La glose du Pater
La glose
Le terme de glose désigne les commentaires annexes à un texte en vue de l’expliquer plus clairement, peut aussi être considéré de façon péjorative comme un discours oiseux. Il me revient donc de veiller à demeurer dans le premier sens sans tomber dans le second. Proposer des interprétations d’un texte est à la portée du premier venu. Cependant, si on veut s’y risquer avec un texte philosophique ou religieux, il convient de faire preuve d’une grande prudence. Et si l’on veut le faire avec le texte essentiel du christianisme, la prudence ne suffit plus ; il faut y adjoindre une grande humilité et une foi à toute épreuve.
Autant dire que je suis très conscient de la difficulté de mon entreprise, ce qui explique je veuille avancer sous le contrôle de tous pour limiter les risques de dérive. Après deux ans de noviciat, je me sens prêt à me préparer pour être en mesure d’être reçu dans la tradition de l’Oraison dominicale.
Principes
Pour chacun des termes que je vais proposer je vous énoncerai ceux qui ont prévalu auparavant et j’expliquerai — avec si nécessaire des références — pourquoi j’ai choisi celui-là. Cela va donc demander du temps, mais il faut toujours avancer prudemment dans ces sujets et veiller à disposer d’appuis solides et bien repérés.
Pour me servir de base de réflexion, j’utiliserai le texte des Cathares médiévaux tel que l’indique Jean Duvernoy1, c’est-à-dire celui de Matthieu :
Notre père qui es dans les cieux,
Que soit sanctifié ton nom,
Que vienne ton règne,
Que soit faite ta volonté sur terre comme au ciel.
Donne-nous aujourd’hui notre pain au-dessus de toutes choses ;
Remets-nous nos dettes comme nous remettons aussi à nos débiteurs ;
Et ne nous fais pas entrer en épreuve mais délivre-nous du mauvais.2
Préambule
Selon le principe philologique dit de la lectio brevior, la version la plus courte d’un texte est certainement la plus fiable, car les copistes ont tendance à ajouter et non à retrancher.
Donc, la version de Luc serait sans doute la plus proche de la version initiale.
En outre, ce texte est très ancien et n’émane pas de Marc dont l’évangile est considéré comme le premier des canoniques. Cela permet à certains penseurs de considérer qu’il pourrait émaner de la source Q, l’hypothétique premier recueil des paroles de Jésus.
Bien entendu, ces supputations, pour intéressantes qu’elles soient, doivent cependant être regardées avec circonspection.
Ce qui doit nous importer est donc de respecter au plus près la version la plus ancienne et probablement la plus proche de l’original, notamment au niveau des concept qu’elle propose.
« Notre père qui es dans les cieux, que soit sanctifié ton nom
Que vienne ton règne, que soit faite ta volonté sur terre comme au ciel. »
Sources
Matthieu : Notre père qui es dans les cieux, que soit sanctifié ton nom, que vienne ton règne, que soit faite ta volonté sur terre comme au ciel.
Luc3 : Père, que soit sanctifié ton nom ; que vienne ton règne ;
Marcion4 : Père, que ton esprit saint soit sur nous et nous purifie ; que vienne ton règne ;
Didachè5 : Notre Père qui es au ciel, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.
Rituel latin de Dublin6 : Pater noster qui es in caelis Sanctificetur nomen tuum Adveniat Regnum tuum Fiat voluntas tua sicut in caelo et in terra
Rituel occitan de Lyon7 : Le nostre Paire que es els cels, sanctificatz sia lo teus nom, Avenga lo Teus Regnes E sia faita la Tua voluntatz sico el Cel e la terra.
Simone Weil8 : Notre Père celui qui est dans les cieux, soit sanctifié ton nom, vienne ton règne,soit accomplie ta volonté, pareillement au ciel et sur terre.
Yves Maris9 : Principe parfait qui es au-delà des cieux, sois glorifié, que vienne ton règne, que soit faite ta volonté dans cet univers comme au-delà des cieux.
André Chouraqui10 : Notre père des ciels, ton nom se consacre, ton royaume vient, ton vouloir se fait, comme aux ciels sur la terre aussi.
Jean-Yves Leloup11 : Abba, Notre père dans les cieux, que ton nom soit sanctifié. Que ton règne vienne. Que ta volonté soit faite, sur la terre comme au ciel
Nous avons déjà vu que ce texte se retrouve dans le Kaddish dont il est vraisemblablement inspiré.
Critique
Notre père
Comme on le voit très bien, les sources — à une exception près — utilisent le terme « Père » qui crée une relation directe mais qui introduit une vision anthropomorphique. Ce terme constitue une expression unique attribuée à Jésus (Abba), qui ne se retrouve pas ailleurs dans l’Ancien Testament mais qui émaille le Nouveau Testament, comme le montre bien Jean-Yves Leloup.
Dans la compréhension cathare, ce terme est inexact. Dieu n’est pas le père des hommes ; il est le point d’origine dont nous émanons, sans relation filiale, mais de cause à effet. Cette conception trouve sa source dans la philosophie d’Aristote12 et dans celle de Platon13. Cela transparaît dans les Évangiles avec la notion de bon et de mauvais arbre14. Le cadre qui supporterait à la rigueur la figure paternelle, est celui de la philosophie. On peut effectivement parler de la paternité d’une idée pour illustrer sa production sans la moindre relation à une création matérielle. De ce point de vue, effectivement, nous émanons de notre principe comme une idée émane du cerveau d’un penseur, mais les émanations divines sont éternelles, ce qui n’est pas le cas des productions intellectuelles, car leur origine n’est pas éternelle.
Cependant, le terme Père porte aussi une connotation spirituelle qui ne peut pas être niée et qui transparaît dans le titre de cette oraison. Donc, à condition de bien préciser que d’une part il s’agit d’une expression strictement spirituelle et en lui adjoignant le qualificatif le plus adéquat — afin d’éviter toute confusion — le mot Père me semble utilisable et justifié.
Qui es dans les cieux
Cette terminologie, également très utilisée dans les sources, me semble poser plus de problèmes qu’elle n’en résout.
D’abord, elle tend à positionner Dieu dans l’espace mondain, excepté peut-être pour Yves Maris qui précise bien « qui es au-delà des cieux ». Cependant, cette formulation est à la fois inappropriée et ridicule. Inappropriée puisque Dieu est étranger au monde qui inclut tout l’univers, comme ne le savaient pas forcément les Cathares et ceux qui les ont précédés. Ridicule car, après avoir chassé l’anthropomorphisme, il convient d’éviter les clichés de positionnement du Bien en altitude et du Mal en sous-sol, ce qui n’est qu’une vision humaine qui qualifie positivement ce qui est haut et négativement ce qui se rapproche du sol, voire qui y est enterré. On remarque qu’elle est absente de Luc, ce qui pourrait porter à croire qu’il s’agit d’un ajout dans Matthieu destiné à rendre plus magique l’état de Dieu. Cela est également un point susceptible d’intéresser les gnostiques qui ont adopté l’idée de sept cieux inférieurs (hebdomade) surmontés du ciel où siège Dieu et les puissances (ogdoade). Il semble donc plus correct et logique d’oublier cette proposition.
Que soit sanctifié ton nom
La seconde partie de la phrase est très intéressante. Là où la majorité des sources souhaitent la sanctification du nom de Dieu, une parle de le glorifier, une précise qu’il se consacre, mais les Marcionites inversent le propos en émettant le vœu que la sainteté divine nous purifie par l’intermédiaire du Saint-Esprit (le Paraclet).
C’est intéressant car en effet, comment ce qui est au principe du Bien pourrait-il se sanctifier et même se consacrer ? À la rigueur la notion de glorification pourrait s’admettre dans l’idée que nous sommes glorifiés par ce que nous sommes et ce que nous produisons comme conséquence.
Il me semble que les Marcionites sont les seuls à avoir compris ce qui était en jeu. Si nous sommes issus d’un bon principe, celui-ci est par nature déjà saint — pour autant qu’il nous semble que l’être et le bien sont des éléments dignes de cette considération. Donc, Dieu est déjà saint par nature. Ce qui peut le glorifier et lui valoir une reconnaissance de gloire, ce serait qu’il agisse et qu’il produise une conséquence aussi proche que possible de sa propre nature. Or, nous sommes dans le monde du mélange où nous subissons les influences contraires des deux principes opposés.
Pour autant, même en tant qu’émanations divines, nous ne pouvons accéder à la sanctification tant que nous resterons dans ce mélange dont la part mauvaise masque la part divine. Il faut donc purifier notre nature bonne du mal qui l’assaille afin de nous rapprocher de notre cause, le bon principe ! Mais nous en sommes incapables de nous mêmes, sinon ce serait fait depuis longtemps.
Il faut aussi tenir compte d’un point issu de la tradition judaïque, dont le Pater, s’inspire fortement, qui veut que l’on ne nomme pas Dieu. La sanctification apparaît donc alors comme une interdiction d’accès au nom de Dieu. C’est comme dans le temple où le saint des saints est sanctifié, donc inaccessible aux hommes — y compris le roi — et réservé à l’élite des prêtres.
Que vienne ton règne, que soit faite ta volonté
La toute puissance que nous attribuons à Dieu implique qu’il peut tout ce qu’il veut et qu’il veut tout ce qu’il peut15.
La venue du règne
Toutes les sources évoquent ce point, même si la meilleure traduction est royaume — c’est-à-dire espace de pouvoir — et non règne qui est ambivalent puisque désignant de façon identique, le pouvoir et son espace d’action.
Cependant, il nous faut définir quel est ce royaume — ce règne — où peut s’exercer le pouvoir divin. Bien entendu, la plupart des auteurs sont conditionnés par les anciennes écritures et notamment l’Apocalypse de Jean qui nous explique de Christ viendra établir le royaume de Dieu sur terre par le biais de la Jérusalem terrestre.
Peut-on croire à cette idée que ce monde créé par le démiurge au service du Mal puisse devenir le lieu d’élection du bon principe ? Bien évidemment non. Et surtout où serait la logique divine de venir s’établir dans la création maléfique alors qu’elle s’exerce absolument partout où il y a une once de son émanation ? L’Esprit est unique et il émane de Dieu. Il faut abandonner les images anthropomorphiques qui ont bercé notre enfance où l’on nous présentait le paradis comme un lieu clos. Le « royaume » de Dieu n’est pas un lieu mais un état. Quand nous éveillons notre part divine et que nous progressons dans notre cheminement, nous voyons apparaître un état particulier qui croît au fur et à mesure que disparaissent les prégnances mondaines que nos sens projettent à notre égo. Cet état que l’on appelle l’ataraxie ne reconnaît plus qu’une seule valeur : la Bienveillance, cet Amour absolu qui ne fixe aucune limite et dont l’universalité ne demande rien.
S’il nous faut proposer une sphère de puissance où s’exerce le pouvoir divin — ce fameux règne — c’est la Bienveillance, qui répond à tous les critères exigés, qui s’impose à notre analyse. Donc, le règne de Dieu, son royaume, n’est bien entendu pas matériel ; il n’est pas non plus un pouvoir qui s’impose, car Dieu ne nous domine pas en écrasant une volonté contraire à la nôtre. Il s’agit de la Bienveillance qui gagne à sa cause par la persuasion et la conviction et qui règne par l’harmonie et l’ataraxie. Mais, pour que la Bienveillance soit la seule référence il faut que nous soyons aptes à atteindre cet état d’ataraxie.
La volonté divine
Comme je l’ai dit précédemment, dans mon texte initial, si nous étions capable de nous sauver nous mêmes il y a bien longtemps que la Mal aurait échoué. Mais notre enfermement dans les corps de matière éteint en nous la capacité au Salut. Pour y parvenir il faut deux choses : l’éveil et la progression personnelle avec l’aide de l’exemple de Christ et le soutien du paraclet et, l’assistance divine sous le couvert de la grâce.
La volonté que nous appelons de nos vœux c’est d’offrir la grâce par laquelle Dieu choisira de nous appeler à lui, considérant que nous avons fait la plus grande part de l’effort nécessaire au recouvrement de notre état initial d’esprit saint ferme. Attention, cette grâce n’est pas dispensée au cas par cas par une divinité qui porterait un jugement sur ceux qui relèvent de son émanation. Non, la grâce est offerte sans partage et sans limite à tous mais nous ne sommes pas tous capables de nous en saisir à tout instant.
Il est possible d’illustrer cela avec l’épisode du fils prodigue16. Le fils prodigue fait le choix de quitter sa famille car il est trompé par l’attrait de ce que son héritage lui offrira de voluptés. Pour autant, la Bienveillance de son père n’a rien perdu de sa valeur. C’est son éloignement qui lui fait perdre conscience de sa réalité et qui l’amène même à croire qu’elle lui sera désormais refusée. Seulement, pour pouvoir la redécouvrir il lui faut parcourir le chemin intellectuel et physique qui est responsable de son isolement. Intellectuel, en comprenant son erreur et en découvrant qu’elle l’a réduit à un état inférieur à celui des serviteurs qui officient au service de son père. Intellectuel, en comprenant qu’il est seul responsable de sa situation, en raison de sa folie, qui l’a poussé à quitter l’environnement protecteur de sa famille, pour l’illusion qu’une vie basée sur d’autres valeurs pouvait être meilleure. Physique, en acceptant de redevenir petit, lui qui s’était cru plus grand que tous, et en retournant auprès des siens pour quémander le statut inférieur qu’il en est venu à espérer.
Proposition
« Père tout puissant »
Père comme référence philosophique
Figurant en incipit de presque tous les textes, il paraît compliqué de supprimer ce terme. Mais alors, il faut le rétablir dans son acception philosophique qui en fait la dénomination de ce qui est reconnu comme fondateur de notre essence et comme justification de notre pensée.
Tout puissant
Ce choix est à cheval sur les deux propositions du texte de Matthieu. Tout puissant s’accorde avec l’idée de « qui es dans les cieux ». En effet, cette phrase déplace clairement Dieu de ce monde et le place dans une position dominante. Mais il s’agit aussi de rappeler que Dieu veut et peut tout sur ce qui relève de lui, à savoir le Bien. De ce point de vue, il est donc tout puissant, c’est-à-dire qu’il a tout pouvoir. Il ne s’agit pas d’une approche belliqueuse, mais de la reconnaissance d’une plénitude dans l’état de principe agissant.
« Principe »
Le concept de principe
Je rejoins Yves Maris qui emploie le terme de « principe » pour illustrer cette notion de primauté et d’éternité selon la compréhension qu’en donne Aristote.
Reprenons ses théories :
- Les principes sont incorruptibles, car tout ce qui se corrompt se divise et revient aux éléments dont il est formé. Or, un principe ne serait pas un principe mais une cause s’il pouvait se diviser en éléments qui le constitueraient.
- Comment des êtres corruptibles peuvent-ils émaner de principes incorruptibles ? En effet, par lui-même l’incorruptible ne peut produire que ce qu’il est. Les êtres corruptibles sont donc des composés dont les parties peuvent provenir de plusieurs sources.
- Les principes peuvent être contraires les uns aux autres ou, être de même direction. Le bien et le mal sont des principes contraires ; l’être et le un sont des principes de même direction.
- Un principe ne peut pas être à la fois son propre contraire, mais il peut être le contraire d’un autre.
Mais les principes ne sont pas identiques en nature. Le bon principe est la manifestation suprême de l’être en tant qu’être, en cela qu’il est à l’origine la plus haute de tout ce qui relève de sa nature et qui lui est propre : l’Être en tant que ce qui est17. Aristote nous dit aussi que le principe n’est pas divisible et qu’il n’est pas accessible à la contradiction ni à l’opposition. Il faut donc admettre un principe différent pour toutes les choses premières opposables. Dieu, en tant que début de tout ce qui est, est donc principe. Il est principe du bien qui est incorruptible. En tant que principe, Dieu ne peut produire quoi que ce soit qui soit contraire à l’état d’être. Donc, le mal qui est le contraire du bien, ne peut être la conséquence de l’être en soi qu’est le principe du bien. De même si Dieu qui est l’être en soi ne produit pas le mal, ce dernier ne peut avoir d’être en soi, ce qui revient à dire que le mal est un néant d’être.
Il est important de bien comprendre deux choses : ce qui est ne peut pas devenir du non être et ce qui n’est pas ne peut pas devenir de l’être ; de même ce qui est, est dans le sens permanent du terme. Pour simplifier, on ne peut pas dire qu’il était ou qu’il sera, mais uniquement qu’il est. Le bon principe est et ce qui émane de lui est également. Alors que le mauvais principe n’est pas et ce qu’il crée n’est pas non plus, c’est-à-dire que ne disposant pas de l’Être, il ne peut disposer de la permanence. Je voudrais vous citer ici la remarque de Louis Lavelle à propos de l’Être selon Parménide : « Il y a dans la seule énonciation du mot être une sorte d’exigence implacable et d’invincible nécessité. Car ce seul mot suffit à poser l’objet qu’il désigne, à montrer qu’il y a quelque chose, ne serait-ce que le mot lui-même, et à exclure le rien.18 »
La nature du principe divin
Donc, le terme principe s’applique parfaitement à notre compréhension de la divinité. Il convient d’en définir la nature. Yves Maris propose « principe parfait », mais je trouve ce terme un peu redondant. En effet, la notion de perfection va de soi pour ce qui est principiel puisque nous venons d’admettre qu’un principe ne tolère aucune division imaginable ni rien d’opposable à lui même. Par contre, la nature du principe est nécessaire à préciser puisque nous savons que des principes opposés existent. Celui auquel nous voulons nous référer est celui dont relève le Bien absolu et qui ne dispense que du Bien, c’est-à-dire la Bienveillance (Amour absolu).
Sa nature est bonne, ainsi que le rappelle Jésus dans l’épisode de Marc X, 17-18 : « Comme il se mettait en chemin, quelqu’un accourut, tomba à genoux devant lui et lui demanda : Bon maître, que faire pour hériter de la vie éternelle ? Jésus lui dit : Pourquoi me dis-tu bon ? Personne n’est bon, que Dieu seul. » Cette remarque confirme le caractère unique, donc principiel de Dieu et sa nature de bonté absolue. Il me semble donc pertinent de préciser les deux. Mais peut-être pouvons-nous faire coup triple.
« des esprits saints »
Notre relation au bon principe
En effet, il manque une chose, même si elle n’apparaît pas dans toutes les sources. C’est une chose de distinguer Dieu en le qualifiant de bon principe, une autre est de nous situer par rapport à lui. C’est la fonction du pronom personnel « notre » qui apparaît dans la majorité des sources.
Là encore, je vois un risque de mauvaise compréhension. Ce pronom possessif peut induire en erreur en laissant entendre que nous considérons Dieu comme notre propriété. En effet, ce qu’il faut comprendre c’est notre lien de relation en tant qu’émanation consubstantielle. C’est pour cela qu’était utilisé conjointement le mot « Père ».
En l’absence de ce dernier il convient de rétablir ce rapport en complétant la proposition par quelque chose qui précise notre lien relationnel. Je propose de rappeler clairement qu’il s’agit d’une émanation consubstantielle et non d’une création. L’émanation est de même substance mais par de même nature puisqu’elle n’est pas principielle. En tant que conséquence elle dispose néanmoins des mêmes qualifications.
Mais il faut préciser qui émane du Père. Le simple fait de le décrire et de dire que nous émanons de lui est peut-être insuffisant. En fait il faut retenir qu’il est au-dessus de tout, fondateur de notre essence, principiel c’est-à-dire incorruptible et unique et qu’émane de lui ce qui le caractérise : les esprits saints, c’est-à-dire toute la « création » issue du Bien. Cela permet également de mettre en avant l’humilité nécessaire ; en effet, contrairement à d’autres courants religieux, nous considérons que toutes les émanations divines sont égales entre elles face à Dieu.
« Ta volonté agit sur tout le Bien »
Le pouvoir et la volonté
Le règne et le royaume sont, à mon avis, des notions héritées du judéo-christianisme, que l’on retrouve notamment dans l’Apocalypse. Ces mots portent en eux l’idée d’une relation de pouvoir, donc d’un assujettissement de l’un à l’autre. Ce n’est pas ainsi que je vois l’action de Dieu sur ce qui relève de sa substance. De même que des parents ont pour leurs enfants une relation basée sur l’affection et l’amour et non sur la domination, Dieu ne peut vouloir régner et établir un royaume mondain. Comme je l’ai expliqué plus haut, il me semble utile de mettre en avant l’omnipotence divine dans son domaine, le Bien. Comme j’ai évoqué son pouvoir en précisant : tout puissant à la ligne précédente, il convient de préciser sa volonté. En indiquant plus haut qu’il est le principe des esprits saints, c’est-à-dire de l’émanation consubstantielle qu’il représente, je précise maintenant que son action volontaire est totale dans ce domaine.
Le domaine d’action
Même si nous exprimons notre prière de notre exil, nous devons rappeler que dans le Bien, il n’y a aucune limite à l’action divine qui touche tout autant les esprit saints tombés que ceux demeurés fermes à ses côtés.
« Ton Saint-Esprit nous guide comme il te plaît »
L’acteur sur site
Préciser comment Dieu agit de princeps est une chose, mais sachant qu’il est étranger à ce monde, il convient de s’interroger sur la façon dont ce pouvoir et cette volonté s’exercent. Or, les évangiles nous donnent la réponse : … « et je prierai le Père, et il vous donnera un autre paraclet qui soit pour toujours avec vous, l’Esprit de vérité que le monde ne peut recevoir parce qu’il ne le voit ni ne le connaît. » (Jean 14, 16-17).
Cette phrase nous donne toutes les clés. Christ annonce son remplacement par un autre paraclet (consolateur, éducateur). Cela nous dit donc qu’il n’est lui-même qu’un paraclet et non un Dieu comme tente de le faire croire le concept de sainte Trinité. Ce nouveau paraclet sera avec nous de façon définitive lui. Il est l’Esprit de vérité, que nous appelons aussi Saint-Esprit pour le distinguer de nous et de ceux restés dans l’espace spirituel que nous nommons les esprits saints. Enfin, contrairement à Christ que certains prétendent avoir vu sous une forme charnelle, le Saint-Esprit reste à l’écart d’un monde qui ne peut le connaître puisqu’il faut avoir au moins été éveillé pour commencer à l’entrevoir spirituellement. C’est donc lui qui accompagne les croyants, au quotidien, dans leur avancement spirituel et qui les soutient quand ils trébuchent. Mais il ne dispense pas la grâce qui reste du ressort exclusif de Dieu.
Acteur sous contrôle
Il faut garder à l’esprit que ce paraclet n’agit pas en toute indépendance, mais sous le pouvoir et la volonté de Dieu. Son rôle est celui d’un guide chargé de nous conduire à être en harmonie avec notre origine pour être en capacité d’être réceptifs à sa grâce.
« Pour que ta grâce puisse nous être accordée. »
La grâce
Dans une prière adressée à notre origine c’est donc bien cette grâce que nous souhaitons disponible à notre usage. En outre, cette grâce est issue à la fois de la volonté et du pouvoir divin selon le principe déjà évoqué qui veut que Dieu peut tout ce qu’il veut et veut tout ce qu’il peut. Encore une fois, une prière n’a pas pour objet de débiter des lapalissades. Émettre le vœu de voir se réaliser la puissance et la volonté divine revient à les mettre en doute. Or, nous sommes bien placés pour savoir qu’ils sont une évidence liée à la nature même du bon principe. C’est peut-être en ce sens que Luc et Marcion se contentent de la phrase sur le règne sans y adjoindre la volonté. En effet, il est possible que pour eux, le règne soit l’état de grâce permanent et absolu. Mais pour autant ce pouvoir et cette volonté agissent, prouvant ainsi la toute puissance de Dieu sur ce qui relève de sa sphère d’influence : le Bien. J’ai donc choisi de les rappeler, pour mémoire en quelque sorte en montrant qu’ils sont à la base de l’action qui suit.
Motivation de la formulation
Elle a l’avantage d’être la plus succincte possible, respectueuse de toutes les formes de compréhension et permettant d’exprimer simplement et clairement ce qui est par ailleurs assez compliqué à définir, comme vous l’avez peut-être remarqué ci-dessus. En outre, elle contient les termes essentiels : puissance = pouvoir, principe, esprits saints, volonté, Bien, Saint-Esprit, guider, grâce.
La précision « esprits saints » rappelle que si la grâce nous concerne c’est que nous sommes en état de la recevoir, c’est-à-dire purifiés par notre attitude et sous la guidance spirituelle du Saint-Esprit.
Mais, cette grâce n’est pas sans action sur nous qui sommes tombés. En recréant la séparation avec ce qui relève du mondain, elle nous remet dans l’état unitaire antérieur de partie intégrante du bon principe. Nous redevenons cette part émanée de lui.
C’est donc bien la demande ultime qui nous libèrera enfin et définitivement de la prison où nous sommes détenus depuis de si nombreuses vies terrestres.
« Donne-nous aujourd’hui notre pain au-dessus de toutes choses. »
Sources
Matthieu : Donne-nous aujourd’hui notre pain de la journée
Luc3 : donne-nous chaque jour notre pain de la journée
Marcion4 : donne-nous chaque jour ton pain surnaturel
Didachè5 : Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour
Rituel latin de Dublin6 : Panem nostrum supersubstantialem da nobis hodie
Rituel occitan de Lyon7 : E dona a nos uei lo nostre pan qui es sobre tota causa
Simone Weil8 : Notre pain, celui qui est surnaturel, donne-le-nous aujourd’hui.
Yves Maris9 : Donne-moi aujourd’hui ma part de pain spirituel
André Chouraqui10 : Donne-nous aujourd’hui notre part de pain
Jean-Yves Leloup11 : Donne-nous aujourd’hui La nourriture nécessaire à notre Vie
Critique
« Donne-nous… »
Une assistance active
Excepté Y. Maris qui personnalise la demande, les auteurs sont unanimes sur la forme et le fond. Ce qui nous manque ne peut venir de nous mais de Dieu. Ce sentiment de la nécessité d’une aide extérieure pour entamer le chemin et d’un soutien permanent pour y demeurer est fondamental dans le Catharisme. On le retrouve dans l’entrée des sympathisants dans l’état de croyant. En effet, le Catharisme commence toujours par un enseignement, sous forme de prêches, qui met l’auditeur en état de comprendre les choses par la raison et qui lui permet de les accepter comme telles. Ensuite, seulement, pourra se manifester l’éveil qui l’amènera à la foi. Et, pareillement, l’altérité est nécessaire et permanente tout au long du cheminement afin de conserver une aide extérieure pour éviter de dévier de la route à suivre.
Une assistance collective
C’est un point qui me semble important. On ne peut pas demander quoi que ce soit à Dieu d’une façon qui puisse sembler égoïste. C’est également important de rappeler que nous ne sommes pas des individualités distinctes mais un tout morcelé ; un esprit unique éparpillé dans le mélange. Le salut concerne donc l’ensemble de cet esprit unique, même si en raison de circonstances particulières, certaines parties mettront plus de temps à y accéder.
Il me semble donc essentiel de conserver la forme qui rappelle qui agit sur nous et le caractère collectif dont nous ne sommes qu’une part, artificiellement détachée.
« …Aujourd’hui… »
La compréhension de ce terme est pour beaucoup dans la compréhension globale de la phrase.
Une assistance permanente
Matthieu n’hésite pas à faire un quasi pléonasme (aujourd’hui… de la journée). Luc améliore la phrase en créant un futur (chaque jour). La Didachè est conforme à Matthieu. Les autres auteurs évitent cette répétition, mais à l’exception notable de Marcion, ils se réfèrent néanmoins au jour dit. Seul Marcion reprend l’idée de Luc en signalant que cet apport est durable dans le temps. Certes on pourrait dire que cette prière étant répétée plusieurs fois par jour, le futur suggéré n’est pas nécessaire. Cependant, il montre bien la permanence de la demande faite à Dieu. Ce n’est pas une aide pour aujourd’hui que nous demandons, mais une aide quotidienne tant que durera notre vie.
Ce que nous demandons pour surmonter notre enfermement en ce monde, c’est de boire à la source vive de façon permanente. C’est ainsi, et ainsi seulement, que nous pouvons espérer réussir à lâcher prise avec ce monde maléfique. Donc, il me semble important que transparaisse dans le texte la notion de demande durable et permanente. Pour autant, il convient qu’elle marque également les limites de ce monde, c’est-à-dire le temps. Donc, l’emploi d’un terme qui caractérise le temps me semble essentiel.
L’apport que nous demandons à Dieu ne peut être ponctuel, comme pourrait le suggérer le terme aujourd’hui. C’est bien de façon permanente que nous avons besoin de l’apport spirituel de Dieu, directement ou indirectement par notre propre travail spirituel. Le tout constitue ce qu’était le pain et ce qu’est la nourriture, la nécessité pour maintenir la vie.
« …notre pain au-dessus de toutes choses. »
Qu’est-ce que le pain ?
Le pain est l’aliment de base au premier siècle et même au Moyen Âge. On comprend donc bien la place qu’il occupe dans cette prière. C’est la métaphore de ce qui est essentiel à la vie. Or, pour un Chrétien, la vie c’est Christ, comme il le dit lui-même : « Jésus lui [à Thomas] dit : Je suis le chemin, la vérité et la vie. Personne ne vient au Père que par moi19. »
Impossible de se tromper, le pain est l’élément essentiel pour celui qui veut revenir au Père. Le pain c’est Christ, c’est la révélation, la part la plus profonde du message, « le corps » du cheminement qui nous ramènera à Dieu. C’est en ce sens qu’il faut comprendre la phrase de la cène : « Et prenant du pain, il rendit grâces, le rompit, le donna et dit : C’est mon corps, qui est donné pour vous ; faites cela en mémoire de moi.20»
Il nous invite ainsi à le suivre, c’est-à-dire à suivre son exemple et son propre cheminement. Le pain est la structure du message (l’Amour), son corps, alors que le vin est ce qui donne la force, ce qui coule en nous, sa parole qui nous vivifie comme le sang vivifie le corps. En fait, si l’on s’éloigne de la compréhension partielle qu’en ont eu les hommes, ce n’est pas seulement de pain qu’il faut parler mais de la conjugaison du corps et du sang, du pain et du vin, de la Parole divine et de l’Amour.
au-dessus de toutes choses
Le terme, supersubstantiel fait toujours couler beaucoup d’encre, mais en suivant ce que je viens de dire, il est clair qu’il s’agit d’une mise en garde aux hommes pour qu’ils ne tombent pas dans la lecture primitive du texte. Ce pain n’a rien à voir avec l’aliment basique de l’époque, mais il est d’une autre nature. Malheureusement, comme on le voit dans Luc, les hommes ont du mal à se détacher de leur gangue mondaine, et ils restent terre à terre en demandant du pain comme ils demanderaient un repas quotidien, ce qui était la norme de l’époque.
Maintenant, nous devons faire comme les Cathares et proposer une lecture spirituelle et non pas mondaine en nous détachant de l’aliment précis proposé et en signalant sa vraie nature.
Proposition
« Donne-nous chaque jour… »
Maintenir un rapport direct, même au plus profond de la nuit
Cette formulation vise deux objectifs : préciser notre fragilité qui nous rend dépendants de la grâce divine, et confirmer que Dieu est tout puissant sur ce qui relève de son émanation. Préciser que ce besoin est permanent tant que nous sommes prisonniers du Mal.
« … la nourriture que ta parole et ton Amour procurent »
La nourriture
Ce qui me convient dans ce terme est son sens général sur le plan mondain et son sens précis sur le plan intellectuel. La nourriture ne se réfère à aucun aliment précis. On le voit, l’usage du pain s’est extrêmement réduit à notre époque, au profit de la viande et du lait par exemple. Se référer au pain reviendrait à amoindrir la puissance du message, car Christ s’il s’exprimait de nos jours, ne l’utiliserait pas. Par contre, le terme nourriture est généraliste mais désigne clairement ce qui donne vie au corps et l’entretient. On retrouve donc bien ici la validité du choix du pain du premier siècle jusqu’au Moyen Âge. Mieux encore, nourriture permet de réunir la pain et le vin, comme le fit Jésus quand il s’exprima devant les disciples. La nourriture est donc bien ce qui construit le corps et ce qui le fait progresser dans son développement.
Que ta Parole et ton Amour procurent
Pour éviter tout risque de glissement mental, comme pourrait l’induire un terme comme spirituel, il faut accoler au terme de nourriture une expression qui la qualifie clairement et qui montre son objet. En précisant les deux termes que sont la Parole et l’Amour, nous rétablissons le message de Christ. Certes, cette nourriture spirituelle que nous demandons à Dieu, il ne nous la donnera pas lui-même, mais c’est le paraclet que nous a annoncé Jésus qui le fera.
« Remets-nous nos dettes comme nous remettons aussi à nos débiteurs.
Et ne nous fais pas entrer en épreuve mais délivre-nous du mauvais. »
Sources
Matthieu : remets-nous nos dettes comme nous remettons aussi à nos débiteurs. Et ne nous fais pas entrer en épreuve mais délivre-nous du mauvais.
Luc3 : et remets-nous nos péchés, car nous remettons nous aussi à tous ceux qui nous doivent, et ne nous fais pas entrer en épreuve.
Marcion4 : remets-nous nos péchés comme nous remettons aussi à nos débiteurs et ne nous laisse pas succomber à la tentation.
Didachè5 : Pardonne-nous notre offense, comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensé, et ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du mal.
Rituel latin de Dublin6 : Et dimitte nobis debita nostra sicut et nos dimisimus debitoribus nostris Et ne nos inducas in temptationem sed libera nos a malo
Rituel occitan de Lyon7 : E perdona a nos los nostres deutes, aisi co nos perdonam als nostres deutos. E no nos amenesen tentatio mas deliura nos de mal.
Simone Weil8 :Et remets-nous nos dettes, de même que nous avons aussi remis à nos débiteurs. Et ne nous jette pas dans l’épreuve, mais protège-nous du mal.
Yves Maris9 : remets-moi sur la voie qui mène vers toi. Ne me laisse pas dans l’épreuve, mais délivre-moi du Principe mauvais.
André Chouraqui10 : Remets-nous nos dettes, puisque nous les remettons à nos débiteurs. Ne nous fais pas pénétrer dans l’épreuve, mais délivre-nous du criminel.
Jean-Yves Leloup11 : Libère-nous de nos dettes comme nous-même libérons nos débiteurs. Ne nous laisse pas emporter par l’épreuve, libère-nous du pervers.
Critique
« Remets-nous… »
J’ai trouvé que ce verbe était à la fois une traduction littérale du verbe dimitte, mais qu’il porte également un sens spirituel car il respecte l’idée que nous nous faisons des relations dans un cadre de Bienveillance. En effet, si nous mettons la Bienveillance au-dessus de tout, il serait impensable d’imaginer que Dieu n’en soit pas le principe et qu’il n’en use pas, selon la théorie des principes déjà évoquée.
Un sens littéral
Pour ce qui est de la traduction, le Gaffiot®propose plusieurs compréhensions. Tout d’abord le fait de disperser quelque chose, de le répandre ici et là, comme par exemple pour un message. Puis le fait de le dissoudre, comme pour une armée ou une assemblée, avec comme extension le fait de disperser une troupe en unités plus petites. Enfin, deux sens m’ont particulièrement intéressé. Le premier est l’idée de renvoyer quelqu’un sain et sauf, c’est-à-dire de ne lui faire aucun tort ni de lui laisser aucune séquelle. L’autre était de renoncer à son droit, d’abandonner les charges et les poursuites, ce qui donne dans le sens chrétien, remettre les dettes, pardonner les péchés.
Un sens spirituel
Je reviens encore sur la parabole du fils prodigue dans laquelle on observe le comportement du père lors du retour du fils venu quémander une place de serviteur en compensation de sa faute et en raison de l’extrême dénuement dans lequel son erreur l’a conduit. Le père ne considère qu’une chose : le fils qu’il pensait perdu revient, donc il le rétablit dans son état antérieur sans rien demander et sans rien retirer. Cela pose d’ailleurs un problème au fils demeuré auprès de lui. C’est exactement ce que nous savons pouvoir obtenir de Dieu. Dieu, en tant que principe du Bien, est également origine absolue de la Bienveillance. Logiquement, il ne peut y avoir de sa part la moindre possibilité d’altération de cette Bienveillance dans sa relation à nous, quoi que nous ayons fait. Du moment où nous faisons notre part de cheminement, nous nous mettons à la portée de sa Bienveillance dans son absolue totalité, car Dieu peut tout ce qu’il veut et veut tout ce qu’il peut. Mais comme ce pouvoir ne s’exerce que dans le Bien, nous devons revenir tant soit peu vers le Bien pour que sa Bienveillance soit possible.
De cela il découle logiquement que Dieu ne peut ni ne veut pardonner, car cela implique de sa part d’avoir pris en compte la réalité d’une faute commise. Le pardon laisse une trace de la faute initiale, comme un délit amnistié laisse l’empreinte d’avoir existé un jour. Là il s’agit de faire comme si la faute n’avait jamais existée. C’est un peu comme dans un prêt sur gage. Une fois le prêt remboursé, le prêteur rend l’objet ayant servi à cautionner l’emprunt au débiteur de telle sorte que ce dernier recouvre sa situation antérieure sans que rien ne vienne marquer qu’elle ait été perturbée à un moment ou un autre. Donc, Dieu nous remet également ce qui avait altéré un temps notre relation, de façon à ce que cette dernière retrouve la totale limpidité de son état antérieur. On retrouve également cette idée dans le passage de Jean 1, 29 : « Le lendemain il regarde venir Jésus et il dit : Voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. ». Cette terminologie est reprise dans la liturgie catholique avec le mot latin tollis. Il s’agit bien de déplacer, de retirer sans laisser de trace.
« … nos dettes… »
Nos dettes, nos péchés, nos offenses ; à l’exception notable de Yves Maris qui demande la remise sur le bon chemin, tous les auteurs s’attachent à définir ce qui est remis.
La nature du problème
Il me semble important de définir exactement de quoi nous voulons parler. En quoi avons-nous modifié la relation de Bienveillance absolue qui nous fait cheminer sur la voie qui mène à Dieu ? La réponse me semble être : en tout ! En effet, du fait de notre emprisonnement charnel, il ne se passe pas un moment que nous ne commettions un acte, une pensée, une remarque qui ne soit entachée d’imperfection. C’est notre situation de mélange qui nous l’impose. Sinon, nous pourrions rechercher une position de confort dans ce monde où nous pourrions demeurer sereinement. Les Bons-Chrétiens le savaient et le disaient. Eux seuls, qui avaient la connaissance du Bien pouvaient pécher et ils péchaient au point de dire qu’ils étaient les plus grand pécheurs existant.
Donc, il ne s’agit pas seulement de péchés au sens habituel du terme, car cela limiterait nos fautes à une liste définie qui écarterait de la situation fautive tout ce qui n’y figure pas. Cela vaut également pour le terme dette qui circonscrit ce qui relève à ce qui est dû. Pareil pour offenses. L’offense concerne un jugement moral sur ce qui est inacceptable dans le respect dû à autrui de tous les autres comportements qui sont acceptables.
Non, notre problème est que nous n’atteignons jamais le but visé, la Bienveillance, parce que notre nature de mélange, dans laquelle le Bien est en nous supplanté par le Mal, nous fait manquer sans cesse la cible dans tout ce que nous faisons, disons, pensons espérons.
C’est bien cela que nous demandons à Dieu de ne pas nous compter comme dette.
« … comme nous remettons aussi à nos débiteurs. »
Un point essentiel !
Comme je viens de le dire, le fait que Dieu nous remette nos manquements, et même nos fautes, est sans discussion, car c’est sa nature, pour peu que nous entrions dans son champ d’action. Donc, cette phrase n’est pas importante pour cela, mais elle l’est pour les moyens que nous mettons en œuvre afin d’entrer dans le cheminement qui nous conduira au salut.
C’est l’exacte compréhension de la parabole du débiteur impitoyable (Matth. 18, 23-35). En effet, comment pourrions-nous imaginer être sur le cheminement qui mène au salut si nous conservons un rapport de créancier avec nos frères d’esprit ? Plus encore, nous ne pouvons même pas envisager de demander la remise de nos manquements si nous ne nous sommes pas déjà purifiés en abandonnant toute charge envers quiconque pourrait éventuellement être notre débiteur. Car alors nous serions en faute envers l’Esprit. En cela la formulation de Simone Weil me semble la plus juste et mérite même d’être amplifiée pour plus de clarté.
Une formulation apaisée
La formulation choisie est inappropriée car elle maintient les éléments négatifs de remise de dette et de rapport hiérarchique entre créancier et débiteur. Il faut donc trouver des termes qui, comme dans la première partie, permettent de gommer ces éléments qui s’éloignent trop de la Bienveillance. Il faut aussi que cela ait l’allure d’un comportement allant de soi et non d’un effort. D’où la justification d’une formulation qui s’approche du concept de l’évidence plus que de l’affirmation venant renforcer la demande initiale.
« Et ne nous fais pas entrer en épreuve… »
Une aberration !
À l’exception, forcément notable, de Marcion, Yves Maris et de Jean-Yves Leloup, toutes les sources sont tombées dans le panneau de tenir Dieu pour responsable de notre sort, voire de l’imaginer assez pervers pour nous y maintenir.
Comment imaginer, si l’on considère Dieu comme étant le principe parfait du Bien, qu’il soit possible de quoi que ce soit d’inférieur à cette perfection principielle ? Il faut en finir avec cette approche schizophrène d’un Dieu dispensant le bien et le mal avec un égal talent. De même, à vouloir éviter le panneau du judaïsme, il ne faut tomber dans celui du judéo-christianisme qui, incapable d’imaginer Dieu dans un seul rôle, s’est senti obligé de rejeter ses fautes sur l’homme qui n’en peut mais. L’homme, inconscient de ce qui le dépasse largement n’est pas plus responsable que Dieu du mal dont il est surtout victime.
C’est pourquoi on doit rejeter cette phraséologie victimaire qui nous permet de nous complaire dans un malheur dont nous hésitons à savoir s’il nous vient du péché originel ou de Dieu, mais dont nous voulons croire que l’endurer nous garantira le salut à tout coup.
Un sens à imaginer
Marcion, Yves Maris et Jean-Yves Leloup, s’il ont bien compris que Dieu ne nous veut pas de mal, on cédé néanmoins à l’idée qu’il pouvait nous y soustraire. Or, nous le savons, Dieu n’a pas d’action sur ce monde puisqu’il n’est pas du monde et qu’il n’a aucun mal à opposer au Mal. Tout ce que nous savons pouvoir attendre de lui, c’est qu’il nous aide à supporter les difficultés en nous soutenant dans notre action. C’est un peu comme avec une bicyclette à assistance électrique : si vous ne pédalez pas, elle n’avance pas ; si vous pédalez, votre effort est largement soutenu par le moteur et vous forcez moins.
C’est cela que nous pouvons demander à Dieu, même si nous savons que cela nous est forcément acquis de sa part car le berger n’abandonne pas la centième brebis.
L’épreuve
S’il me semble juste d’employer le mot épreuve, car c’est bien ce que nous sommes amené à vivre en ce monde depuis que nous y sommes tombés, il est tout aussi évident que nous n’y sommes pas entrés mais que nous y avons été précipités contre notre gré. En fait, ce qu’il faut exprimer c’est l’idée de l’épreuve qui est la nôtre, sans que nous sachions quand nous en sortirons, même si nous sommes convaincus d’en sortir un jour.
Ce n’est donc pas le problème d’être entrés dans cette épreuve que nous demandons à Dieu de résoudre, mais de nous aider dans nos efforts pour en sortir. Car tel est bien le problème ; comme nous l’avons dit plus haut, ce n’est pas Dieu qui nous évitera de retomber dans une nouvelle incarnation, comme Sisyphe voyant son rocher rouler au bas de la montagne qu’il croyait avoir enfin gravie. C’est à nous d’œuvrer, avec le soutien de Dieu, par l’intermédiaire du Saint-Esprit paraclet, mais à la seule force de notre engagement spirituel et de notre cheminement respectueux de la Bienveillance.
C’est pourquoi il me semble impossible de conserver le verbe entrer, puisque la question est exactement à l’opposé. Mais comme nous ne sommes pas assurés de sortir de l’épreuve en cette vie mondaine, il faut nous garder de toute vanité et de toute certitude présomptueuse. Avançons prudemment, pas à pas, et demandons ce qui nous est nécessaire ici et maintenant : l’aide de Dieu. Même si nous subissons une épreuve, ce terme est un peu restrictif à mes yeux.
« … mais délivre-nous du mauvais. »
mais
Ce qui me gêne dans ce terme c’est qu’il résonne comme une injonction, surtout après la remarque précédente. À croire que l’homme intime à Dieu l’ordre de ne pas agir en mal (en le faisant « entrer en épreuve »), mais qu’en outre il lui rappelle ses obligations.
Bien entendu, cela n’est pas possible. Même si ce n’était pas l’intention des rédacteurs initiaux, il est impossible de laisser subsister une telle supposition. En fait, compte tenu de ce que nous avons dit plus haut, c’est-à-dire que l’homme admet que sa part est première et que l’aide de Dieu vient en soutien, ce qu’il faut viser ici c’est une expression qui marque le but et non le moyen.
délivre-nous
Oui, l’objectif est bien là. Nous recherchons la délivrance et nous ne pouvons y parvenir par notre seul effort. Mais au lieu de demander cela comme s’il s’agissait d’une injonction immédiate, il me semble plus approprié de le faire en le signalant comme un objectif à terme.
du mauvais
Les termes ne manquent pas pour désigner l’ennemi. Celui-là est peut-être un peu trop vague. Le mauvais quoi ? Je pense qu’il serait peut-être bon d’être un peu plus précis, car nous sommes victimes d’un maître et de son disciple en quelque sorte. En effet, si c’est bien le démiurge (le diable si l’on veut) qui nous a enfermé ici-bas, il l’a fait sur l’injonction de son maître, le principe du Mal. C’est donc lui aussi qu’il nous faut fuir.
Proposition
« Remets-nous nos fautes et nos manquements… »
Maintenir un rapport direct, même au plus profond de la nuit
Cette formulation vise deux objectifs : préciser notre fragilité qui nous rend dépendants de la grâce divine, et confirmer que Dieu est tout puissant sur ce qui relève de son émanation.
Comme toujours l’adresse est directe, même si nous savons que la relation ne l’est pas, Dieu étant étranger et inconnu en ce monde. C’est donc le Saint-Esprit paraclet qui nous sert d’intermédiaire. Elle s’exprime au pluriel et c’est très important. Nous ne demandons pas à titre individuel et égoïste, mais au nom de tous ceux qui sont avec nous. La Bienveillance ne peut être recherchée dans l’égoïsme.
Comme pour l’ensemble de cette prière, les demandes sont en fait une sorte de récitation de ce que nous savons déjà. En effet, Dieu ne va pas réagir à nos demandes puisque, du fait même de sa nature, il connaît nos besoins et les a déjà anticipé de tous temps. Tout cela vise à nous donner un moyen simple de ressasser ces évidences afin de nous mettre dans un état favorisant notre cheminement. Je dirais que l’on peut comparer cette prière au cri que pousse celui qui réalise un effort important (han !). Le fait de ahaner, accompagne l’effort que fait celui qui est à la limite de ses capacités. De même, nous émettons cette prière pour accompagner notre effort et aussi pour nous donner du courage. Cela nous donne l’illusion d’un rapport direct dont nous savons cependant qu’il est impossible dans cette matière.
Rappeler l’évidence de l’effacement de toute marque négative
Pour rester au plus près de l’esprit et respecter les critères doctrinaux de la Bienveillance, il convient d’employer des termes les plus neutres possibles.
Ensuite, « fautes » et « manquements » me semblent être les termes les mieux appropriés. En effet, si j’ai choisi de dissocier deux termes au lieu de n’en employer qu’un, c’est pour signifier que rien n’est inaccessible à la Bienveillance divine. Les cathares signifiaient qu’il y avait deux formes de péchés et que, si le premier pouvait être remis au nom de Dieu, le second lui, ne pouvait l’être que par Dieu lui-même en raison de sa gravité. Pour expliquer cela ils se référaient à Matthieu (XII, 31) : « C’est pourquoi je vous dis que tout péché ou blasphème sera remis aux hommes, mais le blasphème contre l’Esprit ne sera pas remis. » Cela ne signifie pas que certaines fautes sont inaccessible à la grâce divine, mais que nous devons comprendre qu’il y a les manquements, qui sont inhérent au mélange qui nous maintient prisonniers et, les fautes qui relèvent de notre refus de reconnaître notre état d’esprits saints. Or, si nous refusons de reconnaître l’Esprit dont nous sommes partie, nous sommes inaccessibles à la grâce et personne n’y peut rien. C’est une faute et nous avons de nombreuses occasions de la commettre. Par contre, quand nous sommes croyants et que nous commettons des écarts de conduite, des manquements à la façon dont nous devrions agir, notre éloignement n’en est pas affecté. C’est pour cela que j’ai voulu préciser ces points.
« … comme pour nos frères nous en faisons autant, … »
Une démarche préalable
Contrairement à la parabole, nous ne demandons pas à être absous alors que nous serions toujours porteurs de la tare d’être les créanciers de nos frères. C’est un élément récurrent dans le Catharisme qui veut qu’un acte rituel soit exécuté par une personne digne, sous peine de disqualifier l’acte. C’est ainsi que l’on voit régulièrement des Cathares se faire re-Consoler par un Bon-Chrétien dès qu’un doute apparaît sur la pureté de celui qui leur a donné le sacrement précédent. De la même façon, il me semble plus qu’important de signaler que nous avons apuré toute source potentielle de rapport négatif avec nos égaux dans l’Esprit. Ce corps de phrase sonne comme un rappel et non comme une revendication égotique. Nous demandons la remise de nos fautes et manquements parce que cela est un comportement naturel pour nous.
Un rappel des fondamentaux
Celui qui prie ainsi affirme sa connaissance de ce point essentiel qu’il ne peut y avoir de début de cheminement si l’on conserve, comme un boulet au pied, un reste de contentieux avec quiconque. On le voit très souvent dans les témoignages, celui qui veut entrer en noviciat doit commencer par apurer ses dettes — fusse à son détriment exclusif — pour être en mesure d’espérer quoi que ce soit. C’est donc bien notre démarche d’abandon de tout contentieux qui doit être préalable à quelque demande que ce soit.
Là encore, il s’agit bien d’un rappel que nous nous faisons à nous même. Comme cela nous est précisé dans Matthieu (5, 23-24), si l’on s’apprête à faire une offrande mais que l’on se souvient d’un contentieux pendant avec un frère, il faut abandonner la cérémonie et aller d’abord se réconcilier avant de revenir la terminer.
« … Et soutiens-nous dans les difficultés… »
Une demande modeste et limitée à nos capacités réelles
Cette proposition de rédaction vise à préserver le fond, à savoir que dans notre état de grands pécheurs, nous ne demandons rien de définitif à Dieu, car nous savons que nous n’en sommes pas dignes, vu qu’il nous est impossible de faire le bien que nous voudrions faire et qu’il nous est tout aussi impossible d’éviter de faire le mal que nous ne voudrions pas faire. C’est à la fois le sens du terme soutiens, qui indique une assistance forcément limitée, et de difficultésqui précise bien qu’il s’agit de tout ce qui nous pousse à la faute.
C’est donc humblement que nous sollicitons, non pas l’aide de Dieu pour réaliser notre objectif, mais seulement son soutien — sous la forme qu’il voudra bien lui donner — et plein de l’espoir que ce soutien nous permettra de surmonter notre mondanité, au profit de ce projet qui nous habite tout entier : revenir auprès de celui dont nous procédons et en finir enfin avec cet enfer.
« … afin de nous délivrer du Mauvais. »
afin
Nous sommes, avec ce terme, dans le fonds. En effet, si notre demande de soutien est modeste car nous savons que le travail nous incombe, le salut, lui, relève de Dieu et de lui seul. Ce petit mot est donc le rappel que nous le savons et que ne nous illusionnons pas sur nos compétences.
En reconnaissant cela nous manifestons notre confiance en Dieu (notre foi donc) et notre patience, tout en reconnaissant la part qui relève de nous. Notre salut est assuré, certes nous n’y prenons pas de part active ; mais, bien que serviteurs inutiles, notre participation vise simplement à confirmer ce que nous sommes vraiment : des éléments séparés d’un tout unique, l’Esprit !
de nous délivrer
L’idée ici est de manifester à la fois notre confiance et notre patience. Oui, le soutien de Dieu va réussir à faire échouer le projet du Mal, mais cela peut intervenir à tout moment et nous n’en savons rien. On retrouve ici les paroles des évangiles sur l’incertitude du moment (jeunes filles à la lampe, etc.).
L’emploi de l’infinitif détache l’action de son moment. Cela peut être au présent ou au futur, nous n’en savons rien. Ce qui importe, c’est que nous savons que cela doit se produire.
du Mauvais
Je fais le choix ici de cibler l’auteur réel de notre infortune. Le démiurge m’indiffère car je sais qu’il n’agit pas de sa volonté mais sous l’influence de celui qui est avant tout et au-dessus de tout dans le Mal : le mauvais principe.
Cependant, je joue un peu sur la formulation. En conservant mauvais isolé de principe, on peut penser que je parle du démiurge, mais en y mettant une majuscule, c’est bien son maître principiel que je vise.
La doxologie finale
Sources
Didachè : Car c’est à toi qu’appartiennent la puissance et la gloire dans les siècles.
Rituel latin de Dublin : Et Quoniam Tuum est Regnum et Virtus et Gloria in Secula, Amen
Critique
Ce que je reproche à cette phrase est à la fois lié à son style et à sa nécessité.
Le style est marqué par la vision juive, je dirais presque essénienne, du rapport au sauveur. C’est un messie davidique, tout couvert de gloire et de puissance, qui est évoqué. Cela est totalement contraire à notre vision.
Comment évoquer la gloire et la toute puissance, sans autre explication, alors que tout le texte rappelle que cette gloire et cette puissance semblent contraintes dans le contexte que nous vivons ? Parler des siècles est sans objet et ridicule. L’éternité ne se compte pas en siècles !
Quelle est la nécessité de cette phrase rajoutée tardivement dans la Didachè ? Aucune, en fait je trouve même qu’elle vient amoindrir la qualité de la fin du texte. Elle rompt l’équilibre général.
Par contre, Amen me semble intéressant.
C’est un terme commun à toutes les religions dites du Livre (Judaïsme, Christianisme, Islam) qui vient appuyer une affirmation. Elle peut se traduire de diverses façons : ainsi soit-il (Septante), fiat (Vulgate), en vérité (évangiles), Dieu en qui l’on place sa confiance (tradition rabbinique), Ô Dieu exauce et réponds (Coran), etc.
Dans le Christianisme ce terme conclut les prières et affirme la foi et la certitude de la réalisation de ce qui vient d’être dit.
C’est pourquoi je trouve approprié de la rajouter en terminaison de la plus importante des prières.
Éric Delmas – 25/06/2018
Notes :
[1] La religion des cathares – Le catharisme t.1. Collection Domaine cathare – Éd. Privat 1976 (Toulouse)
[2] – Évangile selon Matthieu, VI, 9-13. La Bible – Nouveau Testament – Bibliothèque de la Pléiade – Éd. NRF Gallimard 1971 (Paris)
[3] – Évangile selon Luc, XI, 2-4. La Bible – Nouveau Testament – Bibliothèque de la Pléiade – Éd. NRF Gallimard 1971 (Paris)
[4] – Évangélion, VII, 4. Tentative de restitution par A. Wautier
[5] – La doctrine des douze apôtres (Didachè). Éd. du Cerf 1998 (Paris)
[6] – Le Rituel de Dublin in Écritures cathares – Éd. du Rocher 1995 (Monaco). Traduction et commentaires de Anne Brenon.
[7] – Le Nouveau testament, reproduction photolithographique du Manuscrit de Lyon – Éd. Slatkine reprints 1968 (Genève). Traduction de Jean Duvernoy.
[8] – Attente de Dieu – Éd. Fayard 1966 (Paris).
[9] – La résurgence cathare – Le manifeste – Éd. Le mercure dauphinois 2007 (Grenoble).
[10] – Un pacte neuf – Éd. Brépols 1997 (Paris).
[11] – Le « Notre Père » une lecture spirituelle – Éd. Albin Michel 2007 (Paris).
[12] – Métaphysique, notamment livre Γ.
[13] – Phédon.
[14] – Évangile selon Matthieu – VII, 17-18.
[15] – Voir Le livre des deux principes de Jean de Lugio (Abrégé pour servir à l’instruction des ignorants § Que Dieu ne peut pas faire le mal) in Écriture cathares op. cit.
[16] – Évangile selon Luc XV, 11-32.
[17] – Parménide est considéré comme la source de la philosophie et son poème Sur la nature ou sur l’étant constitue la première analyse de l’Être en tant qu’étant. Je m’appuie notamment sur sa traduction par Barbara Cassin au éditions du Seuil en 1998 (Paris).
[18] – Introduction à l’ontologie – Éd. Presses universitaires de France 1947 (Paris).
[19] – Évangile selon Jean : 14, 6.
[20] – Évangile selon Luc : 22, 19.