5e dimanche de carême

Informations du site

3 165 vue(s)

Lecture des textes de la liturgie catholique

Comme chaque Dimanche et pour les principales fêtes catholiques, je reprends la tradition cathare qui consistait en l’analyse des textes de la messe catholique et leur compréhension du point de vue cathare. Il n’y a là nulle intention malveillante mais un simple exercice de style visant à montrer que la compréhension des textes est aussi affaire de doctrine.

Messe du 5e dimanche de carême

1re lecture :

Ézéchiel : 37, 12-14

12 – C’est pourquoi prophétise ! Tu leur diras : Ainsi a dit Adonaï Iahvé : Voici que moi je vais ouvrir vos tombes, je vous ferai monter de vos tombes, ô mon peuple, et je vous amènerai sur le sol d’Israël.
13 – Vous saurez que je suis Iahvé quand j’ouvrirai vos tombes et quand je vous ferai remonter de vos tombes, ô mon peuple !
14 – Je mettrai mon esprit en vous, vous vivrez, je vous installerai sur votre sol et vous saurez que moi, Iahvé j’ai parlé et j’ai agi, oracle de Iahvé ! »

Mon commentaire :
Ézéchiel parle au nom de celui qui le mandate. La promesse de Iahvé est de relever le peuple d’Israël des morts et de lui rendre son pays. Cette présentation allégorique marque l’espoir des Hébreux d’être libérés de Babylone.

Psaumes : 130 (Vulgate 129), 1-2, 3-4, 5-6ab, 7bc-8

Le « De profundis »
1 – Cantique des montées. Des profondeurs je t’invoque, Iahvé,
2 – Adonaï, écoute ma voix ! Que tes oreilles deviennent attentives à la voix de mes supplications !
3 – Si tu prends garde aux fautes, Iah, Adonaï, qui tiendra debout ?
4 – Puisque près de toi est le pardon, pour qu’on te révère,
5 – j’espère, Iahvé, mon âme espère, et je compte sur ta parole.
6 – Mon âme [compte] sur Adonaï, plus que les veilleurs sur le matin ! [ ]
7 – Qu’Israël compte sur Iahvé, car près de Iahvé est la grâce et près de lui abondante rédemption !
8 – Et c’est lui qui délivrera Israël de toutes ses fautes !

Mon commentaire :
Ce psaume, que nous lisons ici dans son intégralité, à l’exception d’une lacune à la fin du verset 6, est un cantique de supplication. Il rappelle, non pas l’attachement affectif des hébreux pour leur Dieu, mais leurs entraves contractuelles envers celui dont ils semblent même douter de la bonne foi. En effet, l’invocation des oreilles de Iahvé qui pourraient, peut-être, ne pas daigner s’ouvrir à cette supplication interroge sur la nature de ce Dieu.

2e lecture :

Lettre de Paul aux Romains : 8, 8-11

8 – Ceux de la chair ne peuvent donc plaire à Dieu.
9 – Or vous n’êtes pas de la chair mais de l’esprit, pourvu que l’esprit de Dieu habite en vous. Et si on n’a pas l’esprit du Christ on n’est pas de lui.
10 – Mais si le Christ est en vous, votre corps est mort par le péché et votre esprit vit par la justice.
11 – Si l’esprit de celui qui a relevé Jésus d’entre les morts habite en vous, celui qui a relevé le christ Jésus d’entre les morts fera vivre aussi vos corps mortels par son esprit logé en vous.

Mon commentaire :
On voit le travail du scribe qui cherche à semer la confusion chez les lecteurs. Il ne parle plus de la loi du péché affaiblie par la chair, mais de ceux qui sont soumis à la chair. Ce glissement lui permet de séparer ceux qui se fient en Dieu de ceux qui ne s’y fient pas. Ce retournement est incomplet car il laisse transparaître au verset 9 (opportunément absent de ce texte) ce qui pourrait être compris comme une séparation des principes. Il tente un rattrapage au verset suivant mais introduit une notion dangereuse, car si notre corps et notre esprit sont séparés, c’est qu’ils ne sont pas du même créateur.

Évangile selon Jean : 11, 1-45 (ou brève : 11, 3-7.17.20-27.33b-45)

1 – Or il y avait un malade, Lazare de Béthanie, le village de Marie et de Marthe sa sœur.
2 – C’est Marie qui oignit de parfum le Seigneur et lui essuya les pieds avec ses cheveux, et dont le frère était malade.
3 – Les deux sœurs lui envoyèrent dire : Seigneur, voici malade celui que tu aimes.
4 – À ces mots, Jésus dit : Cette maladie ne va pas à la mort, mais à la gloire de Dieu, pour que le fils de Dieu en soit glorifié.
5 – Or Jésus aimait Marthe et sa sœur et Lazare.
6 – Quand il entendit que celui-ci était malade, il demeura encore deux jours où il était.
7 – Ensuite il dit aux disciples : Retournons en Judée.
8 – Les disciples lui dirent : Rabbi, tout à l’heure les Juifs cherchaient à te lapider, et tu retournes là-bas ?
9 – Jésus répondit : N’y-a-t-il pas douze heures de jour ? Si quelqu’un marche le jour, il ne se heurte pas, car il voit la lumière de ce monde,
10 – mais s’il marche la nuit, il se heurte, car il n’y a plus de lumière en lui.

Mon commentaire :
Voilà un épisode très célèbre mais particulièrement énigmatique. Je vais essayer de partager avec vous les sentiments qu’il m’inspire. Déjà, on voit une apparente incohérence entre les versets 9 et 10 et les huit premiers. Quelle est cette maladie dont Jésus dit qu’elle ne va pas à la mort, et nous savons que c’est faux, pourquoi Jésus retarde-t-il son départ alors que tout nous indique son attachement à Lazare et ses sœurs, et que vient faire cette histoire de marche de jour et de nuit ? J’oserais cette analyse. La maladie de Lazare n’est pas physique et c’est pour cela qu’elle ne mène pas à la mort, elle est spirituelle et va provoquer la manifestation de la gloire de Dieu et de son envoyé. Jésus retarde son départ pour manifester sa sérénité et son assurance. Et les versets 9 et 10 sont un début d’explication de la maladie de Lazare. C’est parce qu’il a marché dans la nuit que Lazare a chu et c’est en marchant dans la lumière qu’il avance de façon clairvoyante. Or, Jésus est la lumière et la vie, donc Lazare s’est forcément éloigné de Jésus et c’est de cela qu’il est malade.

11 – Après ces paroles, il leur dit encore : Notre ami Lazare s’est endormi, mais je vais aller le réveiller.
12 – Les disciples lui dirent : Seigneur, s’il dort, il sera sauvé.
13 – Jésus avait parlé de sa mort, mais ils pensèrent qu’il parlait du sommeil.
14 – Alors Jésus leur dit franchement : Lazare est mort
15 – et je me réjouis pour vous de n’avoir pas été là, pour que vous ayez foi. Mais allons près de lui.
16 – Alors Thomas, appelé Didyme, dit aux autres disciples : Allons aussi mourir avec lui.

Mon commentaire :
L’auteur de l’évangile de Jean ne manque pas, une fois encore, l’occasion de montrer que les disciples sont encore très éloignés de la maîtrise de la parole de Jésus. Ils sont dans le premier degré, ce qui oblige Jésus à dire les choses de façon basique. Seul Thomas fait une remarque surprenante. Au premier degré elle semble renforcer son obstination spirituelle, mais au second degré on peut imaginer qu’il se pénètre du sens de ce que vient de dire Jésus et se propose de suivre la démarche spirituelle de la résurrection.

17 – Jésus vint et le trouva depuis quatre jours au tombeau.
18 – Béthanie n’était qu’à environ quinze stades de Jérusalem,
19 – et beaucoup de Juifs étaient venus chez Marthe et Marie les consoler de leur frère.
20 – Quand Marthe entendit que Jésus venait, elle partit au-devant de lui, et Marie restait assise à la maison.
21 – Marthe dit à Jésus : Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort.
22 – Maintenant encore, je sais que Dieu te donnera ce que tu lui demanderas.
23 – Jésus lui dit : Ton frère ressuscitera.
24 – Marthe lui dit : Je sais qu’il ressuscitera à la résurrection, au dernier jour.
25 – Jésus lui dit : Je suis la résurrection. Qui se fie à moi, fut-il mort, vivra.
26 – Quiconque vit et se fie à moi ne mourra pas pour toujours. Le crois-tu ?
27 – Elle lui dit : Oui, Seigneur, je crois que tu es le christ, le Fils de Dieu qui vient en ce monde.

Mon commentaire :
Marthe, qui ne semble pas être aussi proche de Jésus que sa sœur, vient en premier et signifie bien que c’est l’éloignement de Jésus qui est cause du mal de Lazare. Ce dernier la rassure mais elle semble ne pas comprendre complètement ce qu’il dit puisqu’elle replace son propos dans une perspective eschatologique lointaine. Il précise d’ailleurs que la mort n’est pas éternelle (ne mourra pas pour toujours) ce qui peut laisser entendre qu’elle est néanmoins possible de façon transitoire.

28 – Sur ces paroles, elle s’en alla appeler en secret Marie sa sœur et lui dit : Le maître est là, il t’appelle.
29 – Celle-ci, à ces mots, se leva vite et vint à lui.
30 – Jésus n’était pas encore arrivé au village, il était encore au lieu où l’avait rencontré Marthe.
31 – Quand les Juifs qui étaient dans la maison à consoler Marie, la virent se lever vite et sortir, ils la suivirent pendant qu’elle allait pleurer au tombeau.
32 –Marie, quand elle arriva où était Jésus et qu’elle le vit, tomba à ses pieds et lui dit : Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort.
33 – Jésus quand il la vit pleurer et les Juifs qui l’accompagnaient pleurer, frémit en esprit et se troubla.
34 – Il dit : Où l’avez-vous mis ? Ils lui dirent : Seigneur, viens, tu verras.
35 – Jésus pleura.
36 – Les Juifs disaient : Voyez comme il l’aimait.

Mon commentaire :
Marie semble provoquer chez Jésus un trouble que Marthe n’avait pas causé. Que pleure Jésus ? Les juifs pensent que c’est la mort d’un ami, mais n’est-ce pas plutôt le fait que ce proche s’est éloigné, ce qui rappelle que nul n’est à l’abri de la chute. Chute qui intervient quand la Parole s’éloigne de celui qui en vit, comme Marie le rappelle elle aussi à Jésus.

37 – Mais quelques-uns dirent : Lui qui a ouvert les yeux de l’aveugle, ne pouvait-il faire aussi que cet homme ne soit pas mort ?
38 – Jésus, frémissant encore en lui-même, vient au tombeau. C’était un caveau avec une pierre dessus.
39 – Jésus dit : Enlevez la pierre. Marthe lui dit : Seigneur, il sent déjà, c’est le quatrième jour.
40 – Jésus lui dit : Ne t’ai-je pas dit que, si tu as foi, tu verras la gloire de Dieu ?

Mon commentaire :
Marthe, malgré la foi qu’elle semblait manifester, se trouble devant l’épreuve et pense la situation inexorable. Notons que Lazare en est au quatrième jour de sa mort, c’est-à-dire un jour de plus que ce que Jésus connaîtra bientôt. Cela veut renforcer le caractère impossible de ce qui va se produire. La mort est apparemment irréversible car elle a déjà marqué celui qu’elle touche et il en porte le sceau reconnaissable, l’odeur.

41 – On enleva la pierre. Alors Jésus leva les yeux en haut et dit : Père, je te rends grâces de m’avoir entendu.
42 – Je savais que tu m’entends toujours, mais je le dis à cause de la foule qui m’entoure, pour qu’ils croient que tu m’as envoyé.

Mon commentaire :
On croirait à une sorte de mise en scène visant à impressionner la foule encore incroyante. En fait ce pourrait être aussi une sorte de prêche exhortant la foule à comprendre où est la voie saine.

43 – Sur ces paroles, il cria à grande voix : Lazare, viens dehors !
44 – Le mort sortit, les pieds et les mains liés de bandelettes et le visage enveloppé d’un suaire. Jésus leur dit : Déliez-le et laissez-le aller.
45 – Beaucoup de Juifs qui étaient venus près de Marie et avaient vu ce qu’il avait fait se fièrent à lui.

Mon commentaire :
Lazare sort, d’ailleurs ce n’est pas encore Lazare mais « le mort » qui porte les ornements de son état. Il n’est plus mort mais pas encore vivant. C’est pour cela qu’il ne s’exprime pas, ne se jette pas dans les bras de Jésus mais est autorisé à partir. Comme les cathares qui acceptaient le retour de celui qui avait fauté mais qui lui laissaient un temps pour retrouver le bon chemin avant de le recevoir de nouveau dans leur communauté. Jésus ne conditionne pas la « résurrection » de Lazare à son retour auprès de lui, il le laisse libre de son choix et rien ne nous indique ce que va faire Lazare.

Voici comment je reçois ces textes.

Guilhem de Carcassonne.

Faites connaître cet article à vos amis !

Informations du site