Je connais quelqu’un de formidable

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J’emprunte ce titre au blog d’un monsieur avec qui j’entretiens des relations empreintes de sympathie et de respect que je crois partagées.
En fait, j’y ai pensé en raison du double sens de ce mot dont l’évolution des deux côtés de l’Atlantique ont été différentes. Ayant conservé son sens originel, les français du Canada ou de Louisiane le réservent à la qualification de phénomènes très remarquables (une explosion formidable par exemple), alors que nous lui reconnaissons un second sens, plus proche de merveilleux et de remarquable.

Les glissements de sens

Jusque là j’espère que vous êtes complètement perdus vis-à-vis de mes intentions. Après tout, à défaut d’être un auteur de grande qualité j’essaie au moins de ménager mes suspenses.
Quand les mots tendent à changer de sens dans nos usages c’est rarement par hasard ; je crois même que le hasard n’y est pour rien.
Formidable vient renforcer l’équipe des mots à visée de qualification positive et ce n’est pas pour rien. C’est pour exprimer une nuance que sympathique, génial, merveilleux, extraordinaire, etc. ne parviennent pas à rendre précisément.
Il en va de même dans d’autres domaines de notre vie.
Les mots destinés à exprimer des notions, des sentiments, des pensées plus intimes changent aussi progressivement de sens pour des raisons que nous acceptons plus ou moins d’avouer.
Le mot « chrétien » était réservé aux seuls baptisés au premier siècle. Il signifiait un engagement de vie qui pouvait passer pour contraignant, notamment aux yeux de ceux qui n’envisageaient pas de le suivre. Puis, petit à petit, le baptême s’est vu en quelque sorte « démonétisé », d’abord subdivisé en deux éléments distincts, celui donné aux nouveaux-nés afin de les agréger à une religion avant qu’ils n’aient le temps d’en apprécier la validité et celui que l’adolescent va venir confirmer en recevant de nouveau le saint chrême.
Du coup tout le monde s’est retrouvé chrétien sans l’avoir demandé et, à l’instar de la Légion d’Honneur, le terme s’est dévalorisé. Si l’on pouvait être chrétien sans vraiment manifester un quelconque engagement, en quoi un chrétien est-il différent d’un autre ? Du coup chrétien ne veut plus dire que membre d’une communauté où le christianisme est la religion imposée.
Mais, au fil des siècles, des hommes persistèrent à conserver au baptême sa fonction initiale et à ne dire chrétiens que ceux qui l’avaient reçu en leur âme et conscience et souhaitaient mener une vie en accord avec les engagements pris lors de ce rituel.
C’était vrai au quatrième siècle puisque Constantin Ier, qui avait pourtant fait sienne la religion chrétienne refusa d’être baptisé avant son agonie. Ainsi il se gardait de devoir respecter les engagements que le baptême impose à chaque chrétien d’une part, et il conservait une certaine neutralité vis-à-vis de ses sujets païens d’autre part.
Mais, petit à petit, le christianisme d’habitude prit le dessus et rares furent ceux qui maintinrent au baptême sa valeur authentique et originelle. Nos amis bons chrétiens médiévaux en faisaient partie. Ils étaient ceux qui n’avaient pas fait leur le glissement de sens accordé au mot chrétien.
Et pourtant nous les connaissons sous le nom de cathares. Ils avaient construit une doctrine entièrement basée sur le christianisme enseigné par Jésus et diffusé par Paul, Marcion et Constantin de Mananalis entre autre. Surtout ils avaient maintenu cette cohérence entre sacrement et vie choisie. Leur règle de vérité et de justice était intimement liée au titre de chrétien qu’ils se donnaient et quiconque ne la suivait pas ne pouvait le revendiquer parmi eux.
Aujourd’hui le terme cathare resurgit chez celles et ceux qui se reconnaissent dans ce christianisme cohérent et honnête avec lui-même. Mais la tendance aux glissements de sens revient elle aussi. Le catharisme ne serait-il pas ajustable, modelable, adaptable aux particularités de notre monde ? Comment répondre à cela ?
Il est un autre domaine où le glissement de sens accompagne un désir d’appartenir à l’histoire.
C’est une particularité de l’homme d’aspirer à pouvoir dire : « J’y étais ! »
Aujourd’hui que le catharisme semble vouloir montrer le bout de l’oreille, nous sommes nombreux à penser ainsi et à nous dire que ce serait vraiment « » si nous pouvions être les premiers témoins direct de la remise sur pied d’un catharisme actif et structuré. Certains qui sont dans cette attente depuis longtemps et qui voient les jours filer sont même impatients. Et c’est bien normal, humain devrais-je dire. Mais le danger est de dénaturer le terme de bon chrétien, de cathare ou de bonhomme dans le seul but de voir l’émergence d’une Église cathare. L’Église ne se construira pas par le haut, mais par la base. Elle ne peut s’appuyer que sur les deux fondements qui furent toujours les siens, à savoir une doctrine chrétienne basée sur les fondamentaux doctrinaux, largement éprouvés  depuis le premier siècle, et un choix de vie respectueux des règles de vérité et de justice.

Se hâter avec lenteur

Les structures mondaines faites de main d’homme ont toute pour principe de faire valider les choix par des experts reconnus.
Un homme ne peut être ordonné prêtre que par son évêque qui apprécie ses compétences, un ouvrier ne devient compagnon qu’après un long apprentissage validé par ses maîtres, etc.
Mais le catharisme d’aujourd’hui souffre d’un manque essentiel en la matière. Nous n’avons pas parmi nous de bon chrétien attesté qui puisse choisir dans notre groupe celles et ceux qui lui paraissent en mesure de suivre un noviciat en vue de demander, à terme, leur Consolation.
Voilà un problème qui donne du grain à moudre à beaucoup. Les uns, historiens soucieux de maintenir le catharisme dans l’éprouvette de la recherche scientifique athée — pardon je voulais dire laïque —, de l’histoire moderne, s’en servent pour déclarer l’objet de leur étude mort et refroidi et surtout incapable de ressusciter, ce qui leur semblerait anormal de la part d’une religion qui rejette le principe de réincarnation et lui préfère celui de transmigration.
Les autres, par excès d’empressement ou pour d’autres raisons que je ne veux pas trop explorer, veulent désigner un ou des bons chrétiens parmi les croyants qui vivent dans notre entourage. Ce serait très intéressant si l’on pouvait s’accorder sur le fait que ces personnes, très souvent de haute valeur morale par ailleurs, présentent bien les critères les plus évidents de conformité à l’ensemble des éléments définis par les bons chrétiens médiévaux pour rejoindre leurs rangs.
Or, ces critères sont de deux ordres, le premier est le spirituel et il est très difficile de dire si untel ou un autre est ou pas spirituellement dans la lignée des bons chrétiens, le second est plus facile à apprécier puisqu’il s’agit de dire si les personnes mise en avant vivent au quotidien dans la règle de vérité et de justice sur le plan matériel qui est le pendant visible du premier point.
Personnellement, aujourd’hui je ne connais personne dans mon entourage qui satisfasse à ces deux critères.
En outre, pour apprécier valablement de telles références, il ne suffit pas de se voir de temps à autre mais de s’assurer que ce que l’autre donne à voir correspond bien à une attitude régulière et permanente. N’oublions pas que les premiers qui se trouveront mis en avant par la communauté moderne auront fort à faire pour fédérer cette communauté et qu’il convient de ne pas se tromper de candidat. Toute erreur serait aussi catastrophique que d’avoir confié l’église chrétienne à un juif orthodoxe plutôt qu’à Paul.
C’est pour cela qu’il faut empêcher le mauvais Principe de nous aiguillonner car la précipitation mène à la chute.
Hâtons-nous lentement et laissons les personnalités bien disposées avancer à leur rythme — qui ne peut être le nôtre — pour qu’un jour une communauté de vie puisse se mettre en place au sein de laquelle vraisemblablement, en quelques années, des personnalités seront reconnues comme porteuses de l’esprit et capables de relancer la résurgence cathare du XXIe siècle.

La bonne foi n’est pas clairvoyance

Il est très difficile de faire passer de tels messages à des frères et sœurs dont on connaît la pureté de cœur. Leur bonne foi est sans faille et leur foi tout court est très sincère. Pour autant ces qualités ne leur donne pas forcément la clairvoyance nécessaire à l’appréciation des qualités d’autrui. Si j’en avais cru certains j’aurais pu m’imaginer arrivé à un tournant de ma quête.
Mais, même si j’admets qu’il est difficile de s’auto-estimer, je pense qu’il faut savoir dire aux autres quand leur élan est prématuré.
Le catharisme commence à être assez bien connu et l’on commence à discerner suffisamment d’éléments doctrinaux de la spiritualité cathare et de la vie évangélique qui la soutenait pour pouvoir se fixer des préalables minimaux à la reconnaissance de l’entrée de l’un de nous en vie chrétienne.
Nous ne sommes pas dans le judéo-christianisme ou dans le gnosticisme où le recours au caché, au mystère, voire à une sorte de magie pourrait se substituer aux éléments simples et vrais d’une vie chrétienne de vérité et de justice adossée à une vie spirituelle de non-violence absolue et de Bienveillance totale.
Nous sommes pour autant à une période que je trouve exaltante. Certains d’entre-nous commence à bien définir comment ils envisagent de poursuivre leur route, soit au plus tôt, soit quand leurs engagements de vie seront accomplis. On les trouve sereins et apaisés maintenant qu’ils ont entrevu la route qu’ils veulent suivre. Leur exemple montre que ce choix de vie, quoique bouleversant qu’il puisse paraître, n’est en aucune façon un drame personnel ni une révolution dévastatrice.

Mon choix personnel, que vous connaissez à peu près tous, ne me satisfait pas tout à fait car, la temporisation que j’y ai introduite est à mon goût une forme de mensonge à moi-même. Mais pour l’instant je ne me sens pas en mesure de faire plus et je ne veux pas me faire violence.
Pour autant je ne vous cacherai pas que, si le choix global reste clair, je ne m’interdit aucune modification possible de calendrier ou de mise en œuvre. L’avenir et le déroulement de ma vie de simple croyant bien attaché à sa mondanité en décideront.

Mais si je pense que personne autour de moi ne me semble en ce moment sur la voie qui pourrait en faire rapidement un bon chrétien, je connais plein de gens formidables qui devraient pouvoir y parvenir à terme. Tout ce que je souhaite, c’est que j’aurai la chance d’être à leurs côtés à ce moment pour profiter de leur sollicitude.

Publié le 11 avril 2011.

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