Le Concile de Latran IV

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Le Concile de Latran IV

Le quatrième concile œcuménique du Latran (souvent surnommé Latran IV) est le douzième concile œcuménique de l’Église catholique. Il est tenu à Latran en 1215 sur l’initiative du pape Innocent III.

Circonstances

L’idée du concile a d’abord été celle de l’empereur d’Orient et du patriarche de Constantinople, avant le Grand Schisme d’Orient de 1054 : ils souhaitaient discuter d’une réunion avec l’Église d’Occident. Quand Innocent III reprend l’idée d’un nouveau concile universel, c’est plutôt dans le but de prêcher la croisade et de parler de la réforme de l’Église. Ainsi, la bulle d’indiction du concile, Vineam Domini Sabaoth, est publiée le 19 avril 1213, le même jour que celle de croisade (Quia major nunc).
Le concile se veut universel dès le début : 80 provinces ecclésiastiques sont représentées, soit 400 cardinaux, archevêques, évêques ou patriarches, 800 abbés, prieurs ou doyens. En tout, 1 200 personnes sont rassemblées (contre 200 à peine pour le concile du Latran I) ; les cinq patriarches sont présents. C’est l’application du principe de droit romain « Quod omnes tangit ab omnes approbetur » (« ce qui concerne tout le monde doit être approuvé par tout le monde »). Pourtant, il est indéniable que les 71 décrets ou canons pris par le concile sont avant tout l’œuvre du pape.

Décisions principales

Le concile se tient en trois séances solennelles, les 11, 20 et 30 novembre 1215. Le déroulement des séances intermédiaires nous est connu par la relation dite de « l’Anonyme de Giessen ». Les débats prennent place par nations avant d’être portés devant le pape et les évêques. Des auditions ont lieu : ainsi, les comtes de Foix et de Toulouse, accusés d’hérésie, viennent plaider leur cause devant le concile.
Lors de la séance de clôture, le concile proclame la paix générale mais aussi la croisade, promulgue ses décrets et fulmine ses anathèmes.

La foi

Le symbole issu de Latran IV, contenu dans la constitution dogmatique De fide catholica, est cinq fois plus long que celui de Nicée-Constantinople. Le concile affirme (principalement pour condamner les cathares) la Trinité, l’incarnation humaine du Christ, et introduit dans le dogme, sous l’influence des théologiens Pierre Lombard et Étienne Langton, le concept de la transsubstantiation.

La réforme de l’Église

Les clercs

La simonie et le nicolaïsme sont de nouveau condamnés, de même que, pour les clercs, l’ivrognerie, le jeu, la participation aux festins et aux duels ou encore la pratique de la chirurgie. Le concile insiste sur leur décence nécessaire : interdiction des habits de luxe, obligation d’assister aux offices, de garder les lieux de culte propres et convenables.
Pour ce qui est des moines, la décadence de certains ordres comme Cîteaux est dénoncée. Le concile interdit toute nouvelle création d’ordre et toute nouvelle règle.

Les laïcs

En ce qui concerne les laïcs, les sacrements font l’objet d’un travail de définition. C’est le cas par exemple pour la confession, mais aussi l’eucharistie : le décret Utriusque sexus impose la confession et la communion annuelle à tous les laïcs parvenus à l’âge de discrétion (annos discretionis : l’âge auquel on distingue le bien du mal) ou l’âge de raison.
Contre le catharisme, la qualité du mariage est mise en exergue comme l’un des sept sacrements et défini comme l’union de deux volontés plus que comme celle de deux corps. La législation a ce sujet est raffinée : la parenté minimale est ramenée à 4 degrés (au lieu de 7 depuis la réforme grégorienne), les bans deviennent obligatoires même si les mariages sans prêtre et sans bans demeurent valables : ce sont les mariés et non le prêtre qui confèrent le sacrement.
Enfin, dans le domaine judiciaire, l’ordalie (ou jugement de Dieu) est interdite.

Hérétiques et infidèles

Le concile s’occupe de la question albigeoise : Raymond VI, comte de Toulouse, est destitué. Le concile condamne également les amauriciens, jugés coupables de panthéisme, et les œuvres de Joachim de Flore, accusé de trithéisme. Plus généralement, le concile réaffirme les fondements de la politique catholique contre les hérétiques : les évêques sont chargés de débusquer les hérésies, et les autorités civiles doivent leur prêter leur concours. Dans le cadre du concile, le pape projette avec saint Dominique et Foulques, évêque de Toulouse l’établissement du futur Ordre des Frères Prêcheurs (ou dominicains).
Les Juifs font l’objet de mesures de discrimination :
* interdiction d’exercer les fonctions publiques;
* obligation de porter un costume spécial et la rouelle qui empêche les unions mixtes (c’est-à-dire entre chrétien(ne) et Juif(ve) non converti(e));
* rappel de l’interdiction du prêt à usure.
Mettons à part:
* interdiction de sortir pendant la Semaine Sainte, s’agissant ici d’une mesure moins de discrimination que de protection envers les Juifs, la Semaine Sainte étant la période la plus habituellement féconde en violences populaires contre les Juifs, ce que l’Eglise s’efforce de prévenir par ce moyen.

Latran IV se tient peu après le Grand Schisme d’Orient de 1204 : le concile condamne vigoureusement l’« insolence » du clergé grec, les rites orientaux et réaffirme la préémenince du pape.
Enfin, le concile appelle à la croisade contre les Sarrasins et rappelle l’indulgence dont bénéficient les croisés, et la protection accordée par l’Église aux personnes et aux biens des croisés. Par ailleurs, interdiction est faite de nouveau de commercer avec les musulmans. Innocent III meurt peu après le concile, et finalement la croisade qu’il prêchait ne partira pas.

Bilan

Le IVe concile du Latran revêt une importance considérable dans l’histoire de l’Église. Après le concile de Trente, il est celui qui a inséré le plus grand nombre d’articles dans le droit canonique. S’il a déployé des efforts importants pour moraliser l’Église et ses clercs, et développer la pastorale auprès des fidèles, il a également adopté des positions porteuses de danger, notamment en matière de politique.
En outre, malgré un grand nombre d’assistants, le concile n’est finalement que peu représentatif de la Chrétienté : la moitié des évêques sont italiens et guelfes, l’Église orientale très faiblement présente. Enfin, l’accent mis sur la répression contre les Juifs et les hérétiques laisse préfigurer l’Inquisition.

Source Wikipedia

Éric Delmas – 06/10/2007

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