Lecture des textes de la liturgie catholique
Comme chaque Dimanche et pour les principales fêtes catholiques, je reprends la tradition cathare qui consistait en l’analyse des textes de la messe catholique et leur compréhension du point de vue cathare. Il n’y a là nulle intention malveillante mais un simple exercice de style visant à montrer que la compréhension des textes est aussi affaire de doctrine.
Messe dominicale du 4e dimanche de l’Avent
1re lecture :
Isaïe : 7, 10-16
10 – Iahvé recommença à parler à Achaz pour dire :
11 – « Demande un signe à Iahvé ton Dieu, cherche-le soit au tréfonds de Sheol, soit situé au plus haut »
12 – Mais Achaz dit : « Je n’adresserai pas de demande et je ne tenterai pas Iahvé ».
13 – Alors il dit : « Écoutez donc, maison de David ! Est-ce trop peu pour vous de lasser les hommes, pour que vous lassiez aussi mon Dieu ?
14 – Aussi Adonaï vous donnera-t-il lui-même un signe : voici que la jeune femme va être enceinte et va enfanter un fils ; tu lui donnera pour nom Emmanuel.
15 – Il mangera du beurre et du miel, jusqu’à ce qu’il sache rejeter le mal et choisir le bien.
16 – Mais, avant que l’adolescent sache rejet le mal et choisir le bien, le territoire à propos duquel tu es épouvanté, à cause de ses deux rois, sera laissé à l’abandon.
Mon commentaire :
Le but de ce choix est d’essayer, coûte que coûte, de rattacher le christianisme à la tradition juive. Peu importe les incohérences et les approximations. Iahvé propose à Achaz de choisir entre le Dieu des enfers (Sheol) ou celui du plus haut. L’annonce du signe ne parle pas de vierge et le prénom retenu n’est pas Jésus. En outre cet enfant n’est pas présenté comme déjà prêt à assumer sa mission. En effet, il doit consacrer son enfance et son adolescence à apprendre à différencier le bien et le mal. On est à l’opposé de l’idée de Jésus, fils de Dieu, venu pour nous.
Psaumes : 24 (Vulgate 23), 1-2, 3-4ab, 5-6
Cérémonie pour l’ouverture des portes du Temple
1 – Psaume de David. À Iahvé appartient la terre et ce qui l’emplit, le monde et ceux qui l’habitent,
2 – car c’est lui qui l’a fondée sur les mers et qui l’a fixée sur les fleuves.
3 – Qui montera à la montagne de Iahvé ? Qui se lèvera en son lieu saint ?
4 – Celui dont les mains sont innocentes et le cœur pur, qui ne se livre pas au mensonge, et ne jure pas pour tromper.
5 – Il obtiendra la bénédiction de Iahvé et la justification de la part du Dieu de son salut.
6 – Telle est la génération de ceux qui le cherchent, qui recherchent ta face, [Dieu] de Jacob !
Pause
Mon commentaire :
Ici on voit la description de celui qui est prêt à se sacrifier pour son Dieu. Même parmi les juifs, tous ne sont pas éligibles à cet honneur. Les judéo-chrétiens reprendront à leur compte ce concept et feront ainsi des sacrifiés sur l’autel du martyre imposé par Rome, les référents par excellence pour ceux qui n’ont pu accéder au martyre, sans doute en raison de leur impureté. C’est ainsi que les martyrs, qui sont célébrés aujourd’hui, serviront d’intercesseurs auprès de Dieu pour les autres. Quand cesseront les persécutions, les Judéo-chrétiens devront trouver d’autres intermédiaires : ce seront les moines anachorètes exilés volontaires dans le désert égyptien, les Pères du désert du 5e siècle.
2e lecture :
Lettre de Paul aux Romains : 1, 1-7
1 – Paul, esclave du christ Jésus, apôtre appelé et mis à part pour annoncer l’évangile que Dieu
2 – avait promis par ses prophètes dans les saintes écritures
3 – au sujet de son fils, né de la semence de David selon la chair
4 – et établi fils de Dieu avec puissance selon l’esprit de sainteté par sa résurrection d’entre les morts, Jésus Christ notre seigneur,
5 – par qui nous avons reçu grâce et mission afin que la foi soit obéie pour son nom dans toutes les nations,
6 – dont vous faites partie, vous, les appelés de Jésus Christ,
7 – à tous les aimés de Dieu qui sont à Rome, appelés à la sainteté. À vous, grâce et paix de Dieu notre père et du seigneur Jésus Christ.
Mon commentaire :
Dans son introduction et salutation Paul se présente comme apôtre reconnu mais séparé des autres pour une mission spécifique. N’oublions pas que le terme évangile désigne une bonne nouvelle. Or, Paul semble avoir pris ce terme en son sens premier et ne s’est pas lancé comme d’autres dans une biographie de Jésus.
Le verset 3 comporte un ajout « selon la chair » destiné à contrecarrer Marcion, comme l’explique Paul-Louis Couchoud[1]. D’ailleurs le terme Jésus Christ semble être une construction intervenue lors de la récupération de ses écrits par les catholiques désireux de lui retirer ce qui en faisait un hérétique aux yeux de beaucoup car, en effet, Paul n’a pas connu Jésus et ne connaît que la révélation de Christ qu’il reçut sur le chemin de Damas.
Il s’adresse à une communauté romaine dont il sait qu’elle est composite. Il est même probable qu’il y ait plusieurs communautés. Le verset 7 montre que certains membres ne sont pas encore considérés comme chrétiens (appelés à la sainteté) et Paul ne parle pas de membres d’un plus haut niveau (les teleios) ni d’apôtres.
Évangile selon Matthieu : 1, 18-24
18 – Et voici les origines de Jésus Christ. Marie sa mère était fiancée à Joseph ; avant qu’ils soient ensemble, elle se trouva enceinte par l’Esprit saint.
19 – Joseph son époux, qui était juste et ne voulait pas la diffamer, décida de la renvoyer en secret.
20 – Comme il y pensait, voilà qu’un ange du Seigneur lui apparut en songe et dit : Joseph fils de David, ne craint pas de prendre Marie ta femme, car ce qu’elle a conçu est de l’Esprit saint.
21 – Elle enfantera un fils et tu l’appelleras Jésus car il sauvera son peuple de leurs péchés.
22 – Tout cela arriva pour remplir cette parole du Seigneur qui dit par le prophète :
23 – Voici, la vierge sera enceinte et enfantera un fils, et lui, on l’appellera Emmanuel, ce qui veut dire : Dieu avec nous.
24 – Réveillé, Joseph fit comme l’ange du Seigneur lui avait prescrit, il prit sa femme
Mon commentaire :
Le fait pour une femme mariée, mais également pour une fiancée, de se retrouver enceinte, était considéré comme un adultère. Si donc Joseph avait été juste, il l’aurait dénoncée et elle aurait été lapidée. De même, dire qu’elle était enceinte sans qu’il n’y fut pour quelque chose n’aurait pas été de la diffamation. Cependant la décision de renvoyer sa promise dans sa famille provoque la réaction de Dieu qui envoie un ange. En fait cette construction vise à attacher solidement la tradition christique à la tradition juive, comme en atteste la suite où l’on utilise une prophétie sans tenir compte de la divergence des prénoms. Pour garantir la paternité divine, Joseph n’a aucune relation sexuelle avec Marie (v. 25), même après leur mariage. Par contre, cela n’interdit pas de penser qu’ils en eurent ensuite et donc, qu’ils eurent d’autres enfants comme cela apparaît dans l’épisode du paralytique.
Voici comment je reçois ces textes.
Guilhem de Carcassonne.
[1] Paul-Louis Couchoud : La première édition de Saint Paul in www.Radikalkritik.de – Berlin 2002