Genèse – chapitre 3

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La Torah – Pentateuque[1]

Ce texte est tiré de l’Ancien Testament publié dans la collection La Bibliothèque de la Pléiade des éditions NRF Gallimard.
Introduction par Édouard Dhorme, textes traduits, présentés et annotés par Édouard Dhorme.
Afin de respecter le droit d’auteur, l’introduction, les présentations et les annotations ne sont pas reproduites. Je vous invite donc à vous procurer ce livre pour bénéficier pleinement de la grande qualité de cet ouvrage.

Genèse

Chapitre 3

1 – Or le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs qu’avait faits Iahvé Élohim. Il dit à la femme : « Est-ce que vraiment Élohim a dit : Vous ne mangerez d’aucun arbre du jardin ? »
2 – La femme dit au serpent : « Du fruit des arbres du jardin nous pouvons manger,
3 – mais du fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Élohim a dit : « Vous n’en mangerez pas et vous n’y toucherez pas, de peur que vous ne mouriez. »

Mon commentaire :
Si cet animal est une création de ce dieu, son comportement est bizarre. Il semble être le seul animal à pouvoir s’adresser à la femme et est déjà très indépendant de son créateur. Mais on pourrait aussi imaginer qu’il ne soit pas de cette création, ou qu’il soit investi d’un « esprit » issu d’une autre création. Ce pourrait être, à l’instar du Christ, un esprit non tombé au pouvoir du mal qui aurait pris l’apparence du serpent pour informer l’homme de la situation.

4 – Le serpent dit à la femme : Vous n’en mourrez pas,
5 – mais Élohim sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux se dessilleront, et que vous serez comme des dieux, sachant le bien et le mal.

Mon commentaire :
Ce serpent en sait long pour une simple créature terrestre. Et ce dieu est bien craintif et bien puéril, en plus de ses autres qualités.

6 – La femme vit que l’arbre était bon à manger et qu’il était agréable aux yeux et que l’arbre était plaisant à contempler. Elle prit de son fruit et en mangea, elle en donna aussi à son mari qui était avec elle et il en mangea.
7 – Alors se dessillèrent leurs yeux, à tous deux, et ils surent qu’ils étaient nus. Ils cousirent donc des feuilles de figuier et se firent des ceintures.

Mon commentaire :
Donc, le serpent avait raison et le dieu avait tort !
Ils ont mangé de l’arbre de la connaissance et n’en sont pas morts.
Cela leur a révélé leur véritable état – ils sont nus – alors qu’avant ils l’ignoraient, aveuglés qu’ils étaient par ce dieu.
Ce même dieu qui est incapable de faire en sorte que l’arbre de la connaissance et le serpent n’existent, qui leur ment et n’est pas capable de les contrôler.
Que d’impuissance chez un tout puissant.
En réalité, il faudrait voir les choses autrement. Ce vil imitateur de la création divine est un bricoleur du dimanche.
Incompétent (il s’y reprend à plusieurs fois pour un même usage), incapable de maîtriser la situation, il ne peut que laisser éclater sa colère et chasser ses créatures de l’enclos où il les avait parqués.

8 – Ils entendirent la voix de Iahvé Élohim qui se promenait dans , au souffle du jour, et ils se cachèrent, l’homme et la femme, de devant Iahvé Élohim, au milieu des arbres du jardin.
9 – Iahvé Élohim appela l’homme et lui dit : « Où es-tu ? »
10 – Il dit : « J’ai entendu ta voix dans le jardin et j’ai eu peur, parce que je suis nu, et je me suis caché. »
11 – Il dit : « Qui t’a révélé que tu étais nu ? Est-ce que tu as mangé de l’arbre dont je t’avais ordonné de ne pas manger ? »
12 – L’homme dit : « La femme que tu as mise auprès de moi, c’est elle qui m’a donné de l’arbre et j’ai mangé ».
13 – Iahvé Élohim dit à la femme : « Qu’est-ce que tu as fait ? » La femme dit : « Le serpent m’a dupée et j’ai mangé. »
14 – Iahvé Élohim dit au serpent : « Puisque tu as fait cela, maudit sois-tu entre tous les bestiaux et entre tous les animaux des champs ! Sur ton ventre tu marcheras et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie !
15 – J’établirai une inimitié entre toi et la femme, entre ta race et sa race : celle-ci t’écrasera la tête et, toi, tu la viseras au talon. »

Mon commentaire :
Ce texte est révélateur, de l’impuissance, de la duplicité et de la méchanceté de Iahvé qui se fait passer pour Dieu. En effet, il ne peut empêcher cet arbre, dont il est censé savoir que son attrait surpassera les capacités de résistance de l’homme et de la femme, d’être là et de le narguer. Cette impuissance est due au fait qu’il est sans pouvoir face à Dieu qui lui est réellement tout-puissant sur le Bien, c’est-à-dire sur les esprits-saints prisonniers dans l’homme et dans la femme. Sa duplicité est évidente quand Adam lui révèle sa honte d’avoir découvert sa nudité, car Iahvé ne l’en avait pas informé et la lui avait masquée. Au lieu de reconnaître sa faute, il cherche à la faire porter sur l’homme. Enfin, sa méchanceté éclate dans toute sa cruauté envers le serpent — qui est une sorte de Christ puisqu’il a apporté la vérité — à qui il annonce un avenir terrible, comme il va le faire ensuite pour l’homme et pour la femme.

16 – Il dit à la femme : J’augmenterai la souffrance de tes grossesses, tu enfanteras avec douleur, et tes désirs se porteront vers ton mari, mais il dominera sur toi.
17 – À l’homme il dit : « Parce que tu as écouté la voix de ta femme et que tu as mangé de l’arbre au sujet duquel je t’avais donné un ordre, en disant : Tu n’en mangeras pas ! maudit soit le sol à cause de toi ! C’est dans la souffrance que tu te nourriras de lui tout au long de ta vie.
18 – Il fera germer pour toi épine et ronce et tu mangeras l’herbe des champs.
19 – À la sueur de ton visage tu mangeras du pain jusqu’à ton retour au sol, puisque c’est de lui que tu as été pris, car tu es poussière et tu retourneras en poussière. »

Mon commentaire :
Il me semble qu’on peut rajouter à la longue liste des défauts de ce dieu, la mauvaise foi (comme s’il ne savait pas ce que l’homme a fait), la colère et la vengeance. Ah, j’allais oublier : une certaine perversion dans le détail des moyens de punition.
Non, décidément, ce dieu ne saurait être Dieu en aucune façon.
Et sa création ne saurait être confondue avec la création divine, consubstantielle à Lui.
S’il fallait attacher un intérêt quelconque à ce texte, c’est bien celui qui le ferait considérer comme une tentative de mystification par laquelle le mal ou Satan cherche à se faire passer pour Dieu en abusant de la faiblesse de l’esprit qui habite l’homme.
Une fois encore, par leur réflexion logique et cohérente, les Cathares avaient parfaitement déjoué le piège.Dernier détail, en précisant à l’homme qu’il fut tiré du sol, Iahvé valide la seconde création (Gen. 2, 7), ce qui laisse penser que la première (Gen. 1, 26) n’est pas de son fait, ce que les cathares interprétaient comme le fait qu’elle était spirituelle et issu du vrai Dieu, alors que la seconde était matérielle et provenait du diable. Comme le démontre clairement l’évêque cathare Jean de Lugio, le terme « création » ne signifie pas former à partir de rien, mais au mieux, ajouter des compétences à ce qui est déjà existant[2].

20 – L’homme appela la femme du nom d’Ève, parce qu’elle fut mère de tout vivant.
21 – Iahvé Élohim fit pour l’homme et sa femme des tuniques de peau et les en revêtit.
22 – Alors Iahvé Élohim dit : « Voici que l’homme est devenu comme l’un de nous, grâce à science du bien et du mal ! Maintenant il faut éviter qu’il étende sa main, prenne aussi de l’arbre de vie, en mange et vive à jamais. »
23 – Iahvé Élohim le renvoya donc du jardin d’Éden pour qu’il cultiva le sol d’où il avait été pris.
24 – Il chassa l’homme et l’installa à l’orient du jardin d’Éden les Chérubins et la flamme tournoyante de l’épée pour garder la route de l’arbre de vie.

Mon commentaire :
Deux points très importants et pourtant totalement ignorés des judéo-chrétiens : la chair dont nous sommes revêtus nous a été ajoutée avant la sortie du jardin d’Éden et Iahvé reconnaît que l’arbre de vie fait atteindre le statut divin à l’homme ce qui justifie qu’il en soit écarté pour que Iahvé demeure seul dans cet état. Quelle était donc la « forme » de l’homme et de la femme avant ? Se peut-il que les cathares, en parlant de la chute des esprits-saints dans la matière aient approché cette notion ? Si Iahvé reconnaît à l’arbre de vie le pouvoir d’élever l’homme au même rang que lui, cela veut dire que d’une part il n’est pas Dieu lui-même et que d’autre part l’arbre de vie provient d’une entité bien supérieure à Iahvé.

Guilhem de Carcassonne.


[1] La Torah est la loi que Iahvé a demandé à Moïse d’écrire. Il s’agit donc de la loi mosaïque qui contient les règles que fixe Iahvé à son peuple. Les judéo-chrétiens l’appellent Pentateuque qui veut dire cinq rouleaux, car elle contient les cinq premiers livres de la Bible : Genèse, Exode, Lévitique, Livre des nombres et Deutéronome. Elle se différencie de la loi orale, Mischna, qui est d’origine rabbinique et qui est complétée par les Talmuds. La seule loi d’origine divine est donc la Torah, le reste étant des interprétations essentiellement pharisiennes.

[2] Le livre des deux principes – De la création – Jean de Lugio, édition du Rocher, 1995 (Paris).

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