait pas de distinction.
31 – Jésus ressortit du territoire de Tyr et vint, par Sidon, vers la mer de Galilée, en plein territoire de la Décapole.
32 – Et on lui amène un sourd à peu près muet, on fait appel à lui pour qu’il pose la main sur lui.
33 – Il le prit à l’écart de la foule, il lui mit ses doigts dans les oreilles, il cracha, lui toucha la langue
34 – et, regardant au ciel, il gémit et lui dit : Ephphatha, c’est-à-dire : ouvre-toi.
35 – Ses oreilles s’ouvrirent et aussitôt le lien de sa langue fut délié ; il parlait correctement.
36 – Et Jésus insista pour qu’ils ne le disent à personne ; mais plus on le leur interdisait, plus ils le proclamaient
37 – et, encore bien plus frappés, ils disaient : Il fait tout bien, il fait entendre les sourds et parler les muets.
Mon analyse :
Dans ce miracle, Marc montre Jésus exécutant un protocole hautement symbolique. Au lieu de se contenter de déclarer la guérison, il l’a provoque par des gestes ostensibles. Il faut dire que la maladie est elle aussi très symbolique. En fait, ce que Marc nous montre c’est Jésus ouvrant les yeux de l’humanité à sa condition réelle et déliant sa langue des mensonges accumulés afin qu’elle soit désormais au service de la parole divine.