Le Service (Apparelhment) – Étude
Présentation
Chaque mois je réalise mon service, comme me le demande la Règle de justice et de vérité appliquée aux chrétiens consolés.
Appelé Apparelhement en latin de cuisine inquisitorial, il était appelé servici chez les occitants et nous reprenons ce terme en français, à savoir Service.
2023
Vous pouvez suivre le Service du 30avril 2023 en visionnant cette vidéo au format mp4.
Étude
Ce rituel se tenait tous les mois, dans la maison cathare, devant le diacre en charge des communautés de la zone concernée. L’ancien de la communauté s’adressait directement au diacre, en présence des chrétiens consolés, des novices et des croyants locaux, et exprimait la confession des fautes communes de la communauté dont il avait la charge.
Pour finir, l’ancien ou la diaconesse confirme la conscience qu’ont les Bons-Chrétiens de leurs fautes et demande des pénitences appropriées. Il faut savoir que la détermination des pénitences n’est pas définie hiérarchiquement. C’est en accord avec le diacre que l’ancien déterminera les pénitences qu’il pense justes pour sa communauté. Ces pénitences se rajouteront à la règle mais sans s’y superposer afin de ne pas mettre les organismes à trop rude épreuve.
Le péché
La notion de péché recouvre, chez les cathares, les fautes ou manquements à ce qui fait l’essence de la doctrine : l’entendement du Bien, entendenza del Be, comme disaient les cathares occitans médiévaux.
Cela recouvre des fautes et des manquements touchant à ce qui dépasse notre nature mondaine, consciente et inconsciente.
Cela ne doit pas être confondu avec l’idée que se font du péché celles et ceux qui n’ont pas été consolés et qui se réfèrent aux obligations légales ou réglementaires, aux règles sociales et au savoir-vivre, aux concepts moraux et éthiques.
Comme le rappelaient sans cesse les chrétiens consolés aux croyants, lors des prêches, seuls les chrétiens consolés peuvent commettre des péchés.
C’est pour cela qu’ils étaient les seuls à pratiquer l’acte de pénitence que l’on appelle le Service, qui est une pratique systématique mensuelle réalisé par l’ensemble des membres de chaque maison cathare — représentée par son ancien ou sa diaconesse —, devant le représentant diocésain de l’Église : le diacre.
Ce service était conclu par un engagement de contrition collectif auquel pouvait s’ajouter un complément de confession individuel des membres de la communauté qui considéraient avoir commis une faute plus grave, justifiant éventuellement une contrition plus importante. Cependant, sauf en cas de faute contre l’Esprit ou d’aveuglement d’un pénitent face à son état, c’est toujours le pénitent qui définit avec le diacre la nature de la contrition qu’il va estimer adaptée à sa faute.
Contrairement à ce que l’on observe chez les autres chrétiens, et notamment chez les judéo-chrétiens, les cathares prennent en compte les péchés intentionnels — forcément très rares —, mais aussi les péchés involontaires ou contraints par les circonstances, les péchés commis par omission, mais aussi les péchés non conscients commis du simple fait de notre nature mondaine.
Le rituel
Texte actuel
« Nous sommes ici devant Dieu et devant vous et devant la sainte Église, pour affirmer notre contrition et pour recevoir pénitence et rémission de tous les manquements et fautes, que nous avons commis, en parole, en acte, en pensée et même inconsciemment jusqu’à maintenant, et nous demandons miséricorde à Dieu, et à vous pour que vous priiez pour nous le principe parfait afin qu’il nous pardonne.
Prions devant Dieu et reconnaissons nos fautes et nos manquements à l’égard du père et du Christ, et du Saint-Esprit, et de tous les membres de la sainte Église de Dieu, actuels ou d’autrefois, pour que nous soit pardonné tout ce en quoi nous avons péché.
Bénissez-nous, épargnez-nous.
Car nombreux sont nos manquements en lesquels nous offensons Dieu chaque jour, la nuit et le jour, en parole et en œuvre, et selon la pensée, avec volonté et sans volonté, plus par notre volonté que les malins esprits nous apportent dans la chair dont nous sommes revêtus.
Bénissez-nous, épargnez-nous.
Mais tandis que la sainte parole de Dieu nous enseigne, ainsi que les saints apôtres, et que nos frères spirituels nous annoncent que nous rejetions tout désir de la chair et toute souillure, et fassions la volonté de Dieu en accomplissant le bien parfait, nous, serviteurs négligents, nous ne faisons pas seulement la volonté de Dieu comme il conviendrait, mais nous accomplissons le plus souvent les désirs de la chair et les soucis du monde, si bien que nous nuisons à nos esprits.
Bénissez-nous, épargnez-nous.
Nous allons avec les gens du monde, et avec eux nous nous tenons et parlons et mangeons, et péchons en beaucoup de choses, si bien que nous nuisons à nos frères et à nos esprits.
Bénissez-nous, épargnez-nous.
Par nos langues nous tombons en vaines conversations, en moqueries et malices, en détraction de frères et de sœurs, desquels nous ne sommes pas dignes de juger, ni de condamner les péchés des frères et des sœurs ; parmi les chrétiens nous sommes des pécheurs.
Bénissez-nous, épargnez-nous.
Le service à tenir que nous avons reçu, nous ne l’avons pas gardé comme il aurait fallu, ni le jeûne, ni l’oraison : nous avons transgressé nos jours, nous prévariquons nos heures ; pendant que nous sommes en la sainte oraison, notre sens se détourne vers les désirs charnels, vers les soucis mondains, si bien que, à cette heure, à peine nous savons quelle chose nous offrons au père des justes.
Bénissez-nous, épargnez-nous.
Ô toi, saint et bon père, toutes ces choses qui nous arrivent, à notre sens et à notre pensée, nous te les confessons et toute la multitude des manquements nous la plaçons en ta miséricorde.
Bénissez-nous, épargnez-nous.
Ô Seigneur, juge et condamne les vices de la chair, n’aie pas pitié de la chair née de corruption, mais aie pitié de l’esprit qui est emprisonné, et administre nous jours et heures et veniæ, et jeûnes et oraisons, et prédications pour que nous ne soyons pas jugés ni écartés de ta grâce et du salut.
Bénissez-nous, épargnez-nous. »
Guilhem de Carcassonne, le 8 juin 2021