Ce texte est tiré du Nouveau Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction de Jean Grosjean, textes traduits, présentés et annotés par Jean Grosjean et Michel Léturmy avec la collaboration de Paul Gros.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.
ÉVANGILE SELON JEAN
Chapitre III
1 – Il y avait, parmi les pharisiens, un homme du nom de Nicodème, un chef des Juifs.
2 – Il vint de nuit dire à Jésus : Rabbi, nous savons que tu es un maître qui vient de Dieu, car personne ne peut faire les signes que tu fais si Dieu n’est avec lui.
3 – Jésus lui répondit : Oui, oui, je te le dis, personne s’il ne naît d’en haut ne peut voir le règne de Dieu.
4 – Nicodème lui dit : Comment un homme peut-il naître, une fois vieux ? Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et naître ?.
5 – Jésus répondit : Oui, oui, je te le dis, personne s’il ne naît d’eau et d’esprit ne peut entrer dans le règne des cieux.
6 – Ce qui est né de la chair est chair, ce qui est né de l’Esprit est esprit.
7 – Ne t’étonne pas que je te dise : Vous devez naître d’en haut.
8 – L’Esprit souffle où il veut et tu entends sa voix, mais tu ne sais d’où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de quiconque est né de l’Esprit.
9 – Nicodème lui répondit : Comment cela peut-il se faire ?
10 – Jésus lui répondit : Tu es maître en Israël et tu ne sais pas cela ?
Mon analyse :
Dans ce passage, Nicodème essayer de comprendre qui est Jésus. Sincèrement ou par flatterie, il lui attribue une valeur liée à ses signes que tous ont vu. Jésus introduit alors une notion d’origine divine que Nicodème semble, ou feint, de ne pas comprendre. Jésus enfonce le clou en expliquant que ce qui vient de la chair n’a pas de part au salut et au statut divin. C’est important car, face à un représentant des autorités religieuses, il invalide la croyance juive en un Dieu créateur de l’homme terrestre. C’est donc bien une remise en cause du statut divin du démiurge. Enfin, Jésus explique à Nicodème que ce qui vient de Dieu n’a pas part à la matière et là le maître juif est totalement déboussolé.
11 – Oui, oui, je te le dis, nous parlons de ce que nous savons et nous attestons ce que nous avons vu, et vous ne recevez pas notre témoignage.
12 – Si vous ne croyez pas ce que je vous dis de terrestre, comment croirez-vous ce que je vous dirai de céleste ?
13 – Personne n’est monté au ciel sinon celui qui est descendu du ciel, le fils de l’homme.
14 – Moïse haussa le serpent dans le désert, et le fils de l’homme doit aussi être haussé
15 – pour que quiconque se fie ait par lui la vie éternelle.
Mon analyse :
Jésus constate que les Juifs sont insensibles à son message et il précise que, même les plus grands prophètes juifs, comme Isaïe par exemple n’ont pas connu Dieu. Seul lui peut en parler car il vient en son nom. Dans le désert, Moïse prit un des serpents brûlants que Dieu avait envoyé contre les Juifs qui se plaignaient de lui et en fit, à la demande de Dieu, un serpent d’airain qui guérissait ceux qui regardaient vers lui (Nb XXI, 5-9). Jésus annonce que lui aussi sera un instrument de Dieu à destination des hommes afin de les guérir de leurs souffrances mondaines.
16 – Car Dieu a aimé le monde jusqu’à lui donner son Fils unique pour que quiconque se fie à lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle.
17 – Car Dieu n’a pas envoyé le Fils en ce monde pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui.
18 – Qui se fie à lui n’est pas jugé. Qui ne se fie pas est déjà jugé parce qu’il ne s’est pas fié au nom du Fils unique de Dieu.
19 – Le jugement, c’est que la lumière est venue en ce monde et les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière parce que leurs œuvres étaient mauvaises.
20 – Car quiconque fait le mal déteste la lumière et ne vient pas à la lumière de peur que ses œuvres ne soient prouvées coupables.
21 – Mais qui pratique la vérité vient à la lumière pour qu’il soit manifeste que ses œuvres sont le travail de Dieu.
Mon analyse :
Jésus oppose le Dieu d’amour au Dieu juif. Il montre qu’il n’est pas un Dieu de jugement mais un Dieu salvateur. Or, de quoi pourrait bien être sauvé l’homme si ce monde était l’œuvre de Dieu ? Par contre, ce qui fera jugement pour l’homme c’est le péché contre l’Esprit, c’est-à-dire de ne pas reconnaître l’Esprit quand celui-ci se manifeste à lui. Seuls ceux qui auront eut foi en l’Esprit auront part au salut. Pour les autres ils devront attendre d’avoir suffisamment progressé dans leur foi.
22 – Après quoi Jésus vint avec ses disciples dans le pays de Judée et il s’y attardait à immerger avec eux.
23 – Jean immergeait aussi, à Aïnôn, près de Salim, parce qu’il y avait là beaucoup d’eau et on y venait se faire immerger,
24 – car Jean n’avait pas encore été jeté en prison.
25 – Il y eut alors une contestation des disciples de Jean avec un Juif à propos de purification.
26 – Ils vinrent dire à Jean : Rabbi, celui qui était avec toi au-delà du Jourdain et à qui tu as rendu témoignage, voilà qu’il immerge et tous vont à lui.
27 – Jean répondit : Un homme ne peut avoir que ce qui lui est donné du ciel.
28 – Vous êtes vous-mêmes témoins que j’ai dit : Je ne suis pas le christ, je suis envoyé devant lui.
29 – Qui a l’épouse est l’époux, mais l’ami de l’époux est là à l’écouter et se réjouit joyeusement de la voix de l’époux. C’est cette joie qui m’emplit.
30 – Il doit croître et moi diminuer.
31 – Celui qui vient d’en haut est au-dessus de tous. Celui qui est de la terre est terrestre et parle en terrestre. Celui qui vient du ciel
32 – atteste ce qu’il a vu et entendu et personne ne reçoit son témoignage.
33 – Qui reçoit son témoignage a scellé que Dieu est vrai.
34 – Car celui que Dieu a envoyé dit les paroles de Dieu, il ne donne pas l’esprit avec mesure.
35 – Le Père aime le Fils et a tout mis entre ses mains.
36 – Qui se fie au Fils a la vie éternelle, mais qui refuse le Fils ne verra pas la vie, la colère de Dieu demeure sur lui.
Mon analyse :
Dans ce passage, nous voyons que Jésus pratique le baptême de Jean avec ses disciples. Mais la dispute des disciples montre que ce baptême est impropre car il provoque la compétition et la jalousie. Jean le baptiste enseigne à ses disciples la véritable humilité. Il n’est pas le christ (modestie) et il n’a donc aucune jalousie envers lui. Mieux encore, il manifeste sa joie d’être son témoin tout en connaissant exactement sa juste place (humilité). Ces deux conditions sont nécessaires à la capacité d’entendre et de suivre la voie qui mène à Dieu. Il sait que Jésus porte la parole divine quand lui ne peut que parler en homme de ce monde. Il leur conseille donc d’aller vers Jésus sous peine de ne pas être sauvés.