Ce texte est tiré du Nouveau Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction de Jean Grosjean, textes traduits, présentés et annotés par Jean Grosjean et Michel Léturmy avec la collaboration de Paul Gros.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.
ÉVANGILE SELON MARC
Chapitre onze
1 – Comme ils approchent de Jérusalem, vers Bethphagé et Béthanie, près du mont des Oliviers, il envoie deux de ses disciples
2 – et leur dit : Allez à ce bourg en face de vous ; sitôt entrés, vous trouverez un ânon attaché, sur lequel aucun homme ne s’est encore assis ; déliez-le et amenez-le.
3 – Si quelqu’un vous dit : Qu’est-ce que vous faites ? dites : Le seigneur en a besoin et le renvoie ici aussitôt.
4 – Ils s’en allèrent et trouvèrent un ânon attaché près d’une porte, dehors, sur la rue. Ils le délient.
5 – Quelques-uns de ceux qui étaient là leur disaient : Qu’est-ce que vous faites à délier cet ânon ?
6 – Ils leur dirent comme Jésus avait dit, et on les laissa.
7 – Ils amènent donc l’ânon à Jésus, y jettent leurs vêtements, et il s’assit dessus.
8 – Et beaucoup garnirent le chemin avec leurs vêtements ; d’autres, avec des feuillages qu’ils coupaient dans les champs.
9 – Et ceux qui marchaient devant et ceux qui suivaient criaient : Hosanna ! Béni, celui qui vient au nom du Seigneur !
10 – Béni, le règne qui vient, le règne de notre père David ! Hosanna dans les hauteurs !
11 – Il entra à Jérusalem, dans le temple et, tout bien considéré, comme c’était déjà tard, il sortit avec les douze à Béthanie.
Mon analyse :
On peut être surpris de ce passage que l’on retrouve dans les autres évangiles synoptiques. Est-ce une tradition fabriquée pour manifester la majesté de Jésus face à la ville sainte ? La volonté d’utiliser un moyen de transport vierge, l’entrée en majesté à la façon des triomphes des empereurs romains, le recours à une citation des Psaumes (9), rien de tout cela ne ressemble au Jésus que nous connaissons. On peut aussi imaginer qu’il s’agisse d’une manière de hâter les événements en montrant aux autorités juives la menace que Jésus représente pour elles.
12 – Le lendemain, comme ils sortaient de Béthanie, il eut faim.
13 – De loin il vit un figuier qui avait des feuilles ; il vint voir s’il y trouverait quelque chose et, en y venant, il n’y trouva rien que des feuilles, car ce n’était pas le temps des figues.
14 – Il lui dit à part : Que jamais plus personne ne mange un fruit de toi ! Et ses disciples entendaient.
Mon analyse :
Là encore, le comportement de Jésus est étonnant. Ce n’est pas la saison et il fait reproche à l’arbre de ne pas porter de fruits. Après une certaine vanité, voici l’impatience qui est manifestée. Peut-être est-ce une façon de montrer les défauts que nous devons éviter.
15 – Et ils reviennent à Jérusalem. En entrant dans le temple il commença à chasser ceux qui vendaient et ceux qui achetaient dans le temple, il renversa les tables des changeurs et les sièges des vendeurs de colombes,
16 – et il ne laissait personne transporter des affaires à travers le temple.
17 – Et il enseignait, il leur disait : N’est-il pas écrit : Ma maison sera appelée maison de prière, pour toutes les nations ? Et vous en avez fait un antre de bandits.
18 – Les grands prêtres et les scribes l’entendirent, et ils cherchaient comment le perdre ; car ils le craignaient : toute la foule, en effet, était frappée de son enseignement.
Mon analyse :
À l’entrée du temple, sur le parvis, se développait une activité commerciale en rapport avec les sacrifices et le paiement de l’impôt dû au temple (mais surtout destiné aux lévites). Ces pratiques créaient une hiérarchie entre les croyants qui venaient prier. En supprimant cet outil de sélection indirecte, Jésus manifeste l’égalité de tous devant Dieu et la suprématie de la foi sur toute autre pratique.
19 – Le soir venu, ils sortaient de la ville.
20 – En passant, à l’aube, ils virent le figuier desséché depuis les racines.
21 – Et Pierre se souvient, il dit : Tu vois, rabbi, le figuier que tu as maudit est desséché.
22 – Jésus leur répond : Fiez-vous à Dieu.
23 – Oui je vous le dis, si quelqu’un dit à cette montagne : enlève-toi et jette-toi à la mer et si, au lieu d’hésiter dans son cœur il croit que ce qu’il dit va se faire, cela lui arrivera.
24 – C’est pourquoi, je vous le dis, tout ce que vous demandez en priant, croyez que vous le recevrez et ce sera à vous.
Mon analyse :
Voici une explication ; le problème n’était pas le figuier mais la foi. En condamnant le figuier Jésus n’exprimait pas son impatience mais voulait montrer que la foi obtient tout, même si cela ne se produit pas dans l’instant.
25 – Et quand vous êtes debout pour prier, si vous avez quelque chose contre quelqu’un, remettez, pour que votre père qui est dans les cieux vous remette aussi vos fautes.
26 – Et si vous ne remettez pas, votre père qui est dans les cieux ne vous remettra pas non plus vos fautes.
Mon analyse :
La pureté de celui qui exprime une prière doit être maximale. Que ce soit pour espérer obtenir une chose simple ou pour le plus important, notre salut, nous devons d’abord nous assurer de notre pureté de cœur maximale. Ce point était essentiel chez les cathares qui invalidaient les actions effectuées par un Bon-Chrétien s’il était démontré qu’il n’était pas en état de pureté lorsqu’il les avait effectuées. De même, le jeûne précédant les Consolations visait également à cette purification.
27 – Et ils reviennent à Jérusalem. Comme il marchait dans le temple, les grands prêtres, les scribes, les anciens viennent à lui ;
28 – ils lui disent : Par quel pouvoir fais-tu cela ? ou qui t’a donné le pouvoir de le faire ?
29 – Jésus leur dit : Je vais vous poser une question ; répondez-moi et je vous dirai par quel pouvoir je fais cela.
30 – L’immersion par Jean était-elle du ciel ou des hommes ? Répondez-moi.
31 – Ils se faisaient ce raisonnement : Si nous disons : Du ciel, il va dire : Pourquoi ne vous y êtes-vous pas fiés ?
32 – Mais si nous disons : Des hommes ? Ils craignaient la foule, car tous tenaient Jean pour vraiment prophète.
33 – Et ils répondent à Jésus : Nous ne savons pas. Et Jésus leur dit : Moi non plus je ne vous dis pas par quel pouvoir je fais cela.
Mon analyse :
Cette demande vise à mettre Jésus en défaut. Soit il ne sait pas de qui il tient son pouvoir et les autorités juives pourront aisément l’accuser d’air au nom du Mal, soit il dit que cela lui vient de Dieu et il sera alors accusé de blasphème. Mais il détourne le problème, comme avec la femme adultère dans Jean (8, 3-11), en mettant les opposants face à leurs propres incompétences. Il leur montre qu’eux aussi sont incapables d’exprimer ce qu’ils pensent parce que cela pourrait être retourné contre eux. Donc, ne cherchons pas à mettre les autres en défaut car nous sommes nous mêmes susceptibles de l’être.