Projet 1 : maison conteneur
Pour mettre en œuvre un projet de lieu d’accueil d’une communauté évangélique et de rendez-vous de la communauté ecclésiale, nous devons envisager toutes les solutions afin de choisir la mieux adaptée au lieu et moment choisis. En effet, un tel projet demande de gros efforts en raison de son caractère innovant. Innovant puisque non vu depuis le 14e siècle en Occitanie, difficile puisque s’appuyant sur une communauté ecclésiale encore dispersée, mais exaltant par sa capacité à donner de la visibilité au catharisme à l’heure où beaucoup l’ont fantasmé, voire ridiculisé, affirmant haut et fort qu’une résurgence cathare conforme au système en place au Moyen Âge. Et ce projet est même inquiétant pour ceux qui, se faisant le relai des autorités publiques et judéo-chrétiennes locales, cherche à le dénier en s’appuyant sur des travaux malhonnêtes de scientifiques qui n’ont de cesse d’essayer d’instiller dans la mémoire collective l’inexistence du catharisme.
C’est pourquoi j’ai étudié différents projets concernant le foncier, le bâti et les équipements périphériques. J’ai également poussé mes recherches vers tout ce qui pourrait permettre d’approcher d’une autonomie totale, sans pour autant rechercher à créer une communauté isolée de son environnement.
Le conteneur est-il un bâti intéressant ?
Le conteneur (container en anglais) est un outil destiné au transport des marchandises. Pour cela sa structure présente de nombreux atouts : un acier spécial très résistant ; une structure capable d’encaisser des forces de distorsion et d’écrasement particulières ; un coût très faible par rapport à l’équivalent en moellons ou en bois. Pour autant, dans un autre usage, certaines de ses qualités s’atténuent voire s’annulent et des défauts apparaissent : la résistance structurale ne tient plus quand on commence à découper l’acier pour créer des fenêtres, des portes ou pour agrandir l’espace en accolant plusieurs conteneurs ; une absence totale de respiration du matériau qui impose une ventilation mécanique ; un effet cage de Faraday pouvant gêner la transmission d’ondes ; une inertie thermique nulle imposant une isolation extérieure et intérieure. N’oublions pas les dimensions contraintes, même si elles sont généralement suffisantes pour l’usage que nous recherchons et si elles peuvent s’adapter en accolant plusieurs unités de base.
Le coût tend à perdre de son intérêt, car la popularité de ce produit dope le marché et les problèmes économiques mondiaux nous privent partiellement de conteneurs ayant effectué un premier voyage, dont le coût est bien inférieur à celui des neufs, pour une qualité comparable.
Les modifications du bâti
Portes closes, un conteneur est un parallélépipède parfait en tôle ondulée, aux angles renforcés et à l’acier Corten® particulièrement adapté aux conditions extrêmes qui le rend plus de deux fois plus résistant que les aciers de construction.
Il s’agit d’un élément structural très intéressant en termes de résistance et de durabilité. Sa présentation en fait donc un produit de choix dans le cadre de l’auto-construction et des constructions modulaires. Mais l’usage détourné pour construire des habitations va poser quelques problèmes.
La structure
Si la structure fait la rigidité et la solidité, toute altération vient rompre cet équilibre. Or, une construction à usage d’habitation nécessite des ouvrants (portes et fenêtres) qui seront découpés dans la structure. Si le volume intérieur disponible ne suffit pas il faudra accoler et/ou empiler plusieurs unités de base et les découper pour les rendre utilisables. L’empilement ne pose pas de problème, car la résistance structurale est prévue pour supporter un empilement sur au moins cinq niveaux de conteneurs pleins de marchandises comme on peut l’observer sur des navires porte-conteneurs.
Les découpes devront donc s’accompagner de renforts structuraux adaptés comme des encadrements renforcés et des poteaux de soutènement.
Même si les conteneurs sont très résistants à la corrosion perforante grâce à la nature de leur acier, leur usage en mode enterré reste à évaluer, du moins si l’on n’y ajoute aucune couverture isolante.
Dernier avantage structurel et non des moindres, les dimensions extérieures sont adaptées au transport routier traditionnel, ce qui permet d’apporter sur site les éléments construits à coût très raisonnable.
L’isolation et la ventilation
Naturellement, le conteneur n’est pas fait pour être isolant. Certains sont utilisés pour des transports de matières fraîches ou réfrigérées au prix d’une isolation renforcée et de l’adjonction d’un groupe électrique réfrigérant. Ce sont les modèles Hi Cube dont la surélévation permet l’installation de ce matériel.
Donc, il est impossible de vivre dans un conteneur brut qui se transformera en étuve en été et en réfrigérateur en hiver. Il faut une isolation conséquente extérieure, et intérieure. En effet, vivre dans un conteneur veut dire émettre des radiations thermiques qui, si elles touchent le métal donneront lieu à une condensation, elle-même cause de moisissures. Le problème de l’isolation intérieure est qu’elle réduit l’espace disponible ; l’isolation extérieure augmente elle la surface du bâti, même si un projet non abouti pour l’instant prévoit d’exclure l’isolation extérieure du calcul de la surface bâtie.
Isoler le conteneur va certes assurer un tampon thermique, mais contrairement aux autres constructions, elle ne règlera pas les transferts hydriques entre l’extérieur et l’intérieur, et ce dans les deux sens. C’est pourquoi il faut obligatoirement prévoir une ventilation active pour évacuer l’air vicié et l’humidité et insuffler de l’air sain et équilibré sur le plan hygrométrique. Cela se fera au moyen d’une Ventilation Mécanique Centralisée à double flux qui va assurer l’extraction de l’air intérieur vicié et l’aspiration de l’air extérieur. Dans un souci d’économie d’énergie, ajouter un échangeur thermique permettra de récupérer les calories émises à l’intérieur pour tamponner la température de l’air extérieur. Si l’on trouve un moyen de récupérer de l’air extérieur tamponné en température et en hygrométrie, une VMC simple flux sera suffisante. Ce moyen s’appelle un puits canadien-provençal. Il s’agit d’une prise d’air extérieure que l’on fait circuler à au moins deux mètres de profondeur dans le sol où la température et l’hygrométrie sont stables afin de les insuffler dans le bâtiment. Cela représente un coût fixe à l’installation, mais une économie sur le système de ventilation et de régulation thermique. Un système utilisant un matériau poreux, comme le grès, est préférable aux systèmes PVC qui favorisent l’humidité des conduits elle-même favorable à une altération de l’air ambiant apporté.
L’isolation extérieure permet d’éviter l’effet thermique de la structure et sert de base à un parement qui peut être facilement adapté aux exigences du Plan Local d’Urbanisme du site où l’on s’installe. Elle sera réalisée, selon les moyens financiers, en laine de verre ou de roche ou en matériaux plus écologiques (paille, chanvre, recyclages divers, etc.). L’isolation intérieure sera plus fine et devra servir également de régulateur hygrométrique pour affiner le travail de la ventilation selon les activités. La largeur contrainte du conteneur (233 cm en interne) oblige à une répartition linéaire des pièces et des éléments de vie. Pour tout autre projet, la seule solution reste d’accoler des conteneurs pour multiplier la largeur initiale.
La ventilation peut se faire en simple flux passif avec des aérations permettant de chasser l’air vicié vers l’extérieur au détriment de l’équilibre thermique, ou en recourant au puits canadien-provençal. À défaut, il faudra recourir à une ventilation à double flux avec échangeur thermique. La circulation des tuyauteries, pourra se faire sans perte de hauteur sous plafond en utilisant un conteneur Hi Cube dont la hauteur intérieure de 265 cm offre 30 cm de mieux que le modèle dry classique.
Les réseaux
Le dernier point à prendre en compte dans ce type de bâti est celui de la gestion des réseaux. En effet, il est fondamental de rationaliser l’installation pour des raisons de coût et d’entretien. Il faut tenir compte de trois types de réseaux : les fluides hydriques, le réseau électrique et les ondes électro-magnétiques.
Il est important de comprendre qu’avant de parler d’autonomie, il faut parler d’économies. L’apport hydrique est essentiel, mais doit être rationnalisé en supprimant les apports non essentiels et en réduisant les gaspillages. Nous gaspillons 40% de l’eau (généralement potable) utilisée dans un domicile pour assurer l’évacuation des urines et des selles dans les toilettes. Pourtant il est très facile d’économiser cette eau en utilisant des toilettes à litière bio-maîtrisée, dites toilettes sèches ou des toilettes à séparation qui permettent d’assécher les selles tout en récoltant les urines pour un autre usage. Si les toilettes sèches ne demandent aucune installation particulière, elles utilisent de la sciure qui doit être achetée et stockée. Les toilettes à séparation nécessitent une évacuation de la ventilation qui sert à assécher les selles via une ventilation à faible consommation électrique, et une évacuation des urines vers un contenant à grande capacité fourni avec le reste du matériel. Le coût des toilettes sèches est très faible et comprend une structure en bois, une lunette, un seau en inox et une pelle à sciure. Celui des toilettes à séparation est plus élevé (entre 1500 et 2000 €), mais offre un confort d’utilisation plus important. Les deux permettent d’importantes économies d’eau qui les rentabilise sur la durée et qui a un impact écologique fort, d’autant que le système de chasse d’eau produit des eaux brunes qui se transforment en boues brunes dont nous ne savons quasiment pas nous débarrasser de façon écologique. L’urine récupérée peut être utilisée comme adjuvant de l’arrosage du potager à une concentration ne dépassant pas 20% du volume total. L’urée qu’elle contient est un excellent fertilisant.
L’eau est récupérée de deux façons : par puisage (puits foré ou captation dans un cours d’eau) ou par récupération des eaux de pluie. Le puisage impacte la nappe phréatique et est susceptible d’être polluée selon l’environnement industriel ou agricole. L’eau la plus pure est celle des eaux de pluie qui doit néanmoins être filtrée. Une filtration grossière (élimination des résidus macroscopiques : feuilles, brindilles, etc.) donnera une eau impropre à la consommation mais adaptée à l’arrosage, au lavage des sols et des matériels, voire au lavage des vêtements. Pour la rendre adaptée à la consommation humaine, une filtration fine permettant d’éliminer les résidus les plus fins, les métaux lourds, les éléments chimiques dangereux sera nécessairement associé à une irradiation UV pour éliminer les agents pathogènes (virus, bactéries, champignons, etc.). L’eau peu filtrée sera distribuée sur des réseaux extérieurs (jardin, garage, composteur, cellier et buanderie) et l’eau filtrée sera apportée dans la salle de douche et la cuisine, les deux réseaux ne devant pas cohabiter dans la même pièce selon la réglementation.
Le réseau électrique devra forcément émaner de sources renouvelables (photovoltaïque solaire, éolien et hydroélectrique), utilisées en association avec des systèmes de stockage (batteries) ou en complément avec une revente au réseau public. Dans le cadre d’une autonomie totale, il faut prévoir des systèmes permettant d’éviter les surcharges en cas de surproduction (systèmes de fuite, production de gaz comprimé, pompe à eau de stockage, etc.). L’autre problème est celui des ondes émises par les fils électriques qui, dans un environnement métallique peuvent être amplifiées. La solution passe par un gainage du réseau offrant une mise à la terre et une étanchéité aux ondes électromagnétiques.
Les réseaux de transmission pour le WIFI et la téléphonie peuvent être impactés ce qui conduira à prévoir des systèmes de ré-amplification.
Au final, le conteneur reste une solution intéressante dont les défauts peuvent être contournés et dont les avantages permettent un gain de temps non négligeable dans la réalisation des travaux.
Les installations périphériques
Comme nous l’avons vu précédemment, le bâti a besoin d’éléments périphériques sans lesquels il ne saurait être utilisable.
Les fondations
Tout type de fondation est possible, mais dans un souci écologique de moindre prégnance environnementale le système de plots supportant la structure s’impose. Selon la nature du sol, il est composé de pieux métalliques plantés dans la couche dure du sol ou, sur un sol plus instable, de plots bétonnés supportant les pieux. Cela crée de fait un vide sanitaire utile notamment au raccordement d’autres éléments extérieurs totalement ou partiellement enterrés.
Le puits canadien-provençal
Ce système vient puiser l’air extérieur par une bouche d’aération grillagée pour éviter l’entrée d’insectes dans le conduit. Ensuite l’air circule dans un conduit enterré à au moins deux mètres de profondeur afin de profiter de l’inertie thermique de la terre à cette profondeur. Enfin il remonte par un conduit sous la pièce recevant la VMC afin d’être utilisé pour la ventilation. Si les conduits en PVC sont largement plébiscités ils présentent un inconvénient majeur, celui de la condensation causée par la différence thermique entre l’air extérieur et l’air souterrain. Cette condensation nécessite une évacuation à la partie la plus déclive du système et peut causer une pollution de l’air transmis dans la ventilation. La solution la plus simple est d’utiliser des conduits en grès, car cette matière empêche la condensation de l’air et donc l’apparition de gouttes d’eau, car le point de rosée n’est pas atteint grâce à la régulation de l’air lié à la plasticité du matériau.
La récupération de l’eau de pluie ou de pompage
La technique la plus classique associe une toiture et des cheneaux récupérant l’eau de pluie et la conduisant à une cuve, généralement enterrée, d’où elle sera puisée et filtrée. Selon la fréquence des pluies on peut se contenter d’une récupération périphérique (casquettes du toit, bâtiments annexes) permettant d’avoir un toit végétalisé très utile pour participer à la régulation thermique du bâtiment, ou bien une toiture plus classique permettant de récupérer le maximum des eaux de pluies quand elles sont rares. La cuve sera préférentiellement enterrée pour éviter les variations thermiques susceptibles de favoriser la production d’algues et en béton pour compenser l’acidité des eaux de pluie. Un préfiltre assurera la filtration macroscopique et une pompe sera installée sur chacun des deux réseaux d’usage, comme nous l’avons vu précédemment. Pour les eaux propres à la consommation humaine, un ensemble de filtration fine et une unité d’irradiation UV sera installée à proximité des zones d’utilisation. Un chauffe-eau solaire installé en rez-de-chaussée (toit plat) ou dans les combles assurera la production d’eau chaude sanitaire. Un réservoir de stockage de l’eau filtrée en inox peut être prévu en cas de filtration lente (filtre céramique ou à osmose inversée) et son installation en hauteur assurera un bon débit aux robinets.
L’eau de pompage nécessitera le creusement d’un puits artésien ou à pompage actif au moyen d’une pompe électrique ou d’une éolienne de pompage. La captation dans un cours d’eau nécessitera des démarches règlement longues et compliquées qui peuvent s’associer à une demande de bief en vue d’une production hydroélectrique. Le filtrage et le suivi de ces eaux sera lui aussi pointilleux pour un usage alimentaire.
Ce suivi se basera sur des prélèvements étudiés en laboratoire indépendants à des fréquences idéalement mensuelles et nous excéder une fréquence semestrielle.
La production électrique
Aujourd’hui, le meilleur système reste le photovoltaïque solaire. Des panneaux solaires reliés à un onduleur qui transforme le courant continu en alternatif et qui peut produire du courant basse tension (12 ou 24 volts pour l’éclairage) ou tension ménagère (220 volts pour les appareils ménagers). En cas de maintien d’un lien avec l’opérateur public ou privé, l’autoconsommation peut être limitée à 50% des besoins, le reste étant fourni par l’opérateur, ce qui évite d’utiliser des systèmes de stockage.
Si l’on recherche une véritable autonomie, il faudra augmenter la surface de captage, disposer d’un onduleur spécial permettant d’éviter les surcharges, et avoir des batteries adaptées pour stocker en vue d’une restitution en cas de mauvais temps et la nuit. Bien entendu cette option est beaucoup plus chère. On peut aussi éviter la dispersion de l’électrique produite en excédent au moyen d’une interactivité avec des éléments satellites comme un véhicule électrique branché sur le même réseau, un système de pompage de l’eau depuis une cuve basse vers une cuve haute qui renverra l’eau sur une centrale hydroélectrique dans les périodes creuses et pourquoi pas des appareils gourmands en courants, comme une pompe à air comprimé qui offrira une énergie alternative pour des usages domestiques (aspirateur centralisé) ou technique (atelier).
En complément du solaire il existe deux autres systèmes d’usage courant comme l’éolien et l’hydroélectricité. S’ils sont intéressants, ils sont aussi demandeur d’une grande patience, car les obstacles administratifs sont nombreux et persistants. Leur coût n’est pas négligeable et leur rendement moindre que celui du photovoltaïque.
Autres installations à prévoir
Nous devons aussi envisager une possible extension du bâti, voire une mixité entre le conteneur et la construction bois. Il faut donc prévoir une possible extension des réseaux dont certains seront indépendants et d’autres partagés.
La recherche d’autonomie passe forcément par la gestion des déchets. Deux systèmes sont à prévoir :
- L’évacuation et le traitement des eaux grises ;
- Le compostage des déchets organiques y compris les selles.
Ces sujets méritent un article à part.
Enfin, sans prétendre à l’autonomie en la matière, la production végétale sera néanmoins à organiser pour réduire les frais dans le domaine alimentaire. Celà pourra être en outre une saine occupation des résidents n’ayant pas d’activité professionnelle.
À titre d’illustration des possibilités, voici mon projet personnel adapté à l’usage d’un fauteuil roulant.
Guihem de Carcassonne, le 1er juin 2022.