Adam, le premier esprit tombé – 1

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Adam, le premier esprit tombé – 1e partie

Du mythe à la science

Dans la Genèse, Dieu crée l’homme à la fin de la création du monde. Comme je l’ai signalé dans mon texte « La Genèse, une affaire d’interprétation », il le crée même deux fois, tout d’abord de sa simple volonté et ensuite en le façonnant à partir d’une poignée de boue dans laquelle il insuffle la vie.

En partant de ces données cosmogoniques je vous propose de réfléchir à ce que pourrait être la véritable création d’Adam, c’est-à-dire celle de l’homme disposant d’un esprit.
Nous l’avons vu, pour les cathares, la création de l’homme est le résultat du mélange entre la matière primordiale, créée par Lucifer ou bien créée par Dieu mais pervertie par Lucifer et un tiers des esprits saints, pure et éternelle émanation divine.
Je fais partie de ceux qui ne croient pas à la création de la matière par Dieu, et ce pour deux raisons qui me semblent bonnes : la perfection et l’éternité. En effet, si Dieu avait voulu la matière, elle n’aurait pu qu’être parfaite, donc incorruptible, fut-ce par Lucifer, et éternelle donc incapable d’être détruite un jour comme l’annonce l’Apocalypse.

Mais un autre problème se pose, celui de l’apparition du premier homme : Adam.

Adam, le dernier arrivé dans la création

Dans la Genèse, Adam arrive bon dernier dans les œuvres divines. C’est en quelque sorte « la cerise sur le gâteau » d’une création déjà fonctionnelle. Si l’on se réfère à cette donnée, que pouvons-nous imaginer pour ce qui est de la réalité créationniste ?

L’étude de la création de l’univers et de la Terre nous permet de remarquer que l’homme y est aussi arrivé dans les derniers. En outre, il y a deux sortes d’hommes. Celui qui va gentiment évoluer au fil de plusieurs millions d’années en acquérant des compétences et des capacités, intellectuelles et pratiques, qui lui permettent de s’adapter à son environnement et d’y occuper une place préférentielle et, tout à coup, sans raison apparente, cet homme va acquérir une compétence particulière, sans intérêt évolutionniste, voire gênante dans son évolution, mais qui va révolutionner ses choix à venir. Cette compétence je l’appellerais la capacité de projection par abstraction et de transcendance.

Si les scientifiques sont parfaitement capables de nous expliquer les différentes phases de l’évolution de l’homme de Toumaï jusqu’à l’Homo sapiens, je n’ai trouvé aucune explication qui justifie que, Homo néanderthalensis et Homo sapiens, après des dizaines de millénaires d’existence et d’évolution propre, soient devenus si différents, sans que rien ne le justifie.
Mais pour la science l’homme n’est pas apparu ex abrupto ; il est le fruit d’une lente et constante mutation qui va partir d’animaux marins pour finir, au prix d’une sélection naturelle drastique, par produire des mammifères de plus en plus évolués qui vont s’adapter à leur environnement et progresser jusqu’à l’homme moderne.
Cette théorie apparemment imparable n’est pas sans faille, elle non plus. Certes, il reste à découvrir le fameux chaînon manquant à la croisée de la branche homo et de la branche pan, mais je pense que le problème n’est pas là. Le problème est que le hasard des scientifiques a presque aussi bon dos que le Dieu des créationnistes.
En effet, pourquoi la nature n’a-telle réussi qu’une fois son coup de dés ? Nous le savons, même le hasard peut répéter certaines séquences. Sinon le Loto n’existerait pas ! Or, si le hasard a répété à de nombreuses reprises les séquences qui allaient donner toutes les races animales de la planètes et toutes celles du monde végétal, dont beaucoup sont très proches les unes des autres, il n’aurait pas réussi à créer plusieurs sortes d’hommes ? Et bien entendu, je ne parle pas d’ethnies mais bien de formes d’hommes qui seraient à la fois très proches dans bien des domaines mais très différents sur de petits points de détail, comme les capacités intellectuelles, le nombre de doigts, etc. C’est bien ce que l’on trouve chez les animaux (cheval, âne, zèbre, etc.). Donc, si le hasard n’agit pas de façon totalement hasardeuse, peut-être n’est-ce pas vraiment du hasard.

Cependant, la distortion entre créationisme divin et évolutionnisme scientifique semble totalement incompatible et crée un fossé impossible à combler ce qui va pousser les uns à chercher des artifices voire à essayer de nier les preuves scientifiques quand les autres traiteront les premiers d’obscurantistes car incapables d’admettre que la science vient de mettre Dieu en échec.
Je proposerai plus tard une hypothèse qui pourrait bien réconcilier ces deux partis apparemment impossibles à rapprocher.

L’apparition de l’homme pour les cathares

Nous l’avons vu, les cathares pensaient que l’homme était un esprit tombé de la sphère divine dans la sphère matérielle, comme le dit si bien Lamartine dans son poème, adressé au poète romantique anglais Lord Byron, qui montre une interrogation similaire quant à notre origine et dont je vous livre ces quelques vers :
« … Que celui qui l’a fait t’explique l’univers !
Plus je sonde l’abîme, hélas ! plus je m’y perds.
Ici-bas, la douleur à la douleur s’enchaîne.
Le jour succède au jour, et la peine à la peine.
Borné dans sa nature, infini dans ses vœux,
L’homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux ;
Soit que déshérité de son antique gloire,
De ses destins perdus il garde la mémoire ;
Soit que de ses désirs l’immense profondeur
Lui présage de loin sa future grandeur :
Imparfait ou déchu, l’homme est le grand mystère.
… »

Et pourtant Lamartine n’était pas cathare et n’en avait sans doute jamais entendu parler.

Les cathares résolvaient certaines questions que posait leur théorie de la manière suivante :

  1. À la question de la création unique d’Adam ils répondaient par référence à l’Apocalypse que les esprits étaient tous tombés en même temps, soit en précisant qu’il s’agissait du tiers de l’émanation divine, soit qu’il s’agissait de la tierce partie de chacun des esprits initialement présent dans l’émanation divine. Cette théorie qualifiée d’origénienne, en référence à Origène un des premiers Père des l’Église catholique romaine, donna d’ailleurs à Jean Duvernoy l’idée que les cathares étaient origiéniens. Cela est impensable tant Origène aurait par ailleurs rejeté la quasi totalité des éléments doctrinaux cathares.
  2. À la question de l’apparente inaction de Dieu face à cette seconde perturbation, ils répondait que le Bien n’ayant pas de mal à opposer au Mal — ce qui s’oppose à l’idée d’un combat céleste entre les forces du Bien et celles du Mal —, Dieu avait soit laissé partir les esprits en leur disant que c’était pour un temps seulement, soit qu’il s’agissait d’un pacte entre Dieu et Lucifer valable pour sept jours qui sont les sept jours de la Genèse.
  3. À la question du devenir des esprits tombés les cathares proposaient soit l’hypothèse que ceux qui avaient suivi de leur plein gré étaient devenus les démons et n’auraient pas droit au salut, mais que ceux qui étaient tombés par accident seraient sauvés, soit que Dieu avait stoppé la chute permanente en fermant le trou créé par Lucifer en disant à ceux qui n’étaient pas tombés que s’ils bougaient ils ne connaîtraient jamais le repos et à ceux qui étaient tombés que leur sort serait temporaire.
  4. À la question de la situation actuelle de l’homme, ils répondaient comme Lamartine que les esprits saints tombés dans cet enfer conservaient la mémoire de leur félicité perdue et commencèrent à se plaindre si bien que Lucifer les enferma dans des corps de matière pour leur faire oublier leur origine.

Bien entendu, les cathares n’avaient aucune connaissance des travaux futurs de Darwin et ne pouvaient pas imaginer une théorie évolutionniste tant leur époque était imprégnée de la vision judéo-chrétienne créationniste. Cela explique leur apparente contradiction et cela rend plus louable leur opposition à un mythe fondateur considéré comme indiscutable à leur époque.
Pour autant les questions qu’ils ne se posaient pas ne peuvent être ignorées aujourd’hui.

L’évolution numérique de l’humanité

Comment faire correspondre l’idée d’une chute massive et unique des esprits avec l’évolution numérique de la population terrestre ?
Je rappelle que, justement en raison de cette évolution, deux autres théories avaient connu leurs jours de gloire :

  • dans la théorie créationniste qui s’est finalement imposée, Dieu crée une âme pour chaque enfant conçu et, à sa mort, cette âme est jugée et va donc en enfer, au purgatoire ou au paradis. Ce qui pose le problème du jugement dernier. En effet, pourquoi re-juger ce qui l’a déjà été ?
  • dans la théorie traducianiste qui connu un certain succès chez bon nombre de Pères de l’Église, Dieu n’a soufflé que dans Adam. C’est donc à partir de lui qu’à chaque génération la reprodution des corps provoquait également une reproduction de l’âme au sein de chaque nouvel enfant. Par contre cette théorie, qui fut adoptée par les cathares monarchiens dits mitigés, ne dit rien du devenir de l’âme après la mort.

Comme les cathares dyarchiens, dits absolus, je ne trouve pas de satisfaction dans ces deux hypothèses et je préfère celle de l’incarnation globale qui veut donc que les esprits soient tous tombés en même temps, à l’apparition de l’homme, et qu’ils passent de corps en corps, par transmigration, jusqu’à ce qu’ils s’éveillent et réussissent leur bonne fin qui leur permettra de retourner dans le sein de Dieu.
Mais reste la question de l’apparente incompatibilité entre un nombre d’esprit limité et une évolution démographique qui fait varier sans cesse la population terrestre. Deux options étaient possibles :

  • soit tous les esprits tombés ne s’étaient pas incarnés ;
  • soit certains corps ne contiennent pas d’esprits.

Le premier cas semble peu logique. En effet, si rien ne contraint un esprit tombé ici-bas et ne lui ôte la mémoire de son origine, comment imaginer qu’il demeure en cet enfer. De même, dès l’éveil nous devrions retourner auprès de Dieu sans avoir à rester prisonnier jusqu’à la mort de notre corps.
Le second cas pose lui aussi un problème. Si tous les esprits tombés furent incorporés dans des corps, il faut déterminer à quel moment cela s’est produit pour définir le nombre d’esprits prisonniers eut égard au nombre de corps disponibles à l’époque et il faut admettre que l’augmentation de population survenue depuis, c’est-à-dire le différentiel entre les morts et les naissances, n’a produit que des corps sans esprit prisonniers, donc que des démons. Cela semble excessif même l’augmentation du Mal en ce monde est une évidence et qu’il peut sembler plus commode d’imaginer que les mauvais d’aujourd’hui n’ont pas d’esprit que de les croire seulement non éveillés.

C’est pourquoi, et je terminerai cette première partie sur ce point, je pense que l’on peut imaginer que tous les esprits se sont incarnés à un moment donné, et je le détaillerai demain, et je pense que la fluctuation numérique peut très bien s’expliquer à l’aide d’un mythe moderne tiré d’un film fantastique : Stargate® ou, pour parler français : La porte des étoiles.

Éric Delmas – 08/02/2017

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