Évangile de Luc – Chapitre 16

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Ce texte est tiré du Nouveau Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction de Jean Grosjean, textes traduits, présentés et annotés par Jean Grosjean et Michel Léturmy avec la collaboration de Paul Gros.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.

ÉVANGILE SELON LUC

CHAPITRE 16

1 – Et il disait aussi aux disciples : Il y avait un homme riche qui avait un gérant ; et celui-ci lui a été dénoncé comme dilapidant ses biens.
2 – Il l’a appelé et lui a dit : Qu’est-ce que j’entends de toi ? Rends compte de ta gestion, car tu ne peux plus être gérant.
3 – Et le gérant s’est dit : Que faire, puisque mon seigneur m’arrache cette gestion ? Bêcher, je ne peux pas ; mendier, j’aurais honte !
4 – Je sais ce que je vais faire pour que, quand je serai destitué de cette gestion, on m’accueille dans d’autres maisons.
5 – Et il appelle un par un les débiteurs de son seigneur ; il dit au premier : Combien dois-tu à mon seigneur ?
6 – Il dit : Cent barils d’huile. Il lui dit : Voilà ta lettre, assieds-toi et écris vite : Cinquante.
7 – Puis il dit à un autre : Et toi, combien dois-tu ? Il dit : Cent sacs de blé. Il lui dit : Voilà ta lettre, écris : Quatre-vingts.
8 – Et le seigneur a loué ce gérant d’injustice de ce qu’il avait agi avec bon sens. C’est que les fils de cet âge-ci ont plus de bon sens que les fils de la lumière, envers ceux de leur génération.
9 – Et moi je vous le dis, faites-vous des amis chez le Mamon d’injustice pour que, quand il vous lâchera, on vous accueille dans les abris éternels.
10 – Qui est fidèle en petit est fidèle aussi en grand ; et qui est injuste en petit est injuste aussi en grand.
11 – Si donc dans l’injuste Mamon vous n’avez pas été fidèles, qui est-ce qui vous confiera les vraies valeurs ?
12 – Et si dans les biens des autres vous n’avez pas été fidèles, qui est-ce qui vous donnera les vôtres ?
13 – Aucun domestique ne peut s’asservir à deux seigneurs ; car, ou il détestera l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas vous asservir à Dieu et à Mamon.

Mon analyse :
Ce texte est difficile. Voici un gérant accusé d’être incompétent. Cela semble vrai car il n’imagine pas se justifier. Dans le but de rebondir après sa future destitution, il cherche à se faire des amis des débiteurs de son seigneur en les aidant à falsifier les dettes. Or, le seigneur félicité le gérant d’avoir fait preuve d’à-propos, même si cela correspond à un vol. En fait Jésus nous dit que ceux qui sont asservis à ce monde sont plus rusés que ceux qui se fient à Dieu. Mais c’est pour mieux rappeler que celui qui est rusé et non pas fidèle sera plus mal considéré que celui qui est fidèle. Donc, il faut préférer la fidélité, même si elle est moins bien vue que la ruse. Nous retrouvons ici le concept de la parabole des talents. Le seigneur est mauvais, c’est Mamon, et donc il loue ce qui est mauvais même si cela lui porte préjudice. Pour nous les choses sont claires, même envers Mamon nous devons faire preuve de fidélité dans ce que nous lui devons. Par exemple, il nous a imposé une enveloppe charnelle. Nous n’avons pas à la faire prospérer (parabole des talents), mais nous ne devons pas la détruire (parabole du gérant infidèle).

14 – Et les pharisiens, qui aiment bien l’argent, entendaient tout cela, et ils le narguaient.
15 – Il leur dit : C’est vous qui vous justifiez devant les hommes, mais Dieu connaît vos cœurs ; car ce qui est haut chez les hommes, Dieu l’a en horreur.
16 – Jusqu’à Jean, c’était la Loi et les Prophètes ; depuis lors, le règne de Dieu est annoncé et chacun lui fait violence.
17 – Or, il est plus facile que le ciel et la terre passent, plutôt que ne tombe un seul point de la Loi.
18 – Quiconque renvoie sa femme et se marie avec une autre est adultère ; et celui qui se marie avec une femme renvoyée par son mari est adultère.
19 – Il y avait un homme riche qui se vêtait de pourpre et de byssus, et qui faisait la fête tous les jours splendidement.
20 – Un pauvre tout ulcéreux, appelé Lazare, s’était jeté devant son porche
21 – et convoitait de se rassasier de ce qui tombait de la table du riche; mais les chiens mêmes venaient lécher ses ulcères.
22 – Et voilà que le pauvre est mort, il a été emporté par les anges dans le sein d’Abraham. Le riche est mort aussi et il a été enseveli ;
23 – et dans l’Hadès, parmi les tourments, il a levé les yeux et a vu de loin Abraham avec Lazare dans son sein.
24 – Il a vociféré : Père Abraham, aie pitié de moi ! envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans l’eau pour me rafraîchir la langue, car je suis rongé dans cette flamme !
25 – Abraham lui a dit : Mon enfant, souviens-toi que tu as reçu tes biens pendant ta vie, et Lazare pareillement ses maux. Maintenant ici il est consolé et toi tu es rongé.
26 – Et avec tout cela, entre nous et vous un grand abîme a été établi, de sorte que ceux qui voudraient passer d’ici chez vous ne le puissent pas, et qu’on ne traverse pas non plus de là-bas chez nous.
27 – Mais il dit : Je te demande donc, père, de l’envoyer dans la maison de mon père,
28 – où j’ai cinq frères, pour qu’il les convainque de ne pas venir eux aussi dans ce lieu de tourment.
29 – Abraham lui dit : Ils ont Moïse et les Prophètes ; qu’ils les écoutent !
30 – Mais il dit : Non ! père Abraham ; au contraire, si quelqu’un des morts passe chez eux, ils se convertiront.
31 – Mais il lui dit : Du moment qu’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, si quelqu’un des morts ressuscite, cela ne les persuadera pas non plus.

Mon analyse :
Cette partie donne régulièrement lieu à une interprétation inversée chez les judéo-chrétiens. Les pharisiens se moquent de Jésus car ils sont attachés aux biens de ce monde. Jésus rappelle que avant lui la seule référence acceptée était la loi mosaïque, mais maintenant que le règne de Dieu est annoncé personne ne le respecte. Le verset 17 est mal interprété. Il veut dire que remettre en cause la loi mosaïque est très difficile car elle est admise depuis très longtemps. Mais pour autant il démontre que cette loi est mauvaise et injuste. La parabole du riche et de Lazare vient le démontrer. Le riche n’a pas fait preuve de Bienveillance envers le pauvre malade, mais il n’a pas non plus violé la loi mosaïque. Pourtant, une fois mort, il est du mauvais côté et comprend son erreur. Abraham dit clairement qu’entre ceux qui vivent sous la loi mosaïque mais sans Bienveillance et ceux qui supporte une vie difficile il y a un grand abîme. Et Abraham rappelle que la bonne parole est donnée, non pas par Dieu mais par Moïse et les prophètes. or, ces derniers ont souvent cherché à infléchir l’attitude des Juifs et ce sans succès. Ce message est pour nous. Même si nous respectons les lois qui ne peuvent nous empêcher d’agir mal envers nos frères, notre salut dépendra de notre capacité à respecter le loi d’Amour de Jésus et à pratiquer la Bienveillance.

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